Le pénitencier d'Oswald abrite un quartier pilote, Emerald city, dans lequel les prisonniers vivent une vie "normale" puisqu'ils y circulent librement en journée et qu'ils s'auto-gèrent dans les tâches quotidiennes. Ce quartier expérimental est dirigé par Tim McManus, optimiste convaincu qu'il tient là le moyen de réinsertion idéal.
Em-City n'est en fait que la reconstitution de la société américaine (on y retrouve d'ailleurs tous les groupes sociaux tels les ariens, les musulmans, les latinos, les gangstas, etc...) , cette même société qui préfère oublier ces hommes que de regarder la réalité de leur condition en face. Et c'est cette réalité que renvoie Oz à la face du spectateur.
Une réalité faite de sectarisme exacerbé, de viols, de misère, de douleur, de violences physiques, de pressions psychologiques, de désillusion...
Le monde de Oz est constitué de psychopathes endurcis, de criminels avérés mais aussi d'individus normaux aspirant à une seconde chance et d'optimistes parfois aveugle ou impuissant face à la cruauté qui est sous leur nez. Peu importe l'origine (maton, administration, prisonnier, personnel encadrant) personne n'est épargné, personne n'est bon et même la pire des ordure n'est qu'un être humain.
Il n'y a d'ailleurs pas de héros dans Oz, il n'y a pas de personnage central même si la série utilise Tobias Beecher comme vecteur d'identification pour le spectateur (c'est un type "normal" qui se retrouve là "pour l'exemple" suite à un accident). Les nombreux personnages vivent et interagissent dans ce microcosme où tout est hostile et on arrive à être franchement révolté par le comportement d'un "bon" comme on peut être sincèrement ému par les déboires d'un enfoiré notoire.
Difficile d'aimer vraiment quelqu'un à Emerald City (MacManus se comporte parfois comme le dernier des cons) mais impossible de les détester complètement. Les personnages de Oz sont simplement, et horriblement, humains. Beecher, Schillinger, Adebesi, O'reilly, Augustus, Karrem Said, Keller... Autant de destins et autant de larmes, d'injustice, de haine, de sang, d'émotion, de douleur...
Une galerie de "somptueux enculés" interprétés par des acteurs bluffants. La sournoiserie de Dean Winters, le charisme de J K Simons, la fragilité de Lee Tergesen, le calme de Eamonn Walker, la folie de Christopher Meloni, la naïveté de Scott William Winters.
Esthétiquement la série s'emploie à restituer tout le caractère viscéral de ce qu'elle raconte avec une photo très crue et contrastée et un montage nerveux mais sans esbroufe.
Point d'angélisme non plus puisque s'attarder sur le côté humain ne sert jamais à excuser les crimes qu'ils ont pu commettre. L'intérêt n'est pas de savoir s'ils sont innocent ou pas, ils ne le sont pas. Ils sont tous coupables. L'intérêt est de savoir ce que fait la société face à ces individus, face à ces comportements. Savoir si la réhabilitation est possible, envisageable... justifiée ? Ces hommes sont ils des monstres ? Le deviennent-ils ? Le système est-il apte à les rendre meilleur ? Le veulent-ils seulement ?
Oz ne cherche pas la réponse et ne porte pas de jugement, la série cherche l'interrogation, elle questionne. La sexualité, déviante ou assumée, est abordée sans fard, tout comme le recours à la violence (omniprésente) ou les aléas moraux. Si la série ébranle sur le plan émotionnel (je met au défi quiconque de ne pas pleurer lors de certains passages) elle interpelle aussi le cortex. Les nombreux emprunts aux tragédies grecques contribuent également à enrichir des thématiques déjà bien denses.
La série ne semble avoir que des qualités mais elle a malheureusement un gros défaut. Elle a le défaut de la série qui a durée trop longtemps... ou pas assez. Quoi qu'il en soit la dernière saison de la série s'avère décevante. Certaines astuces sont recyclées, certains personnages introduits mais pas exploités et le destin de certaines figures majeures du show connaissent une conclusion dénuée de sens. Et il y a cette étrange sensation de ne pas connaitre de vraie conclusion au show, bien sûr le statut quo peut avoir valeur de message mais étant un thème récurent (et parfaitement exploité à d'autres moment du show) il est dommage de s'en contenter. Un faux-pas final qui laisse un fort sentiment de frustration, comme s'il manquait vraiment quelque chose ou qu'il y avait quelque chose de trop.
En proposant des personnages ambivalents et en n'ayant aucun tabous (la nudité masculine est explicite, la violence est parfois à la limite du soutenable) le show de Tom Fontana ouvrit définitivement la voie de la télévision américaine moderne. Véritable point de rupture dans la production télévisuelle le show de Tom Fontana avait bousculé tout le monde en n'hésitant pas à mettre les pieds dans le plat. C'est ce que l'on appelle une série électrochoc.