Aboule la boxe !

(Je n'avais pas d'idée de titre !)
Cet animé me laisse une impression particulière. Je me suis avalé les épisodes les uns après les autres, j'ai aimé le regarder. J'ai beaucoup apprécié son esthétique rétro, le charadesign du personnage principal et les allures caricaturales mais diversifiées de la bande de gosses en particulier. J'aime bien que les animés renouent avec le côté dessins, crayons, c'est cent mille fois plus beau que la colorisation nette des animés d'aujourd'hui, même si les Demon Slayer sont vertigineux dans ce qu'ils étalent comme subtilités. Rien ne remplace l'émotion du dessin. Evidemment, cet animé n'est pas exceptionnel pour autant dans ses dessins et son animation, il est rétro, c'est différent, et il a même de gros défauts d'animations, ou de gros défauts dans certains dessins (les mains de certains personnages ou le mouvement des corps vus de loin et de haut notamment).
Pour l'histoire, elle est trépidante et prenante, mais avec un gros défaut : la conception des combats eux-mêmes. Le héros tombe quatre fois par terre, se relève à chaque fois, et gagne rapidement à la fin. C'est un classique des animés de combat où on veut montrer le dépassement du héros qui part de loin, mais il faudra un jour en finir avec ce cliché qui n'est pas agréable du tout pour moi. Surtout que quand je regarde du sport, je sais un peu comment je vibre et je sais à quel point les combats dans les animés ne sont pas le reflet des mécanismes qui nous font vibrer en regardant une compétition réelle. Il y a des jeux sur l'investissement du spectateur pour les sportifs qu'il soutient que les créateurs d'animés ignorent. Toutefois, l'animé demeure assez peu sur les combats, et on privilégie beaucoup plus l'intrigue et les relations compliquées entre les personnages. Donc tout va plutôt bien.
Cependant, j'ai encore une énorme critique à faire au scénario. C'est la création du principe d'exosquelette qui ne va pas dans cette série. J'ai lu des commentaires qui trouvent que finalement ça avait du sens. Ce n'est pas mon avis. J'ai vu au contraire des avis assassins qui disaient que les personnages n'avaient pas de profondeur, que l'histoire était cliché et pas développée, mais ce n'est pas du tout mon impression. Le côté cliché et convenu du récit, oui, mais c'est des attendus des récits autour de la boxe, et plutôt qu'à Rocky je penserais aussi à de plus vieux films sur la boxe Ce soir, nous avons gagné et d'autres des années cinquante ou soixante dont je n'ai plus les noms. C'est logique, le manga qui a servi de modèle à Megalobox porte le titre Ashita no Joe et il a été publié à partir de 1968, tandisd qu'il s'ancre dans l'après Seconde Guerre Mondiale. On sent que cet animé récent reprend les codes des années cinquante et soixante. Mais tout en étant fidèle à des codes convenus, l'histoire est bien conduite et les personnages fouillés. J'ai ressenti de l'émotion, et il y a des scènes marquantes, notamment celle où le coach connaît sa rédemption (je formule ici pour ne pas spoiler). Mais j'en viens au défaut que j'ai annoncé : les exosquelettes, car là je rejoins ceux qui critiquent le scénario. En effet, dans Ashita no Joe, c'est une histoire de boxe. Ici, introduire l'exosquelette fausse toute l'imprégnation scénaristique.
On a trois grosses incohérences scénaristiques majeures.
Une des trois grandes incohérences scénaristiques touche un passage seulement du récit. Pour se qualifier pour la Megalobox, le héros qui est un paria de la société affronte une personne qui a un exosquelette avec une intelligence artificielle qui boxe à sa place, et pire encore, pendant le combat, il y a un staff technique comme derrière une Formule 1 avec service informatique de toute une équipe. Et pendant le combat, celui qui profite de cette technologie traite le héros Joe de boxeur raté et tricheur, puisqu'il vient des bas-fonds et des milieux des matchs truqués. C'est tellement gros comme anomalie que je ne comprends pas qu'on la laisse passer. Mouais, j'imagine que les gens pas exigeants comme ça ils ressentent l'injustice de la situation et sont encore plus du parti du héros, et ils sont contents quand l'autre perd. Enfin, bon, moi j'ai quand même du mal avec un tel niveau de contradiction.
