Monster, c’est un peu comme si Hitchcock avait décidé de s’installer au Japon pour créer un thriller psychologique aussi sombre qu’une nuit sans lune dans les rues de Düsseldorf. Le docteur Tenma, chirurgien talentueux et héros malgré lui, se retrouve pris dans une spirale infernale après avoir pris une décision éthique qui va le hanter pour le reste de sa vie. Un beau jour, il choisit de sauver un enfant au lieu d'un politicien influent, croyant bien faire, et cet acte de bienveillance l’entraîne dans l’enfer le plus tortueux que tu puisses imaginer : l’enfant qu’il sauve, Johan, devient un des pires monstres que l’humanité ait jamais produit.
L’intrigue de Monster est tendue comme une corde de piano. Tenma, rongé par la culpabilité d’avoir relâché ce monstre dans la nature, se lance dans une quête à travers l’Europe pour stopper Johan, un sociopathe manipulateur qui semble capable de transformer quiconque croise son chemin en pantin désespéré. Ce qui est fascinant dans cette série, c’est que tu n’as pas besoin d’explosions, de courses-poursuites hollywoodiennes ou d’actions frénétiques pour être cloué à ton siège. Le véritable suspense vient des dialogues, des silences, des regards. Chaque épisode distille des indices, mais aussi des dilemmes moraux qui te poussent à te demander jusqu’où on peut aller pour expier ses péchés.
Dr. Tenma est un personnage complexe. Un médecin talentueux et intègre, il se retrouve dans un rôle auquel il n’a jamais été préparé : celui de chasseur de monstres. Pourtant, ce n’est pas un justicier au grand cœur. C’est un homme brisé par la culpabilité, un être humain qui tente de réparer une erreur irréparable. Sa lutte contre Johan devient peu à peu une quête existentielle : comment sauver des vies quand tu es responsable de la pire d’entre elles ? Et cette question te hante autant que lui tout au long des 74 épisodes.
Johan, lui, est l’incarnation du mal à l’état pur, mais pas dans un sens caricatural. Non, ce qui rend Johan terrifiant, c’est son calme, sa capacité à manipuler les gens sans jamais lever la voix. Il est beau, charismatique, et pourtant, il cache un vide immense, un néant émotionnel. À chaque apparition de Johan, tu ressens une tension palpable, comme si le simple fait qu’il soit à l’écran annonçait une catastrophe imminente. Il est le genre de méchant qui ne se contente pas de tuer : il brise les âmes, lentement, méthodiquement, comme s’il jouait aux échecs avec les destins humains.
Les autres personnages secondaires sont tout aussi captivants. De Nina Fortner, la sœur jumelle de Johan, qui est également prise dans cette toile de mensonges et de violence, aux inspecteurs et journalistes qui traquent Johan et Tenma, chacun d’eux apporte une couche supplémentaire à ce thriller psychologique. L'inspecteur Lunge, par exemple, est obsédé par Tenma, persuadé qu'il est le véritable coupable. Sa poursuite devient presque une rivalité de volontés, où l’erreur humaine et l’entêtement personnel brouillent la frontière entre la justice et l’obsession.
L’intrigue de Monster prend son temps, mais c’est cette lenteur qui fait toute la puissance de la série. C’est un puzzle où chaque pièce prend du temps à s’emboîter, mais quand ça arrive, c’est comme un coup de poing mental. Les flashbacks, les sous-intrigues qui se déroulent sur plusieurs épisodes, les révélations distillées goutte à goutte… Tout est fait pour te plonger dans une atmosphère de tension croissante, où tu sens que quelque chose de terrible va se produire à chaque instant, sans jamais savoir exactement quand.
Visuellement, la série joue la carte du réalisme sombre. Pas d’effets flashy, pas de surenchère d’action. Le style est simple, parfois austère, mais toujours efficace. Les paysages européens, les villes désertes la nuit, les vieux hôpitaux et les maisons abandonnées : chaque décor est un personnage à part entière, apportant un poids supplémentaire à cette atmosphère pesante et claustrophobique. Tu ressens presque le froid des rues que Tenma parcourt, la solitude des couloirs hospitaliers, et l’étouffement des petites pièces où les secrets se dévoilent.
La bande sonore, tout en subtilité, accentue cette ambiance de tension constante. Les moments de calme sont souvent accompagnés d'une musique douce et inquiétante, tandis que les moments d’action ou de révélation se déroulent parfois dans un silence encore plus angoissant. Tout est pensé pour te maintenir dans cet état d’alerte permanent, où chaque note peut faire basculer la scène dans l’horreur.
En résumé, Monster est bien plus qu’une simple chasse à l’homme. C’est un thriller psychologique qui te plonge dans les recoins les plus sombres de l’esprit humain, tout en explorant des thèmes profonds comme la culpabilité, la rédemption et la nature du mal. C’est une série qui te laisse sans voix, mais qui continue à résonner longtemps après que l’épisode soit terminé. Une course contre la montre à travers l’Europe, un duel de volontés entre un homme hanté par ses choix et un monstre qui ne ressent rien. Bref, Monster est un puzzle aussi fascinant qu’inquiétant, et chaque pièce que tu ajoutes te rapproche un peu plus de l’abîme.