Un goût de trop peu

L'adaptation live action en mini série du manga Kami no Shizuku était un pari risqué à plus d'un titre : transcrire un univers complexe et docte - celui du vin - appréhendé initialement à travers les yeux d'un auteur nippon, en y mêlant une réflexion profonde sur des thèmes lourds à traiter (la notion de famille au sein d'une société japonaise hyper normée et conservatrice, ou plus simplement celle du choix à faire).

Si le format de la mini série (8 épisodes) donne plus de temps qu'une adaptation en film, il doit également prendre en compte tout le développement de l'univers, des personnages et des intrigues de l'œuvre originale ; et c'est peut être là qu'on constate le premier problème. On aura beau le tourner comme on veut, le rythme d'un manga n'est pas celui d'un film ou d'une série ; l'intrigue ne se pense pas de la même façon, la violence de certaines révélations ne peut se faire en une case, l'interprétation doit prendre en compte une forme de réalisme de culture que le manga peut lisser sans tomber dans le cliché. A ce titre, Les Gouttes de Dieu manquent d'homogénéité : parfois très crédible et avec quelques interprétations plutôt justes, il peut en devenir très naïf, voire un peu ridicule. A commencer par son histoire même : Camille, fille de l'œnologue le plus célèbre au monde se retrouve à concourir pour son héritage (estimé à plus de 150 millions d'euros) sur un domaine qu'elle apprend à maitriser en 1 mois : si son palais et ses goûts ont été travaillés depuis l'enfance, la mémorisation de l'infinité des châteaux est forcée (ce qui est renforcé par le genre même de la série à l'inverse du manga qui peut se permettre et est coutumier de ce genre de libertés).

Si l'intrigue est bien amenée et agréable à suivre, le second problème réside peut être dans le manque de développement des personnages : ils sont cantonnés à un voire deux pour les plus chanceux, traits de personnalités : conséquence directe, ils en deviennent rapidement agaçants, parfois même un peu plats, et surtout, ils manquent de vie. C'est d'autant plus vrai et criant lorsqu'ils sortent (rarement) de ce cadre (car la réalisation les y oblige) et où ils renvoient en miroir le manque de profondeur cinématographique de leur rôle.

Tout n'est pas à jeter cependant et en vrac on retient : des décors superbes, des jeux d'acteurs inégaux mais plutôt cohérents, un rythme assez agréable, a fortiori grâce aux allers retours passé présents sur la vie d'Alexandre Leger (l'œnologue) et ses relations au Japon, quelques messages et réflexions bien senties, une belle ode à un savoir et une expertise mal connue, même en France.

En somme, c'est agréable à voir, c'est plutôt rythmé et on ne le regrette pas vraiment ; mais on déplorera tout de même le manque de profondeur, voire de réalisme qu'on attribuerait normalement au support série et on en viendrait presque à souhaiter une adaptation anime (où plus simplement on encourage à lire le manga directement).