Saison 1 :
Lorsqu'une nouvelle série recueille tous les suffrages critiques, comment ne pas laisser notre niveau d'attente grimper au plafond… au risque de la déception ? Le pilote de "Mad Men" est simplement parfait, miracle de précision dans la description d'une époque où misogynie et racisme étaient la norme (avant le basculement politique et moral des années "révolutionnaires"), mais une époque qui est aussi la "matrice" de la nôtre : car ce que "Mad Men" nous permet de voir - pour la première fois ? - c'est la naissance du capitalisme moderne au sein d'une société aussi innocente que déjà profondément cruelle et injuste. Le choix des scénaristes de se refuser largement à tout "effet série" (coups de théâtre et suspense) pour privilégier l'observation fine de personnages qui nous paraissent presque monstrueux dans leurs codes sociaux aujourd'hui oubliés (la cigarette !) fait néanmoins que la série piétine un peu avant de trouver son rythme propre, sa profondeur. On attend avec impatience la suite… [Critique écrite en 2009]
Saison 2 :
Le plaisir intense dans lequel on baigne (forcément ? Oui, ça me semble imparable…) en regardant chacun des 13 superbes épisodes de la seconde saison de "Mad Men" vient peut-être de ce sentiment irrésistible de voir le meilleur de l'art cinématographique (écriture, mise en scène, image) mis au service de l'espace-temps du feuilleton télévisé, qui permet d'explorer de manière tellement plus riche une époque (les années Kennedy, ici merveilleusement évoquées en "fond sonore" - la radio, la télé naissante : lutte pour les droits civiques des noirs, JFK et Marylin, la Baie des Cochons et la peur atroce de l'apocalypse nucléaire…) comme des personnages. Et bien sûr, la force extrême de "Mad Men", c'est de refuser tout stéréotypage (ici, on est trivialement humain, pas forcément sympathique, du coup), sans pour autant faire l'impasse sur la profonde inhumanité de la société qui se met en place : on peut donc trouver à la fois "Mad Men" désespérant et réjouissant. C'est ça, l'intelligence ! [Critique écrite en 2010]
Saison 3 :
Je me demande quelque part si l'engouement critique pour "Mad Men" n'est pas exagéré, et avant tout dû au decorum très cinématographique déployé par la série : inscription historique précise - voir l'épisode de l'asssassinat de JFK -, soin apporté aux détails esthétiques, glamour classieux de la reconstitution, etc. Car au final, une bonne partie des épisodes de cette troisième saison se contentent de répéter sans grande imagination des schémas désormais éprouvés autour de personnages de plus en plus caricaturaux, voire antipathiques (qui peut vraiment supporter l'imbuvable Don Draper ? Je me demande...) : bref, la saison 3 ronronne, nous ennuie vaguement - mais toujours avec beaucoup d'élégance - à force de ne pas vouloir "trop en faire", et ne se réveille que lors de 3 ou 4 occasions - voir par exemple le dernier, superbe, épisode -, ce qui est bien trop peu pour une série aussi "prestigieuse"... Vous l'aurez compris, je ne suis plus aussi fan de "Mad Men" après cette troisième saison ! [Critique écrite en 2011]