Il en vaut le détour
J'étais à la recherche d'un anime à regarder quand dans la description de cet anime, j'ai vu que c'était le même studio d'animation que The Promised Neverland, c'est ce qui m'a poussé à le mater...
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le 13 oct. 2022
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Voilà une série fascinante du printemps 2021.
Je n'ai pas lu le manga et l'identité des auteurs est un peu une énigme, il s'agit d'un duo nommé Sô-ma-tô, et je ne sais pas ce qu'ils ont pu écrire d'autre. Je n'ai pas lu la moindre page du manga également.
Apparemment, nous sommes partis sur une série en 13 épisodes et nous approchons de la moitié avec le 6e épisode du 15 mai. Il paraît que l'animé a modifié un point crucial du manga au 5e épisode, ce qui laisse augurer d'une série qui s'arrêtera au 13e épisode et ne poursuivra pas l'adaptation du manga. Par chance, je n'ai pas appris plus précisément de quoi il retournait, mais je suis pour ma part désireux d'une adaptation de l'intégralité du manga.
Les données de départ sont originales et bien conçues. Nous sommes dans un château un peu médiéval et nordique d'allure. Les habits, la présence d'un train, les manières, le fait de boire le thé, la société fait songer à l'Angleterre victorienne, au dix-neuvième siècle anglais. Malgré la présence du train dans les génériques et les premières minutes, l'histoire se déroule pour l'instant dans une espèce de huis clos, celui bien évidemment de la maison des ombres.
Les premières minutes laissent supposer l'arrivée de cinq nouvelles recrues qui vont travailler en tant que bonnes à tout faire pour des châtelains, intro un peu trompeuse car en réalité nous verrons que les personnages en question ne se connaissent pas et ne sont pas arrivés au même moment. Nous suivons donc une héroïne blonde enfantine, dans le plein mode kawai, qui joue le rôle d'une servante d'une mystérieuse femme élégante et peu expansive dont on ne voit à travers les habits que le contour ombreux. Il s'agit d'un condensé de suie à apparence humaine élégamment vêtu et mis en valeur. Les deux femmes s'opposent sur un certain nombre de points, entre l'aristocrate aux belles manières et la servante qui est bien trop gourde pour son métier. Cette fille blonde ne comprend rien à la domesticité et ne rentre pas du tout dans sa fonction. Son inadaptation fait dire qu'elle est simplette, mais il s'agit d'un jugement probablement injuste, car si en effet elle est maladroite et inattentive, elle casse des objets en faisant le ménage, l'idée de sa bêtise est plus difficile à admettre. Certes, certains incidents la font passer pour sotte. Elle est femme de ménage, mais elle ne lave de son visage que ce qu'elle voit dans le miroir. Ou bien elle frotte une tache sur une fenêtre, sans voir que cette tache est de l'autre côté. Ceci dit, elle a tout de même à plusieurs reprises des capacités de déduction étonnantes, et en particulier dans les scènes d'alerte où il faut sauver des vies et empêcher qu'un problème de suie échappe à tout contrôle, elle intervient et résout par son intelligence même les problèmes. Elle songe à utiliser l'eau dans un vase ou elle observe son environnement, repère d'où vient la suie et sait même expliquer pourquoi elle provient de tel endroit, alors que les autres sont tous demeurés comme des poules devant une montre.
Et elle a encore d'autres bonnes idées.
C'est un personnage kawaï, mais on échappe à tout ce que le genre kawaï a d'agaçant. On n'a pas une mignardise abrutissante, même si on a une bonne dose de comportements bébé. On n'a pas non plus un fan service douteux. C'est parfaitement dosé.
L'animé ne bascule pas non plus du tout gentil au tout glauque. Il y a une ambiance qui crée quelque chose d'inquiétant, mais la série demeure d'une certaine légèreté.
Maintenant, il y a du mystère et une intrigue. Notre servante à longs cheveux blonds est considérée comme défectueuse et elle doit passer une épreuve qui, en cas d'échec, signifierait une sorte de mise à mort, puisqu'elle serait jetée comme une poupée cassée. En même temps, nous comprenons que son visage est celui authentique de la maîtresse à la silhouette en suie à laquelle elle est rattachée.
