Lors de son lancement, j'avais évité la sitcom lancé sur CBS malgré tout mon amour pour Allison Janney. Parce que j'avais déjà suffisamment d'Allison Janney dans Masters of Sex et que les échos autour du pilote étaient très mitigés. Mais là, je sais pas, un moment où je n'avais rien mieux à me mettre sous la dent, un moment où j'avais besoin de sucre et de réconfort facile et me voilà devant Mom, sans trop y croire. Deux semaines plus tard, je ne regrette pas ma faiblesse car c'est quand on est faible que la série peut nous faire le plus grand bien.
Oui, de la sitcom Chuck Lorre sur CBS (Two And A Half Men, The Big Bang Theory) m'a fait du bien. Mais pas immédiatement hein. Oui n'allez pas croire que j'ai trouvé la perle rare avec une comédie de network qui fonctionne dès ses premiers épisodes. Non, ça c'était au début du siècle, on sait tous maintenant qu'il faut attendre au moins le dixième épisode pour que les scénaristes se décident sur ce qu'ils veulent nous raconter (c'est aussi pour ça que je n'enterre pas trop vite Undateable, la nouvelle comédie produite par Bill Lawrence sur NBC, dont le pilote était bien naze). Tous les symptômes pouvant mener au "tu verras, ce sera mieux après" sont réunis d'emblée : une héroïne qui évolue dans deux univers qui n'ont rien à voir (sa maison et son travail dans un restaurant), un casting secondaire qui semble assemblée à la va-vite, une dynamique comique qui se cherche mais qui se perd dans l'écho des rires fantomatiques d'un public enregistré...
Il faut de la foi pour poursuivre l'aventure et finir par accéder aux bonnes choses qu'on nous prépare. Heureusement, je suis courageux et désespérément seul. Les bonnes choses, elles arrivent à partir du moment où la série comprend que, sa force, ce n'est pas de nous faire rire, mais de nous émouvoir. Faire rire avec Anna Faris, Allison Janney ou même Matt L. Jones (Breaking Bad), c'est pourtant pas compliqué (et à quelques occasions, c'est joliment tenté). Heureusement, nous émouvoir avec une mère et une fille anciennement alcoolique qui doivent réapprendre à vivre sobrement et à vivre ensemble, le tout doublé d'un père absent qui cherche à se racheter, et d'une gamine tombé enceinte qui veut faire adopter son bébé, c'est encore plus simple. Il suffit de limiter peu à peu les scènes sans intérêt (si ce n'est offrir un chèque au pauvre Nate Corddry et filer des trucs ultra-relous à French Stewart), il suffit d'embaucher Kevin Pollack dans le rôle du père repentant (à partir du moment où il débarque, les choses s'améliorent progressivement) et de donner plus de substance à ceux qui entourent notre joyeux duo (surtout que l'ancien gamin de Meredith dans The Office est plutôt doué). Il suffit surtout de laisser Allison Janney faire son show et de laisser Anna Faris y réagir de manière touchante et le tour est joué.
On se retrouve alors avec une deuxième partie de saison plutôt savoureuse, qui parvient à évoquer un tas de sujets peu abordés dans une sitcom CBS (même si l'avortement n'est pas mentionné une seule fois, ou alors sous la forme d'un gag vaseux) et qui parvient à nous faire s'attacher à des personnages qui, au delà de la caricature, sont profondément humains. Des personnages brisés, qu'ils soient alcooliques, amoureux, cancéreux, bientôt en prison ou victime d'une crise cardiaque. Des personnages qui, comme le chantait Bert Cooper, réalisent peu à peu qu'entretenir leurs relations a plus de valeur que d'entretenir leur compte en banque ou leur addictions. Le tout en ayant un vrai savoir-faire pour de la sitcom old school, avec son rythme, sa théâtralité et sa précision d'écriture (ça, c'est surtout le cas à la toute fin de saison, avec un final vraiment réussi). En plus, les titres sont rigolos (Smokey Taylor sera peut-être le prénom de mon enfant).
Devant Mom, j'ai fini par me sentir comme dans un cocon, et même si je rigolais pas beaucoup dans mon cocon, je m'y sentais très bien. J'aurais presque aimé que le drama soit plus accentué, avec une rechute pour Christy par exemple. Mais la série a été renouvelé et maintenant que son univers et ses enjeux sont clairement installés, je la suivrais volontiers. Bien sûr, avec une chaîne exigeante, il se peut que la qualité retombe et qu'on en revienne à l'aspect potache des débuts. Mais avec un peu de courage, on pourra continuer à suivre avec émotion l'évolution de Christy, Bonnie, Marjorie sans craindre une rechute. Alors si vous trouvez que cette fin de printemps ressemble à un début d'hiver et que vous êtes plutôt du genre patient et vulnérable, je vous prescris un visionnage intensif de cette première saison.