Première saison
Dans les séries télévisées, l’approche par le cynisme est une habitude en occident, presque une spécialité même. Au Japon, Hachiman Hikigaya, lui, cet asocial et anticonformiste, débarque comme un messie dans le monde monotone des comédies romantiques où l’on ne se posait même plus la question du pourquoi le héros doit toujours tomber amoureux et s’ouvrir au monde malgré lui.
Hachiman est le twist, et l’intérêt principal de la série. Hachiman n’a visiblement pas eu un début d’adolescence facile et a décidé de rester à l’écart de tout groupe social. Le paria assumé refuse toute relation dans un monde scolaire qui ne veut que ça, et nous livre au fil des épisodes ses observations exquises sur une société d’apparence où «tout le monde ment».
Hachiman la star, Hachiman le Grand. Et quid du reste ?
Oregairu est une adaptation de Light Novel et ne déroge pas aux règles habituelles du genre, parfois aussi bien huilé qu’un vaudeville: avoir un titre aussi long que possible? Check. Des dialogues qui sonnent trop intelligents pour être vrai? Check. Des petites phrases pensives dites à voix haute, sous-entendant mille et une choses? Check. N’oublions pas que tous les personnages doivent forcément avoir des connections spéciales avec l’un ou l’autre pour faire valoir des backstories profondes. Et enfin, si les aliens avaient pour connaissance de l’humanité ces seules séries, ils n’auraient aucune idée que, non, les parents, en fait, ne disparaissent pas dans l’éther une fois leurs enfants entrés au lycée.
Un côté artificiel qui peut ennuyer tant il sonne faux mais Oregairu la plupart du temps s’en sort honorablement. L’analyse des relations sociales par Hachiman est toujours pleine de verve et ses monologues s’avèrent mémorables. Les dialogues entre les différents personnages sont véritablement complexes et demandent de la réflexion pour comprendre toute leur subtilité, une tâche assez ardue pour le dernier arc(épisode 10-12) honnêtement. Et surtout, de manière générale, l’ambiance de la série est une réussite et au final c’est bien ce qui compte.
Révolutionnaire? Oregairu possède certainement un point de vue unique sur la chose mais reste une comédie romantique: Hachiman pourtant franchement asocial et antipathique à de nombreux égards, arrive quand même à s’attirer la sympathie de ses deux consoeurs installées au spot des personnages principaux. Moins important et peut-être encore plus étrange quand Saika(le trap) tombe aussi sur le charme et on en viendrait même à questionner les motivations de Shizuka(la prof) par deux fois.
Comme pour prouver qu’Hachiman est bien dans une comédie romantique, il a bien fallu que le miracle de l’amour s’opère et que les mécanismes de l’arrière-scène s’engrenagent... de fait les épisodes 6 et 9(rendez-vous avec Yukino et Yui) en sont les tristes manifestations(je passe les bikinis montrés dans l’épisode 8, avec pour justification un cours d’eau de 30cm de haut). Au grand dam de tous les otakus et autres pour qui ça ne marche pas, il semblerait qu’Hachiman arrive donc à outrepasser les lois du bon sens pour pouvoir encore mieux leur cracher dessus, du haut de son piédestal, en mode balistique sûrement...
Les personnages en dehors d’Hachiman sont eux aussi tirés des tiroirs habituels: on a le chuunibyou, la reine de glace, la gentille fille qui ne sera jamais choisie, le trap et en poussant un peu je pourrais inclure la jeune prof célibataire(voir Christmas Cake sur Tv Tropes), et la soeurette ennuyante. Mais si on part comme ça, qu’est-ce qui n’est pas cliché n’est-ce pas? Le principal est d’avoir des personnages réussis et la note est assez positive de ce côté: Yui et Yukino sont attachantes et même Hayato ou Shizuka ont leur intérêt.
Si je décortique ainsi Oregairu, c’est qu’il faut bien se rendre compte qu’en dehors d’Hachiman, la série reste très classique sur bien des points. Maintenant Hachiman justifie-t-il de regarder la série? Personnellement c’est un oui mais cela dépend de chacun.
Dans la balance entre voir et ne pas voir, il y a donc Hachiman et le fait que la série est plutôt réussie mais conventionnelle. Un dernier élément qui pourrait influencer le choix du spectateur sont les graphismes. J’ai tendance à ne pas les prendre en compte sauf lorsque c’est beau, mais il faut avouer que Oregairu est un cas limite tant la série est fade et pauvre en animation. Même les quelques épisodes un peu mieux réussis restent en dessous de la moyenne actuelle. Mon score n’a pas été influencé(négativement) par le dessin car dans mon cas cela restait tolérable mais prévenons quand même que c’est assez(franchement) laid.
J'ai hésité à mettre un 8/10, notamment en repensant aux épisodes ennuyeux(le 2ème surtout, l’épisode 5 si on ignore ses dernières minutes) et les débuts un peu mous. Mais Oregairu est une série intéressante, que je recommande pour ceux qui veulent voir un peu de nouveauté dans l'univers des comédies romantiques.