Pépite, pépite, nous dit SC. peut-être pas. Il faudrait plutôt attendre un certain nombre d'avis avant les grandes envolées optimistes.
Focus sur les années 75, la série met en avant le caractère égocentrique, manipulateur et dangereux de Charles Sobrahj. Richard Warlow s'appuie sur de nombreux ouvrages et documentaires et en profite pour lui faire bien plaisir dans son appétence à être sous les feux des projecteurs.
Si cette histoire nous remet en mémoire cette escalade meurtrière, la direction romantique et pour un personnage si peu empathique peut laisser perplexe. Un séducteur et psychopathe à haute valeur charismatique particulièrement bien rendu par Tahar Rahim certes, et une époque malgré tout bien brossée, valent le visionnage mais n'empêchent pas les codes de fiction d'être trop présents. Le personnage de Nadine (Mathilde Warnier), qui si elle donne un peu de place aux personnages féminins, n'en sera pas pour autant crédible, et Siemons (Tim McInnerny), diplomate belge, ancien résistant et tête brûlée, qui excellera dans les propositions de solutions radicales, font trop référence aux personnages propres au genre.
On se rattrape avec l'enquête en cours et les freins à son élaboration. On suivra particulièrement Knippenberg (l'émotif Billy Howle), un diplomate néerlandais qui se découvrira l'âme d'un détective, pugnace et rebelle face à l'inactivité de son ambassade, ralliant au fil du temps un certain nombre de soutiens. Les contraintes liées aux outils de l'époque démontrent toute l'ampleur de son travail et tout le temps qu'il aura fallu à mettre enfin la main sur le tueur en série.
Appréhendé en 1976, libéré en 1997, Sobrahj décide de faire un pied de nez aux autorités en revenant en 2003 au Népal, persuadé d'absence de preuves...il est aujourd'hui toujours incarcéré.
La mise en scène classique use de quelques rebondissements comme il se doit, d'acteurs choisis et souvent en cohérence avec le physique des vrais personnages, de flahsbacks et de jeux de temporalité croisée, parfois trop nombreux et mal intégrés, où une musique redondante en devient lassante.
Un sérieux coup de ralenti intervient dès l'épisode 5, avec une volonté de faire traîner la série sur ses huit épisodes, passant d'une situation à une autre qui comble les vides sans pour autant creuser notre personnage principal. Et si Marie-Andrée Leclerc (Jenna Louise Coleman) marque par une absence totale de remise en question en miroir de Sobrahj, et quelques passages marquants, elle agace par un revirement final, mais reste un parfait exemple encore de violence faite aux femmes tout en restant dubitatif sur son deux de tension tout du long.
Pour Sobrahj ce sera un décor souvent identique d'un hôtel thaïlandais pour touristes de tout horizon, avec sa piscine et ses moments de détente, nombreux, roi en sa demeure, lunettes fumées et chemise blanche, ponctué de quelques escapades de tueries ou de fuites pour agrémenter le tout, en passant par des prisons au sol resplendissant de propreté. La tentative d'explication par un retour sur les causes potentielles du cheminement de Sobrahj, une enfance malheureuse, une origine métis qui le poussera à se démarquer, une mère absente mais excédée et des femmes sentimentales soumises à la nocivité de l'homme, l'ensemble est à prendre avec modération pour ce qui est de l'attrait de l'homme.
De l'Inde en passant par l'Afghanistan, Le Népal et la Thaïlande, escroc négociant en pierres précieuses, Charles Sobrahj devient un tueur en série avec une facilité déconcertante. Usant de drogues, volant et assassinant facilement ses victimes. Argent, traveller chèque, et passeports pour changer d'identité, il passera durant de nombreuses années entre les mailles de la justice, pour le moins laxiste ou corrompue suivant les cas. Expert en évasion, Sobrahj trouvera toujours des appuis. On peut croire à cette grande facilité de persuasion, l'époque et les lieux servent parfaitement l'appât du gain et la liberté d'action. Ajay Chowdhury, (parfait Amesh Edireweera) son homme de main en est encore le parfait exemple. Les libertés nouvellement acquises, poussent ces voyageurs adeptes de la Hippie Trail, beaux minces et bronzés, vers tous les possibles et rappellent à cette insouciance de la jeunesse venus s'exiler dans les vapeurs de joints, en quête existentielle et sans trop de profondeur, mais leur portrait est suffisamment mis en avant, pour saisir toute l'horreur de leur destinée.
Enfin, pour ceux qui rêvaient de partir à Katmandou se la couler douce, on y verra le retour de manivelle pour certains et le manque de chance pour d'autres. Quittant la vie insipide et bien réglée de nos contrées, pour se rapprocher des vraies valeurs humaines, un regard sur les vaches indiennes, reines des rues, mais plutôt maigrichonnes, les hôtels miteux, la pauvreté ambiante et les rêves déçus de ceux qui ne peuvent plus rentrer chez eux, remettra les pendules à l'heure. C'est déjà ça.