Tenues de soie dans la neige

Snow Tower raconte l'affrontement entre deux écoles d'épéistes, la Tour de Neige et la Secte Lunaire. Bien sur, l'une prône des valeurs de justice, de droiture et de générosité tandis que l'autre ne recule devant aucune mauvaise action pour s'imposer dans le monde des combattants: simple, clair et sans ambiguïté on sait qui sont les méchants et les gentils dès le départ.
Ce qui l'est moins(simple), c'est le nombre de personnages qui intervient soudain, joue sa partie puis reflue à l'arrière-plan avant de ressurgir. Au début j'ai eu du mal à situer tout ce monde, les événements de l'introduction sont rapides et denses, on plonge directement dans l'action, de la tour de neige à la vallée des sables, en pleine guerre, puis les années passent et à nouveau c'est l'affrontement.
Cette fois, le récit prend son temps, on s'attarde sur les personnages et leurs motivations, sur les conséquences de chaque action et décision, la série prend son rythme, on en suit avec plaisir toutes les péripéties. 56 épisodes, ça peut paraître long, pourtant loin de s'étirer, les histoires se succèdent et se bousculent. Différents personnages viennent conter la leur, ce que j'ai beaucoup aimé: les personnages secondaires prennent souvent la vedette aux héros qui se tiennent alors en retrait. J'aurais aimé qu'ils aient tous une fin heureuse mais la série n'est guère optimiste. Impitoyable est le monde des combattants!
Quand aux rôles principaux, c'est vrai que le Maitre de la tour de Neige n'est pas le plus intéressant, un monolithe au masque inexpressif(même s'il le fait exploser à de rares moments), il ne change pas, n'évolue pas, il porte son fardeau avec une gravité obsessionnelle. J'ai trouvé beaucoup de charme et de grâce à Shu Jing Ron. Et on a une très intéressante maitresse de la secte lunaire, à la fois fragile et démente, amoureuse et fanatique qui s'enfonce peu à peu dans la peur et la folie. Bien d'autres ont su me toucher et retenir mon attention...
Mais... (il y a un mais), le budget est tellement réduit qu'ils n'ont même pas pu donner des manteaux fourrés et des bottines chaudes à ces pauvres épéistes crapahutant dans la neige! S'il faut gravir une montagne glacée pour trouver une plante médicinale, ce sera en robe légère de soie. Évidemment c'est très joli la soie rouge sur fond de neige blanche mais on n'y croit pas. Manque évident de moyens: les costumes tournent tout du long de la série et quel que soit le temps. Pareil pour les scènes sous l'eau, les personnages y plongent tout habillés et parés de leurs bijoux et s'y promènent comme dans un jardin sans que leurs cheveux ni leurs vêtements ne flottent. C'est très mal fait, heureusement que la série n'est pas orientée vers le fantastique et ne nécessite pas trop d'effets spéciaux, ils n'auraient pas pu faire.
Alors, bon, la vraisemblance, on s'en fout! On va faire sans, juste avec une bonne histoire, des combats bien menés, d'ailleurs, c'est ce qui se passe, on est tellement accaparé par le récit, centré sur les personnages en gros plans, les visages, les regards, les mains et les gestes, les duels virevoltants et les têtes à têtes émouvants qu'on en oublie de regarder le décor.
Et ça marche... ça m'a gêné c'est vrai, mais pas au point de décrocher du récit. On s'en moque du réalisme: les guerriers qui prennent le temps de mourir sur le champ de bataille tandis que tous les bruits se taisent, les grands discours avant l'affrontement, les dernières paroles des mourants en plein chaos. On se laisse mener là où on veut nous mener et c'est loin d'être désagréable parce qu'on a un scénario dense et des personnages archétypiques bien construits.