999 et Virtue's Last Reward font incontestablement partis de mes jeux favoris. Bien qu'ils ne soient pas exempts de défauts, ils ont su me faire adhérer à un univers, me faire aimer des personnages, m’imprégner dans une histoire pleine de rebondissements.


Jamais deux sans trois : c'est ainsi que Zero Time Dilemma, censé apporter une conclusion à la licence Zero Escape, a vu le jour. Mais il semble qu'une fois le sommet atteint, il était inévitable pour cette trilogie de redescendre de son piédestal. Après la qualité des deux précédents opus, j'étais pourtant plein d'espoirs envers ce jeu ; espoirs qui ont été balayés dès mes premières heures de gameplay.



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Une chose saute immédiatement aux yeux pour n'importe qui jouerait à Zero Time Dilemma plus de cinq secondes : la terrible qualité visuelle du titre. Autant le dire, évoquer ce point revient à tirer sur l'ambulance puisque le jeu a failli ne pas voir le jour à cause de la mauvaise santé financière du studio ; et VLR n'était pas non plus un exemple de direction artistique réussie, je pensais donc passer outre ce défaut. Ici, les développeurs ont fait le choix d'abandonner le format de dialogue classique des visual novels pour passer sur un mode "cinématique" permanent, comme si le joueur regardait un film. Cela aurait pu être profitable au titre si seulement il avait bénéficié d'animations un minimum décentes. Car voir ces personnages bouger leur corps comme des robots et marcher sur leurs jambes de bois ruine tout effort de mise en scène. Sans parler du fait qu'on doive observer le plafond dès qu'il y a quelque chose de trop compliquer à animer, ou encore de la lenteur atroce des dialogues qui nous est imposé (faute à ce mode "cinématique")... Même si on finit bien par s'y habituer, il est difficile de s'immerger dans une histoire où les personnages bougent comme des playmobils, rendant certaines situations vraiment ridicules.



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Mais ça... je le savais déjà avant même de jouer au jeu. Non, le véritable problème de Zero Time Dilemma, ce ne sont pas ses animations, bien qu'elles soient un sacré handicap. Son problème, c'est qu'il n'arrive pas à la cheville de 999 ou VLR en termes d'écriture, de story-telling, ou de personnages. Sur mes 23 heures de jeu (fini à 100%), il s'est passé plus d'une quinzaine d'heures où l'histoire n'avançait pas, où les enjeux étaient vides, et où j'ai attendu vainement une étincelle qui démarrerait tout.


La faute à un système de "fragments", qui consiste à montrer le déroulement de l'histoire dans un ordre non-chronologique, et scindé selon trois groupes de personnes (teams C, Q et D). Un bon concept sur le papier, puisqu'à la fin de chaque fragment, les personnages se font injecter une drogue qui efface de leur mémoire les derniers événements.


Premièrement : ce système n'est au final pas du tout exploité, puisqu'il n'y a aucun intérêt à savoir où nous nous trouvons dans le temps - et au pire des cas, on peut le vérifier sur le flowchart.


Deuxièmement : comme le fragment choisi peut se trouver dans n'importer quelle timeline, il n'y a aucune conséquence directe à nos actions. Faire des choix n'a alors aucun sens (un comble pour un jeu qui n'arrête pas de mettre en avant des "Decision Game"). On se contente d'être là en tant que spectateur qui choisit toutes les issues possibles pour avoir le 100% - problème peut-être inhérent au genre même du visual novel, mais exacerbé ici.


Troisièmement : ce système empêche une progression linéaire du scénario, autrement dit, une progression polie à l'avance. Les scénaristes ont donc trouvé la superbe solution de ne pas faire avancer l'histoire tout court : hormis durant le dernier quart du jeu, chaque fragment n'est qu'une succession d'escape rooms et de "dilemnes" tous plus inutiles les uns que les autres. On essaye bien de nous faire gober quelques développements de personnages par-ci et par-là ; mais ils sont tellement grossiers qu'on finit par trouver satisfaction dans les scènes d’exécution, qui n'ont rien trouvé de mieux que de tirer du côté du gore pour attirer l'attention.



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Tiens, les personnages, parlons-en. A l'image de leur développement, la plupart sont terriblement peu charismatiques, voire insupportables. Mis à part Carlos, qui évoque un soupçon de sympathie, les nouveaux sont d'un intérêt négatif, et ce n'est pas leur plate backstory qui les sauve. Quant aux quatre qui font leur coming-back, ce n'est pas mieux : à l'exception de Phi (malheureusement la plus en retrait), aucun n'est en accord avec les personnages qu'ils devraient être. Que ce soit Sigma, scientifique de génie rongé par ses années de solitude, qui continue à sortir des blagues cochonnes ou qui perd son sang-froid en deux secondes ; Akane, à l'origine du premier Nonary Game et qui agit toujours comme une fille naïve et innocente ; et le pire de tous, Junpei, à la personnalité et backstory complètement ridicules.


Alors que les interactions entre eux auraient pu développer des pans intéressants de leur personne, la composition statique des équipes empêche toute mixité et installe donc une répétitivité exaspérante (alors que 999 et VLR avaient eu la bonne idée de mélanger les personnages, ce qui était d'autant plus important dans VLR puisque cela influençait le déroulement de l'AB Game).



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Il n'y a plus grand chose pour sauver Zero Time Dilemma. Même les escape rooms ont subi une baisse de qualité. Souvent trop simples, elles se résument à trouver un objet dans la salle, l'amener d'un point A à un point B, puis à résoudre parfois un puzzle. Elles semblent aussi avoir été introduites de force uniquement parce que c'est la marque de la série, et sont quasiment toutes sur les mêmes thèmes que celles de VLR. On est néanmoins loin de la satisfaction que procuraient les énigmes de ce dernier (et pourquoi avoir supprimé le coffret à double code, qui offrait un vrai challenge supplémentaire pour ceux qui voulaient le 100% ?).


Il y a tout de même quelques (rares) moments où ZTD se montre agréable. Notamment lors du rush final, qui ne fait pas beaucoup de sens, mais qui est assez stimulant (et puis on n'est plu s à ça près). Les quelques références aux anciens jeux font aussi mouche et sont toujours appréciables. La musique est toujours efficace ; si seulement la quasi totalité des pistes n'avait pas été reprise des anciens jeux...



Conclusion



Zero Time Dilemma est un mauvais Zero Escape, et peut-être même un mauvais jeu. Bien qu'il apporte des réponses (au mieux passables) aux questions laissées en suspens par Virtue's Last Reward, son enrobage est insuffisant. Personnages ratés de bout en bout, scénario qui ne montre le bout de son nez qu'à la fin et fausse adrénaline créée par un jeu sans intérêt ; à l'opposé de ses prédécesseurs. Dommage pour une trilogie qui aurait mérité une bien meilleure conclusion, mais qui restera toujours une référence dans le monde du visual novel japonais.

oRealSan
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le 27 avr. 2020

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