De l'estime de soi

Je pense ne pas me tromper en affirmant que La Meilleure version de moi-même est la première série originale Canal+ (hors formats courts c'est-à-dire Bref, Les Kassos et Bloqués) que je regarde. Si vous avez déjà eu la malchance de tomber sur une de mes critiques concernant une série, vous verrez qu'en général j'explique que je n'aime pas les séries parce que ça repose sur des ficelles que je déteste de façon à gaver le plus possible le spectateur de contenu, au détriment de la mise en scène et de la qualité de ce qu'on lui met sous les yeux.

Sauf que là... C'est une mini-série de Blanche Gardin, une humoriste dont j'aimais beaucoup les deux premiers spectacles que j'ai pu voir à la télé (mais vraiment, le spectacle Blanche parle toute seule m'a fait pleurer de rire). Le dernier en date (Bonne nuit Blanche si je ne me trompe pas) était pour moi un semi-ratage, c'était pas très drôle et très long à se mettre en place.

La meilleure version de moi-même, c'est un docu-fiction sur Blanche Gardin qui part d'une histoire de colon, parce que quitte à parler de Blanche Gardin, autant évoquer ses intestins (d'ailleurs à partir du 4e épisode on oublie complètement cette pseudo-intrigue)...

La série veut taper sur plein de choses : le complotisme, les bouquins de développement personnel, le fait de faire attention à ce qu'on mange au point de ne plus s'alimenter, les médecines alternatives, une sororité d'apparat ou encore une dérive du féminisme qui ne chercherait qu'à racketter des jeunes femmes perdues (que personnellement je n'ai vu en action nulle part mais admettons). Le point commun de toutes ces choses ? Mener à une auto-destruction au nom de son propre bien-être, montrer que vouloir être une meilleure personne est fondamentalement égoïste et destructeur avec tous les vautours qui rodent pour nous aider dans cette démarche. Encore mieux, montrer que même de nobles causes peuvent se faire bouffer par le capitalisme.

Honnêtement, pourquoi pas, nous montrer une Blanche Gardin détestable qui en vient même à reprocher aux SDF de trop transpirer la négativité ou totalement esclave de ce que les autres lui dictent comme étant le bien, c'était un pari risqué qui aurait pu fonctionner. Mais il y a un gros problème de rythme et de ton dans ce documenteur qui n'a pas déclenché le rire chez moi. Les plans sont trop longs, la musique est souvent exaspérante, et au lieu de ressentir un profond malaise qui va finir par nous faire rire nerveusement, il n'y a que le malaise qui reste. C'est là qu'on voit la différence avec un C'est arrivé près de chez vous ou encore The Office, qui ont le bon dosage entre réalisme et malaise et surtout un tempo comique qui permet au spectateur de se marrer des situations incroyablement gênantes ou malsaines auxquelles on le confronte. Le problème aussi, c'est que les attaques sont mal dirigées, les concepts qui sont ciblés ont été mal digérés (sans mauvais jeu de mots), ce qui donne un résultat maladroit. La série a un épilogue de 20 minutes qui ne fait que ressasser ce que tous les autres épisodes nous ont déjà montré, on ne fait que prolonger laborieusement le cauchemar au lieu de déglinguer avec panache ce qui avait été construit jusque là.

C'est dommage parce qu'il y avait du potentiel, c'est dommage parce que Gardin est une humoriste talentueuse et que cette série aurait pu être bien mieux écrite et réalisée, et c'est dommage parce que j'aurais adoré que ça fonctionne à l'écran.