Je suppose que tout le monde se souvient du générique "I’ll be there for you" dans Friends, mais souvenez-vous aussi de Malcolm in the Middle et de son intro accrocheuse, faite de clips de la série, entrecoupées avec d’autres extraits de mangas et films cultes ? C'est comme si la série prévoyait qu'elle allait elle-même devenir culte, après avoir assuré la succession de Mariés, deux enfants et des Simpson.
Malcolm in the Middle, une création de Linwood Boomer, est l’une des premières sitcoms à se débarrasser des clichés habituels qui collent au genre, en présentant une famille totalement irrécupérable et dysfonctionnelle. Et dans même le processus, elle se débarrasse aussi (et pour la première fois ?) de cette piste de rire hautement irritante/exaspérante. En ce qui concerne les rires justement, c’est l’une des séries familiales les plus drôles et les plus divertissantes après Les Simpson. Et coïncidence, c'est également la série live la plus proche des Simpson, tout en arrivant à trouver sa propre voie.
S'il y a bien une série qui est totalement dénuée de clichés, c'est Malcolm in the Middle, à commencer par son personnage principal, Malcolm joué par Frankie Muniz et ses yeux bleus. Malcolm, c'est le p'tit génie de la famille et le cadet de quatre frères à l'énergie débordante. Les garçons de son niveau intellectuel sont appelés les "têtes d'ampoule", mais Malcolm est aussi espiègle que ses trois frères et c’est un génie qui déteste son intelligence, ou du moins ses répercussions sociales sur le terrain de la popularité scolaire.
Malcolm c'est à la fois Lisa Simpson et Bart. Mais peu importe s'il essaie de faire semblant de n’avoir rien à voir avec ses camarades têtes d'ampoule composés d'inadaptés (son meilleur ami est en fauteuil roulant), il est inévitablement marqué comme tel et n’a pas d’autre choix que de garder le profil bas. La série utilise un dispositif de rupture de quatrième mur qui permet à Malcolm de partager ses peurs, ses préoccupations et ses commentaires sur les agissements toujours plus étranges de sa famille. Le personnage frappe pour sa nature égocentrique, mais au fur et à mesure que la série progresse, il devient de plus en plus fleur bleue et victime des pitreries de ses frères ou de son père.
Pendant ce temps, la bénédiction (ou la malédiction, selon comment vous voyez les choses) de Malcolm est la source de ses interactions avec le monde normal et je ne suis pas sûr de vouloir y inclure sa mère. Parce qu’il pourrait être le personnage titulaire et central selon le titre, il a un granconcurrent en Lois, joué par Jane Kaczmarek. C’est une maman de télévision comme vous n'en avez jamais vu auparavant, une boule d'énergie qui balaie tout sur son passage. peut-être que le fait que chacun de ses quatre garçons, et un cinquième au cours de la série, se comporte aussi mal que son prédécesseur et/ou son disciple, ont certainement à voir avec cela. Elle est dans une position qui ne peut se permettre aucun signe de faiblesse.
Il y a une scène où Reese, probablement le pire de tous, dit qu’il souhaiterait qu’elle soit morte, ce qui est quelque chose que vous n’entendriez jamais dans une autre sitcom. Une Lois choquée quitte la pièce, ce qui étonne Reese qui a l’habitude d'être punis sur le champs ... et ça, c’est très typique de la série. Juste au moment où vous pensez qu’elle va appuyer sur les mêmes notes émotives que n'importe quelle autre sitcom, elle délivre une punchline qui vous rappelle que vous êtes bien devant Malcolm in the Middle. Dans un autre épisode, Lois avoue à son mari Hal, qu’elle ne ressentait aucun amour pour son nouveau-né Jamie, ce à quoi Hal répond stoïquement qu’elle n’a jamais aimé aucun de ses fils quand ils étaient bébés, et c’est ce qui l'aide à passer ce petit moment difficile.
Et avant d’être choqué, rappelez-vous qu’ils sont tous des garçons, pas de filles pour des questions d’amour ou d’égalité des sexes. L’aîné Francis (Christopher Masterson) est un adolescent irresponsable et immature qui ne cesse de lui reprocher tous les échecs et semble incapable de devenir un adulte responsable. Reese (Justin Berfield) c'est un mixte entre Bart Simpson et Milhouse. Dewey (Erik Per Sullivan) est l’éternel délivreur de punchlines ("je ne m'attendais à rien, mais je suis quand même déçu") et peut-être le plus immunisé contre les mauvais traitements sadiques de ses frères et s’il ne semble pas être malveillant, son comportement suffit parfois à rendre fou n’importe qui. Et puis il y a aussi Craig, le collègue amoureux de Lois, et Hal, le père maladroit mais adorable qui a choisi l’option de ne jamais interférer avec les méthodes de sa femme.
C'est Bryan Cranston qui incarne Hal, à une époque où Walter White n’était même pas (ou pas encore) un concept sur un morceau de papier. Hal c'est le bon flic, tandis que Lois c'est le mauvais flic. Et quand vous voyez que Lois est entourée de tels spécimens, vous devez lui donner le crédit de ne pas avoir laissé la maison s’effondrer. Elle a peut-être pris cela de sa mère polonaise, grand-mère Ida, qui n’a rien à voir avec la grand-mère habituelle que vous voyez à la télévision et dont le portrait joué par Cloris Leachman est absolument irrésistible. C’est l’un des grands délices de la série, de fournir des personnages secondaires mémorables, comme par exemple l'entraîneur militaire sadique ou le propriétaire de ranch adorable joué par le regretté Kenneth Mars.
Chaque personnage et chaque situation est une source inépuisable de gags ... et pourtant, la série s’est terminée au bout de 7 ans, alors qu’elle marchait bien. Mais du coup elle nous épargne la saison de trop. Et puis, sans Hal, il n’y aurait probablement pas eu de Walter White ... une autre bonne raison (parmi tant d'autres) d’aimer la série.