Pour être tout à fait honnête, je ne vois pas de meilleur terme pour définir cette partie, et plus globalement, cette série. Avec seulement 10 épisodes, cette saison 3 - partie 2 prouve une fois de plus que L'Attaque des Titans mérite sa place parmi les plus grands de l'animation japonaise.
Chaque épisode, malgré sa durée de 20 minutes, est une pépite à lui seul. Inutile de s'attarder sur l'animation, réalisée par WIT Studio et toujours de très grande qualité, notamment dans certaines scènes d'action tout simplement jouissives (comme dans l'épisode 5). L'OST est aussi au même niveau que les saisons précédentes, mixant reprises d’anciens thèmes (AppleSeed en tête) et pistes originales (par exemple Shingeki no Kyojin). Les musiques arrivent toujours à démultiplier les émotions ressenties par le pauvre spectateur, en retranscrivant ce frisson épique, tragique et angoissant si cher à L’Attaque des Titans.
Mais l’on ne saurait résumer cet anime à cela. Ce serait oublier un des éléments les plus frappants de cette partie : le traitement et l'évolution des personnages. C’est simple, presque personne n'est délaissé, tout le monde trouve son compte, et cela est fait avec une justesse rarement égalée. Au fur et à mesure que l’on progresse dans la narration, l’auteur met en lumière toutes les failles de nos personnages et joue avec ce manichéisme humains / titans qui semble dominer depuis la première saison. Certains développements menés sont très bien vus, intelligents, qui amènent à chaque des fois des pistes de réflexion subtiles mais jamais forcées. Et souvent, au centre de tout, une notion vient s'opposer à l'héroïsme revendiqué par les membres du bataillon d'exploration : l'égoïsme. L'ambiguïté de certains personnages poussés à bout révèle tout simplement leur face humaine, pleine de fragilités, qui interroge le sens réel de leurs actions.
Mention spéciale pour Erwin Smith, détenteur de la meilleure mort de l'anime. Tout y est parfait : les remords inhérents à son rôle de commandant qu'il éprouve, la manière dont est déconstruite sa figure héroïque, face à ses rêves égoïstes, et qui traduisent alors l'absurdité du combat et du sacrifice... Ce personnage est celui qui m'a paru le plus ambigu, le plus humain, le plus empathique. Sans parler de sa mise en relation avec Armin lors du choix de la seringue : comment choisir entre deux leaders géniaux, deux grands amis, deux êtres n'ayant pas atteint leurs rêves ? C'est d'ailleurs ce fameux choix qui va, lors du dernier épisode, exposer l'égoïsme d'Eren à travers le discours moraliste que lui tient Frock : beaucoup ont sûrement trouvé ce dernier insupportable durant cette scène, très sûrement puisque le spectateur est plus attaché émotionnellement à Armin qu'à Erwin. C'est pourtant un habile moyen de dénoncer l'égoïsme des sentiments face au devoir commun, ici comprendre "le bien de l'humanité".
Et plus l'intrigue progresse, plus les éléments s'emboîtent, plus le tout devient cohérent : les événements et les réflexions qu'ils avancent font parti d'un tout solide et consistant, à la fois simple à comprendre et tellement profond. On ne voit vraiment que peu de narration comme celle-ci.
Mais cette partie marque également un retour au spectaculaire et au frisson épique qui caractérisaient la saison 1 ; bien loin des complots et intrigues politiques de la partie précédente, qui avait déplu à certains (bien qu’à mon avis, elle reste excellente). Le spectateur sait dès le début que la lutte s'annonce grandiose. La reprise de Shiganshina est le point culminant de l'histoire, l'objectif à atteindre depuis les tous premiers épisodes. Récupérer sa ville d'origine pour sauver l'humanité en affrontant les titans cuirassé et colossal, antagonistes emblématiques : toutes les caractéristiques du grand final sont réunies. Et niveau grandiose, le compte y est. De toutes les batailles pleines de rebondissements de L'Attaque des Titans, celle-ci décroche sans aucun doute la première place du podium. Toutes les émotions y passent : de l'angoisse (épisode 4) au frisson épique (épisode 5), jusqu'au déchirement tragique (épisode 6).
L'épisode 6 est peut-être celui qui m'a le plus marqué. 20 pures minutes d'angoisse, de questionnements et d'ambiance étouffante. Aucune musique et des comédiens de doublage toujours au poil. Même la mort de Bertholdt m'a donné pitié de lui, au moment où il se retrouve complètement démuni face à la mort, et où ses anciens camarades le regardent froidement se faire dévorer.
Cet arc mériterait déjà la mention d'excellence, mais bien entendu, il ne compte pas en rester là. Que serait L'Attaque des Titans sans ses révélations maîtrisées de bout en bout, qui offrent une relecture de l’œuvre toujours plus poussée ? Car s'il y a bien une révélation attendue, c'était celle de la cave. Toute cette attente et ce suspens en valaient-ils le coup ? Sans aucun doute : oui.
Tout d'abord, lorsqu'elle est dévoilée (d'une manière assez habile qui joue avec le spectateur, encore une fois), on ne saisit pas véritablement son ampleur. Son impact se dévoile au fur et à mesure des explications : tout était sous nos yeux, mais nous étions incapables de le comprendre. Il est impressionnant de comparer la vision que nous avions de cet univers au premier épisode de la série, et celle que nous en avons maintenant. Car le monde que nous connaissions n'était que mensonge ; et on se sent trompé avec les personnages. C'est un véritable coup de maître d'Hajime Isayama - l'auteur du manga - qui a réussi à modifier toutes les bases de son univers en jouant avec le spectateur, sans pour autant que l'ensemble ne paraisse incohérent ou tiré par les cheveux. On se rend compte de toutes les ficelles qui lient les événements les uns aux autres, et de leur solidité tant le tout est bien écrit et préparé depuis le début.
Cette fameuse révélation permet d'exposer le monde de L'Attaque des Titans d'un tout autre point de vue : nous étions enfermés avec les Eldiens dans les triple murs. Tout comme eux, nous ne connaissions rien du monde extérieur ; tout comme eux, notre vision et notre savoir étaient obstrués par ces murailles. Cependant, l'histoire de l'île du "Paradis" (révélée dans l'épisode 8) est comptée à Grisha Jäger d'une manière tellement banale que l'on comprend notre ignorance totale de ce monde, ce qui nous pousse à en connaître toujours plus de détails. Encore une fois, voici une révélation typique de cet anime : surprenante, riche en informations et en possibilité de relectures, mais qui intrigue encore plus.
Alors disons-le une bonne fois pour toutes : L'Attaque des Titans est un chef-d’œuvre, et très probablement une œuvre majeure de son domaine. Très rares sont les mangas ou animes à atteindre un tel niveau d'écriture, d'épique, de suspens... Tous les éléments sont là, et ils fonctionnent d'une manière tout simplement : magistrale.