Mr Bean m'apaise. C'est un connard fabuleux. Il est au delà de l'égoïsme, parce qu'il n'a pas conscience des autres. Au delà de leurs envies, souffrances ou limites... il n'a en fait même pas besoin de leur parler. Non plus qu'il n'a besoin de leurs sociétés. Il ne se cherche dans le regard de personne. Absolument personne. Jamais. Il interagit toujours pour son bénéfice, ou pour se distraire, ce qui est une forme très immédiate de bénéfice. Aucune diplômatie, ni attentes sociales. Il n'a pas besoin de la validation des autres. Il a un monde à lui en dehors de la société, extrêmement minutieux, avec ses propres rites et traditions, qu'il s'est fabriqués tout seul comme un enfant. Son nounours, son pyjama, sa petite voiture qui passe partout... C'est un monde aussi has been que cosy. C'est à la fois triste et apaisant. En dehors de son monde, Mister Bean passe comme un fantôme, qui singe les autres, ou les teste. Tout est expérimentation intuitive, et les Eurêkas pleuvent. Pour être oubliés aussitôt. Mister Bean ne découvre rien, car rien n'a vraiment d'importance en dehors de son petit monde personnel. Ses fulgurances ne sont que des moments où le chaos se cristallise, pour reprendre sa course folle quand Bean se retire. Ou peut être est ce un grain de chaos dans un grand cristal, ça reste une fulgurance... On peut le voir comme un trouble-fête, moi je trouve qu'il apporte aux fêtes ce qui leur manque. L'antipathie qu'il inspire peut-être du au fait qu'il ne cherche pas de sens à long terme aux mondes des autres. Il rappelle aux autres que leur stabilité n'est que vue de l'esprit, et que tout est bancal, tout vascille en permanence, et qu'on n'est jamais à l'abri d'un nouveau point de vue.
Afligeons-nous d'une petite image.
Une dame de mon collège, quand j'étais petit, s'était moquée d'un enfant un peu lent qui ne s'activait que par sessions brèves. Elle avait utiliser une image qui me marqua. Elle avait décrit le cerveau vide de l'enfant, avec juste un petit haricot qui se promenait au hasard en rebondissant sur les parois du crâne. Et elle avait mimé l'activation en imaginant ce haricot se prendre dans un engrenage entre les deux sourcils, faisant le lien pour que tout tourne brièvement rond. Elle m'avait expliqué que c'était les seuls moments où cet enfant devenait cohérent.
Et bien Bean est un petit haricot qui traverse un monde en berne, un haricot qui trouve des engrenages partout et les enclenche par curiosité, pendant quelques minutes, avant de repartir cogner contre d'autres murs, vers de nouveaux engrenages. Vers l'absurde qui donne le sens du rire... c'est un clown.
Pour mieux comprendre il faudrait regarder Bean en pleine action. Chez le dentiste par exemple, les outils ont bien plus de sens quand Bean joue avec que quand ils sont posés sur leurs tablettes ou qu'ils soignent les dents. C'est en jouant avec la roulette que l'on comprend vraiment ce que c'est, pas en l'utilisant à ce pour quoi elle existe... c'est comme la dinde, on la comprend mieux quand on a la tête dedans !