Lassé de ces heroic-fantasy bidons, aussi éphémères qu’une bière devant la bouche d’un supporter de football, aussi vains que votre petite amie face à la pureté d’une vraie waifu, et dont les prémices sont massacrées par la présence de Jean Bouchetrou et de l’Isekai ambulant (terme officiellement repris dans le dictionnaire des pathologies animesques en 2018, véridique) ? Ne vous inquiétez pas ! Car Grancrest Senki est THE aventure épique dont nous rêvions... Hahaha...non. Cet anime a comme la plupart de ses prédécesseurs failli face aux attentes. Pourtant je ne peux pas m’empêcher d’avoir une certaine affection pour cette série, aussi suis-je dans l’obligation de vous sermonner quelques minutes à son sujet.
Ecrit par l’auteur de « Lodoss tou Senki », Grancrest Senki a tout pour plaire sur le papier : lors du premier épisode, nous découvrons un univers fantasy classique où des seigneurs contrôlent chacun un sceau magique plus ou moins puissant selon leur importance. Ces sceaux permettent de combattre et contrôler la présence des forces du chaos qui ravagent le monde mais ils sont également l’enjeu de conflits militaires plus pernicieux entre humains qui convoitent leur pouvoir. Au centre de cette dynamique se trouve un système de suzeraineté complexe composé non seulement de grands guerriers mais aussi de mages et d’ « artistes » (classe mixte) en tout genre.
L’histoire de Grancrest Senki est celle d’une grande partie d’échecs où se succèdent larges batailles, faits héroïques et intrigues sinistres. Le contenu est riche mais il ne faut pas non plus se faire d’illusions quant à sa complexité : le scénario ressemble davantage à celui d’un jeu-vidéo (comme Suikoden) plutôt que celui d’un roman. Il possède cela dit un certain charme et un ton plus adulte (nudité et violence) que les aventures adolescentes habituelles de la japanimation. Le problème majeur de la série est que le contenu, adapté à partir de Light Novel, est abordé bien trop rapidement même avec 24 épisodes : les événements majeurs apparaissent et se succèdent sans grands développements, les transitions entre certaines scènes sont très maladroites et les personnages sont souvent traités de manière expéditive. Ce défaut est très apparent durant les premiers épisodes et ceux-ci seront un bon test pour savoir si vous saurez accepter ce rush quasi-permanent. On appréciera en revanche le fait que Grancrest Senki est une adaptation complète contrairement à tant d’autres oeuvres heroic-fantasy,.
L’anime reste dans l’ensemble une expérience divertissante et l’avantage de son rythme éprouvant est que l’histoire ne stagne pas. En outre, la mise en scène arrive à élever plus d’une séquence vers l’excellence et l’animation a ses moments « sakuga » intenses malgré une qualité en dents de scie ainsi qu’une utilisation 3D bien pauvre pour les armées (un standard de nos jours). L’action est régulièrement présente par ailleurs et des efforts sont faits pour rendre les batailles tactiques. Malheureusement, il y a d’un point de vue stratégique global un manque cruel de clarté et plus d’une fois le spectateur se retrouvera avec un visage « quifaitquoioùnande ? ».
Les différents héros et vilains de la série sont un autre aspect à la fois réussi dans l’idée mais handicapé par la limitation du temps. Grancrest Senki peut se targuer d’une galerie très colorée mais peu explorée de personnages. Idem pour les deux protagonistes principaux, assez banals mais que j’ai tout de même apprécié, et je regrette personnellement de ne pas les avoir vu davantage mis en avant lors des derniers actes de l’intrigue.
Vous l’aurez compris, Grancrest Senki a pas mal de défauts, la plupart liés à l’adaptation bien que je ne pense pas que les livres soient sans blâmes (les motivations de Marrine, l’absence aberrante du Chaos et la passivité du héros principal durant le premier acte). En ce qui me concerne, ma plus grande déception est le manque d’impact ressenti en fin de série; celle-ci aura du mal à se faire manquer. Malgré tous mes reproches, l’essentiel de mon appréciation peut se résumer au fait que j’ai regardé Grancrest Senki chaque semaine sans jamais m’ennuyer. Aussi, même si mon avis n’est pas très vendeur, ma conclusion est de conseiller aux amateurs du genre heroic-fantasy d’essayer cette série qui pourrait bien les satisfaire.