La deuxième incohérence touche l'ensemble des combats de Joe. Le héros se bat sans exosquelette. En plus, il vient des bas-fonds et on sait dès le départ qu'il n'est pas un surhomme qui s'ignore. Il se prend une raclée de son adversaire ultime au début, mais il est tout le temps en péril contre des tas d'adversaires classées au-delà de la 200ème place, puis au-delà de la 100ème place, et en cinq combats il se retrouve dans le carré d'or des quatre participants deux demi-finales et une finale à la clef. Tout se passe en trois mois. Donc, sa progression n'est pas crédible, il a du mal contre le 237e, contre le 146e, contre le 85e, mais il gagne tout le temps à la fin, et quand il fait sa demi-finale une fois passée la péripétie de parasitage il gagne en un clin d'oeil contre le troisième mondiale, les deux meilleurs étant dans l'autre demi-finale en gros (puisque lui n'est pas l'un des trois meilleurs en principe). Et ce problème est aggravé, car le héros a gagné tous ses combats sans exosquelette. Moi, je croyais qu'il n'aurait pas d'exosquelette seulement pour les trois premiers matchs et qu'après il y passerait. Non, péripétie scénaristique, il continue à se battre et donc à progresser sans exosquelette, il bat l'élite de la planète en megaloboc en étant le seul à ne pas avoir d'exosquelette. C'est mal conçu, ça détache le spectateur de l'intensité des combats : ça sonne trop faux. Surtout qu'il se fait mettre trois fois quasi K.O., se relève et gagne, comme si les coups de machines il les encaissait bien. C'est un gros problème. Je pense qu'il aurait été plus intelligent de le faire se battre sans exosquelette trois combats, puis de le faire porter l'exosquelette pour les combats suivants jusqu'à la finale, puis trouver une astuce pour qu'il n'ait pas d'exosquelette en finale, soit parce qu'elle serait cassée, soit volée, etc. Le côté ligne droite de réussites sans exosquelette en partant de zéro, ne faites plus jamais ça.
La troisième incohérence va de pair avec la précédente et concerne donc l'ensemble de l'histoire et des combats, c'est le gros problème de la finale. Le champion a foutu une raclée au début de l'histoire à notre héros avec son exosquelette. Evidemment, on peut présenter l'histoire comme intéressante : le héros a gagné tous ses combats sans exosquelette, et le champion en est jaloux et on a un beau message sur la loyauté quand il retire son exosquelette et que les héros se battent à armes égales. Mais ça ne marche pas ainsi. La boxe est un sport qui se passe dans la réalité sans exosquelette, c'est l'animé qui crée un truc de tricherie, genre le moteur sur un vélo pour faire le Tour de France, et qui nous dit à la fin que c'est nul, qu'il ne faut pas faire ça, et que les vraies valeurs c'est la boxe d'homme à homme, pas entre technologies. Mais, c'est débile ! L'animé introduit dès le départ un ingrédient qu'il retire et critique à la fin. Et cela rend d'autant plus criantes les absurdités que sont toutes les victoires du héros. Puis, quelque part, la finale, le champion est moins fort que prévu, donc on assiste à un combat où le danger est amoindri, et amoindri pas seulement parce que le champion n'a plus son avantage, mais parce qu'il est blessé de partout. Bref, ce n'est même pas un combat à égalité, le champion est désavantagé en réalité, et ça redouble encore une fois l'absurdité des combats, parce que le héros vient de battre comme pour rien en demi-finale un des trois favoris qui avait son exosquelette, et là il a du mal sur je sais plus treize rounds à venir à bout d'un gars sans exosquelette. Où est la logique là-dedans ? Bon, j'ai bien aimé, mais ces défauts logiques à cause des exosquelettes auraient pu être évités. Il aurait fallu éviter de les introduire, ils n'apportent que des incohérences, il n'y avait pas besoin de ça du tout dans l'histoire. C'est tout mauvais. J'ai aussi tiqué avec l'idée d'oreillette pour tricher, comme si ça passait inaperçu. Ces défauts m'ayant déplu, j'ai mis seulement six étoiles, sinon j'aurais mis sept étoiles, car si l'histoire est très convenue j'ai bien apprécié de la suivre. Peut-être parce que j'étais dans de bonnes dispositions, mais je ne pense pas que ce soit si médiocre que ça, malgré le manque d'originalité.