En choisissant Henri VIII comme figure de proue, les créateurs des Tudors ont choisit la figure que l’histoire de l’Angleterre a retenue comme la plus odieuse. La religion personnalisée et les mariages multiples du personnage sont naturellement au cœur de la série, de même que les conflits, manœuvres et rapports de force politiques. Néanmoins, la complexité et le réel qui pue s’effacent discrètement au profit de l’entertainment.
Naturellement c’est une vision romancée de l’Histoire, mais pas si tragico-romantique qu’on aurait pu le croire ; loin des ardeurs et du suave de Rome, Les Tudors est pragmatique. Quand elle s’intéresse à la petite Histoire, Les Tudors raffole de l’anecdote matrimoniale, mais ne s’égare pas en romances. Quand à la grande Histoire, elle est traitée en permanence, puisque tout le travail de la série est de joindre des évènements très lointains dans le temps par le plus de passerelles possibles ; autrement dit, c’est d’établir un puzzle artificiel. Cela permet de cumuler les anecdotes, éventuellement avec une emphase excessive, sans relâcher la tension.
Soap-opera de prestige et de toute beauté, Les Tudors inscrit son style dans l’esthétisation aseptisée, de la violence comme du sexe ; l’abondance n’a d’égal que la frivolité, surtout dans la noirceur. Les plastiques somptueuses remplacent les gueules (à quelques exceptions près), les joutes sentencieuses et le drame boursouflé font office d’arguments épiques, souvent avec succès malgré le caractère déceptif de cette approche. La série a du charme, une ampleur décente, mais manque un peu de grâce ; et de souffle, tant elle assène l’Histoire et les histoires sans faire la part, sans hiérarchiser.
Pas aussi « monstrueuse » que son sujet le suggère, Les Tudors est une synthèse inégale, glamour et résolue, parfois captivante et voluptueuse, parfois redondante. Carré, vif, peu addictif sur le long-terme mais facilement absorbant. Avec un côté Twilight pour jeunes adultes mûrs.