Luther
7.5
Luther

Série BBC One (2010)

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Du plot-driven qui essaie vainement de se faire passer pour du character-driven

Après Sherlock, je cherchais une autre série britannique à me mettre sous la dent. Ça faisait longtemps que Luther me faisait de l’œil, et sa courte durée m'a convaincu de tenter le truc.


Dès le premier épisode j'ai déchanté. Toute l'intrigue avec son ex-femme c'est du vu et revu et j'ai eu très peur en voyant que le personnage d'Alice Morgan, ni crédible, ni cohérent, ni attachant, semblait destiné à devenir une méchante récurrente. Après ce constat, la saison 1 était moins pire que ce à quoi je m'attendais, le personnage d'Alice prenant un rôle plus intéressant que celui de simple "méchante".


Les acteurs sont plutôt bons. Idris Elba avait déjà fait ses preuves dans l'excellente The Wire, et j'étais donc ravi de le retrouver ici. Petit aparté : en regardant The Wire, j'aurais jamais deviné qu'il était britannique le loustic, bravo ! Dans l'ensemble, les rôles secondaires sont beaucoup mieux interprétés qu'écrits, et c'est regrettable parce qu'on prend conscience que ça aurait vraiment pu être le gros truc cette série.


Le principal problème (et pas des moindres dans une série), c'est l'écriture. Les scénaristes avancent clairement au hasard, sans jamais vraiment savoir ce qu'ils vont devoir ou pouvoir faire de tel ou tel personnage, quitte à les faire disparaitre sans autre forme de procès ou simplement les réécrire et au diable la cohérence ! On peut citer plein d'exemples : l'intrigue de la fin de la saison 1, vraiment sortie du cul d'une poule, la nana qui fait du "necroporn" ou je sais pas quoi dans la saison 2, qui ne sert strictement à RIEN, les personnages de Justin ou Erin complètement redéfinis pour les besoins du scénario de la saison 3...
En gros si les auteurs ont envie d'emmener la série quelque part, ils ne vont pas hésiter à complètement changer tel ou tel personnage pour les besoins du scénario ; les seuls qui restent à peu près fidèles à eux-mêmes au bout du compte étant Luther et Alice. C'est aussi dû au fait que ces deux personnages n'évoluent pas vraiment au cours de la série, contrairement à leur relation qui en reste un des aspects les plus intéressants.


L'autre problème c'est les méchants. Dans chaque épisode (ou tous les deux épisodes pour les saisons 2 et 3), on nous présente le méchant que Luther va devoir coincer. Sur l'ensemble de la série, il n'y en a aucun qui soit particulièrement menaçant, mémorable ou bien écrit. La plupart sont juste pathétiques ou paumés, et quelle que soit la gravité de leurs crimes, on a plus souvent envie de leur filer un coup de règle sur les doigts que de voir Luther les arrêter ou les descendre. C'est peut-être volontaire, mais volontaire ne veut pas dire réussi. Le plus intéressant aurait pu être le dernier, celui qui se voulait justicier, mais lui aussi ils l'ont tué dans l’œuf pour en faire un simple cinglé.


Le découpage des épisodes ne fonctionne pas, surtout dans les saisons 2 et 3 où les méchants reviennent sur plusieurs épisodes. Ceux-ci ne sont pas assez intéressants pour mériter 2 heures de programme, et on a donc énormément de scènes de remplissage montrant le quotidien des méchants, sans que cela n'apporte rien à l'intrigue ou à la caractérisation très sommaire de ces méchants. Le mélange des "monster-of-the-week" avec le "mytharc" (comprendre : les tentatives de raconter une histoire sur plusieurs épisodes, qui va concerner Luther et ses collègues mais en faisant rarement autre chose que de tourner en rond) ne fonctionne pas non plus. Impossible pour chaque épisode de trouver son identité mais impossible également de voir la série comme un feuilleton moderne (ce que les américains maitrisent très bien maintenant), à cause de l’absence quasi-totale de character-development.
En fait c'est presque dommage que ça ne fonctionne pas, car on sent quand même qu'il y a une volonté de bien faire. Les auteurs essaient de faire un truc chiadé, à la hauteur des meilleures séries actuelles, avec une ambiance plutôt réussie et quelques très bons moments, mais ils ont beau se démener, la mayonnaise ne prend pas.


Au niveau de la mise en image, il n'y a rien de bien folichon à se mettre sous la dent. La seule idée un peu originale c'est les cadrages bizarroïdes où la tête d'un personnage n'occupe qu'un petit coin de l'écran. À part ça c'est du très classique, mais pas très beau. Les meurtres par exemple sont tous filmés sans aucune subtilité, sans aucun suspense, sans aucune nervosité. Encore une fois c'est dommage car parfois il manquait pas grand chose.


Finalement Luther c'est un peu le syndrome Dexter. Sur le papier : un pitch prometteur, un acteur principal ayant déjà fait ses preuves sur le petit écran, un héros torturé, une ambiance sombre et glauque, des personnages ni tout blancs ni tout noirs... Et à l'écran : un personnage principal super cool et bien interprété, mais des personnages secondaires mal définis dont on n'a strictement rien à foutre, des scénaristes qui avancent clairement à l'aveuglette et des méchants tantôt pathétiques, tantôt ridicules.
Et comme Dexter (quoique je suis pas allé au bout de Dexter), l'impression principale qui reste après le visionnage, c'est qu'on s'est quand même un peu foutu de ma gueule.

YellowStone

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