Au vu de la minorité bruyante hurlant à la propagande raelienne après s’être arrêté au premier épisode, il convient de préciser que non, la série ne redore pas le blason de la secte, et je défis quiconque l’ayant vu en entier de me soutenir le contraire. En revanche, oui elle choisit de donner la parole à ses membres, sans que ces derniers ne soient immédiatement diabolisés ou tourner en dérision par le biais d’un montage grossier ou d’une narration à charge, comme le faisaient jusqu’alors les précédents reportages consacrés à leur mouvement. Car le sujet ici, plus que Rael lui-même, ce sont ces hommes et ces femmes qui, un beau jour, ont décidé de donner leur existence à ce petit auvergnat insignifiant au récit complètement fantaisiste.
Si dans un premier temps, la série fait mine d’embrasser le narratif des raeliens, en omettant volontairement des éléments pouvant écorner l’image de l’extraordinaire prophète et de sa communauté de néo-hippies vivant dans la plénitude la plus complète ; une succession de scandales mis sur le tapis et les réponses de plus en plus embarrassés des adeptes, changent progressivement la vision du spectateur sur le mouvement, jusqu’à ce dernier épisode complètement à charge, où les manipulations de Rael sont exposées au grand jour. A l’instar de Damien Marsic, ex-adepte s’étant fait « voler », selon ses dires, 27 années de sa vie par la secte ; la narration nous fait passer de la fascination à la suspicion, puis de la suspicion à la répulsion. C’est ce parti pris qui nous permet de mieux connaître ces gens-là, de ressentir le pouvoir d’attraction qu’à pu exercer sur eux le faux prophète, de constater la place dévorante qu’a pu prendre le mouvement dans leur existence et de mieux comprendre pourquoi certains lui demeurent fidèles, quittes à s’enfermer consciemment dans le mensonge. Et je suis convaincu que cette série a plus de chance d’être regardée et de résonner chez les membres de mouvements sectaires, que n’importe quel documentaire lambda qui les présenteraient d’emblée comme de parfaits illuminés sous la coupe d’un dangereux gourou.
En outre, la série a également pour intérêt de mettre en lumière le devenir de la secte, 15 ans après avoir quasiment disparue des projecteurs. L’occasion de découvrir un Rael vieillissant mais toujours diaboliquement malicieux, se réjouissant à l’idée que son œuvre puisse lui survivre. Je n’y aurais jamais cru, mais il semble que la secte ait trouvé un nouvel eldorado sur le continent africain, grâce à l’intervention d’un jeune messager, partageant autour de lui la parole du grand-maître à laquelle il souscrit totalement. Et cette dernière information m’a profondément interloqué. Cette gigantesque farce qui n’avait pas d’autre but que d’enrichir les poches d’un escroc, est entrain de devenir une authentique religion, survivant à son créateur et pratiquée au premier degré par de véritables croyants. Ce qui me fait me demander si, au fond, une religion ne serait pas la dernière étape d’une secte qui aurait réussi.