Seulement six ans séparent Mobile Suit Gundam de sa suite mais en enchainant les deux séries à la suite, quinze années semblent s'être écoulées entretemps, tant la différence visuelle s'avère stupéfiante : les cockpits des Mobile Suit fourmillent de détails, le design des Mechas est bien plus inventif et diversifié et les protagonistes eux-mêmes bénéficient d'un Chara Design bien plus soigné; pas de doute, l'ambition créative est palpable dès le premier épisode d'autant que la série va s'évertuer d'entrée de jeu à faire table rase du passé en bouleversant les repaires émotionnels du spectateur. A bien des égards, il est aisé de considérer ce Zeta Gundam comme l'Empire Contre-Attaque de la franchise Gundam : une plus grande excellence technique, une approche paradoxalement plus intimiste de son conflit galactique et surtout une rupture du manichéisme qui va ici se concrétiser bien au-delà d'un lien de parenté insoupçonné. L'introduction de la série ne craint pas de plonger immédiatement le public dans la confusion en présentant Char, l'antagoniste principal du Gundam originel, comme une figure de mentor héroïque luttant contre la tyrannie du gouvernement terrien; Bright, le premier des anciens héros à faire son apparition, est roué de coups par ses prétendus frères d'armes alors que la domination de la Terre sur les colonies spatiales ne souffre plus aucune contestation : bref, il y a quelque chose de pourri au Royaume de Gundam et les vainqueurs d'hier sont devenus les bourreaux d'aujourd'hui; la démarche est parfaitement louable mais ne vous attendez pas néanmoins à retrouver le même bouleversement idéologique que l'Attaque des Titans : les anciens ennemis feront rapidement cause commune contre l'oppresseur sans que la question de leurs anciennes allégeances ne pèse trop dans la balance alors que le conflit accapare rapidement les différentes générations des pilotes de Gundam.


Paradoxalement, c'est aussi l'un des premiers écueils qui pourraient être adressés à la série : celle de faire preuve d'une certaine précipitation (et d'une certaine maladresse) dans l'exposition de ses enjeux, un défaut qui persistera jusqu'au dénouement de la série, un brin bordélique dans ses retournements de situations et ses trahisons entre les différentes factions. Une hâte notamment incarnée par le célèbre Kamille Bidan, probablement l’un des héros les plus bourrins et têtes brulées jamais proposés par l’animation Japonaise ; il est évident que les scénaristes ne voulaient pas réitérer le personnage bien plus timoré et craintif d’Amuro mais il est parfois difficile de comprendre la logique de cet adolescent à la combattivité fiévreuse, un pur représentant du Nekketsu dans son ardeur endiablée mais aussi sa rage irréfléchie. Il faut dire que le bougre ne sera pas vraiment épargné par le récit, jamais avare en matière de tragédies impitoyables ou d’injustices cruelles ; la première série Gundam était déjà caractérisée par une amertume surprenante pour une production animée de cette époque mais Zeta n’est pas loin de côtoyer du nihilisme tant les exploits héroïques de ces combattants courageux s’avèrent désabusés en définitive. Cela étant dit, j’ai malheureusement eu du mal à ressentir autant d’attachement pour cette nouvelle génération de héros que l’équipage originel du White Base ; peut être à cause de l’insistance des scénaristes de vouloir créer une tension romantique et/ou conflictuelle entre Kamille et le moindre personnage féminin qui intervient dans le scénario ; les femmes sont bien plus représentées majoritairement que dans la première série Gundam mais elles ne bénéficient malheureusement pas d’une caractérisation particulièrement reluisante par rapport à leurs aînées, le plus souvent marquées par une victimisation assez lourdingue et vouées à être des armes de guerre aux mains d’une autorité masculine manipulatrice ; et lorsqu’une combattante se sacrifie pour la troisième fois en tant que bouclier humain, il apparaît évident que la série peine quelque peu à renouveler son propos. Fort heureusement, la génération des adultes s’en sort davantage avec les honneurs, notamment grâce à une implication convaincante des anciens héros de la franchise ; seule Sayla est malheureusement aux abonnés absents (pour cause d’indisponibilité de la Seiyuu en ce temps-là, apparemment), dommage pour Amuro (et le spectateur) qui se retrouve affublé d’une romance lourdingue avec la blonde immature de service ; oui encore une fois, la gente féminine est parfois en PLS dans cette série.


De nombreuses réticences donc, fort heureusement balayées par un final d’une rare intensité dramatique et d’une audace presque invraisemblable pour une production télévisuelle de cette époque ; Zeta Gundam ne figurera clairement pas dans mon panthéon des œuvres Japonaises mais je peux parfaitement comprendre la claque monumentale qu’il a représenté en son temps et l’impact persistant de cette œuvre à travers le temps ; la franchise Gundam avait peut-être vu le jour six ans auparavant mais à bien des égards, Zeta représente la véritable naissance de cette saga prolifique et sa perpétuelle alternance entre moments de bravoure et introspections apeurées. La guerre, c’est une belle saloperie et Gundam oscille toujours avec brio entre la glorification de ses combattants et l’apprêté de leur combat sanguinaire ; entre les rêves idéalistes conférés par la conquête des étoiles et la résignation bornée de ceux qui restent englués les pieds sur terre.


Dans l’espace, personne ne vous entendra crier de désespoir.

Leon9000

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