Megalo Box, ou la beauté de voir une œuvre saisie d'une notion nostalgique transcender son identité en se tournant vers l'avenir.
Pour ce drama sportif, nous suivons les pas de Junk Dog, un boxeur talentueux issu des rebuts de la société, qui n'a d'autres choix que de participer à des matchs clandestins et truqués de Megalo Box ; une version futuriste de la boxe, où sont utilisés des exosquelettes pour augmenter la force des bras. Alors que Junk Dog semble condamné à la médiocrité, une rencontre du destin avec le champion Yuuri va le pousser envers et contre tout à concourir dans le grand tournoi Megalonia.
Produit par TMS et diffusé en 2018, Megalo Box commémore le 50e anniversaire d'Ashita no Joe. Même s'il possède son propre univers, sa propre histoire et son propre message, ce nouvel anime de boxe est aussi rempli de similarités évidentes, et moins évidentes. Le constat est particulièrement flagrant au niveau du casting des personnages, dont les principaux sont des alter ego de la série d'antan. Une mauvaise chose ? Pas vraiment, Megalo Box n'innove pas mais il y a suffisamment de différences dans la caractérisation de ses protagonistes pour que chacun puisse avoir sa propre personnalité, et offrir ainsi une interprétation nouvelle.
L'aspect le plus frappant de l'oeuvre dans son rapport avec le passé réside dans son aspect visuel, volontairement rétro. La démarche entreprise par le réalisateur You Moriyama consiste ici à appliquer une sorte de filtre, avec un effet grain, et utiliser des couleurs plus ternes, ainsi qu'un chara-design réminiscent de celui des années 70. Le résultat donne l'impression de regarder un de ces animes classieux des années 2000 ressorti en version DVD haute définition, même si quelques plans affichant une 3D grossière nous rappelle parfois sa modernité. Si je peux admirer l'ingéniosité et l'objectif accompli, je reste un peu gêné de voir une production récente amoindrir délibérément sa qualité graphique. Mon appréciation s'avère bien plus franche concernant l'esthétique elle-même ; le design bien foutu des exosquelettes et les plans de villes ou ghettos.
Le point le plus important qui réunit Ashita no Joe avec son héritier se trouve dans le récit du héros. Megalo Box perpétue le récit d'un 'Joe', un quidam des basses classes qui devient un symbole pour la multitude à travers sa lutte personnelle. Avant d'être une série de boxe, l'oeuvre trouve son accomplissement dans le portrait humain de ses acteurs. D'ailleurs, même si le feu des projecteurs embrase régulièrement le ring, les matchs en eux-mêmes, plaisants sans être éblouissants, ne sont pas la scène de ses plus grands points d'orgue.
Megalo Box est une série qui sait capturer le passé, et exécuter avec compétence son drama ainsi que son sport, sans toutefois nous impressionner totalement dans aucun domaine. Voilà mon constat en ce qui concerne la série de 2018, mais ce dernier va changer avec la deuxième partie, diffusée en 2021.
Cette deuxième saison n'était pas planifiée au départ, et l'équipe de TMS à nouveau commanditée, se trouvait alors sans repères maintenant que l'histoire d'Ashita no Joe avait déjà été recrée. You Moriyama et ses collègues n'avaient donc pas d'autres choix que de poursuivre leur œuvre de manière plus personnelle. C'est dans cette confluence, entre talents et perspectives renouvelées, qu'une magnifique suite, Nomad, va voir le jour.
Megalo Box Nomad, avec ses 13 épisodes supplémentaires, garde les mêmes fondations que la première partie mais va creuser ses thèmes plus en profondeur. Par exemple, au niveau de son aspect 'commentaire social', la série va se plonger plus directement dans le milieu moins fortuné d'une communauté hispanique immigrée ; un sujet original pour le medium et surtout approché avec sensibilité. De plus, c'est dans cet environnement que va être introduit un nouveau protagoniste particulièrement mémorable, 'Chief' : un 'Joe' plus ordinaire au parcours touchant.
Le symbole du 'Joe' gagne en importance dans cette suite. L'ascension, mais surtout les difficultés, de Junk Dog vont projeter une ombre qui va affecter durablement ses proches, mais aussi deux autres boxeurs alors inconnus, Mac et Liu, qui accaparent un peu abruptement la fin de la série mais dont l'histoire personnelle complète avec élégance celle du héros. Par ailleurs, Nomad réussit à merveille à développer ce dernier, en mettant en lumière un caractère plus humain, plus tourmenté.
Megalo Box Nomad, bien plus que Megalo Box selon moi, devient une série riche en drama de qualité. Finalement, l'unique tâche dans ce beau tableau se trouve dans ses antagonistes, et tout spécialement le dernier 'grand méchant surprise' qui aurait dû rester une figure neutre selon moi (au risque de faire doublon avec Yukiko).
Nous vivons une période où les remakes ont le vent en poupe, et c'est avec poésie que Megalo Box surpasse l'hommage en pavant sa propre voie, d'une mimique compétente à une œuvre mémorable à part entière.