Elle fait bientôt la rencontre des autres poupées, du moins des autres poupées de ce secteur-là du château. Certaines poupées sont plus anciennes, d'autres semblent être des nouvelles. Mais vu qu'elle est la seule dont on fait les présentations, elle est visiblement la dernière arrivée, et le plus inquiétant c'est qu'elle semble avoir des lacunes importantes. Une seule autre poupée semble aussi nulle et aussi défectueuse qu'elle.
En gros, la poupée doit non seulement bien exécuter son rôle, mais elle doit se mettre à l'unisson de sa maîtresse ou de son maître lorsqu'ils sont ensemble en société. La poupée n'a pas le droit à l'autonomie de ses pensées, elle doit être au service dévoué et complet de son maître. Or, on passe à une difficulté supérieure, puisque la poupée doit anticiper les réactions du maître en société pour afficher le visage, les émotions et les gestes du maître. Mais, si la poupée doit anticiper les actions, elle ne doit pas les provoquer. C'est le maître qui doit guider, et pas l'inverse, d'où certains scènes assez subtiles où derrière une apparence de rapports maîtrisés, certains couples maître et poupée commettent des impairs.
L'un des problèmes qui apparaît, c'est que notre héroïne, non seulement ne connaît pas les codes, mais on ne lui a pas appris à lire et écrire, alors que d'autres poupées maîtrisent cela dès la naissance. On se dit que la poupée n'est pas seulement défectueuse, mais que tout a été fait exprès. Je n'en sais rien, je ne connais pas la suite de l'histoire, mais plusieurs indices donnent l'idée qu'il y a un complot derrière. Ce n'est pas tout. Effectivement, l'héroïne blonde a une nature aimante, elle s'intéresse à toutes et à tous sans discrimination, poupées comme maîtres. Or, pour une poupée soumise à un maître, c'est forcément un esprit de rébellion, à tout le moins des pensées inutiles, de penser à un autre maître ou à une autre poupée. Elle ne doit être qu'une poupée sans volonté, sans libre-arbitre. Et sa manière de s'intéresser même à sa maîtresse la fait agir à l'envers. Par exemple, dans le deuxième épisode, notre héroïne est tombée par la fenêtre et sa maîtresse prend le risque de sortir pour la récupérer. Or, les deux femmes se retrouvent nez à nez avec un autre couple de maîtresse et poupée. Et quand l'héroïne blonde veut présenter sa maîtresse, elle tend les bras vers elle pour la laisser se présenter, ce qui fait rire le couple en face, parce que très maladroitement le geste de l'héroïne n'a pas permis à sa maîtresse de se calquer sur elle. C'est très subtil, et je pense que tout le monde ne remarque pas cela en visionnant l'épisode.
Mais, ce que me semble pour l'instant camoufler les six premiers épisodes de la série, c'est les dysfonctionnements des ombres elles-mêmes. Cela n'est pas complètement camouflé. Une des poupées est battue par sa maîtresse. On comprend aussi pour une poupée garçon que la fierté qu'éprouve le maître en suie au sujet de son visage va de pair avec un partage problématique de l'arrogance, puisque si la poupée est arrogante comme son maître elle prend des initiatives qui ne conviennent pas à un domestique. Mais ce qui m'interpelle, c'est le couple principale. Normalement, la poupée doit porter un nom proche de son maître. Or, la maîtresse Kate a rejeté les prénoms proches du sien pour appeler sa poupée Emilico d'après un livre qu'elle affectionne particulièrement. Si nous suivons de près les aventures d'Emilico, Kate est une véritable énigme. Elle ne respecte pas les règles pour prénommer une poupée, elle semble elle aussi impliquée dans la possibilité d'un échec à venir de sa relation avec la poupée, toute la faute n'a pas l'air de venir que d'Emilico. Est-elle réellement Kate ? Il est vrai que plusieurs personnages en suie parlent souvent d'eux-mêmes à la troisième personne ? Qui est la véritable Emily ? Kate veut-elle que la poupée lui corresponde ? On diurait plutôt qu'elle veut que la poupée soit elle-même et elle projette sur la poupée le personnage d'Emily en la baptisant ainsi. Il y a une autre grosse énigme. Kate a créé une poupée avec un bonhomme en suie à l'intérieur, et quand Emilico a trempé cette poupée et s'en est servie comme d'une serpière, Kate a eu une réaction de colère, puis revenue de son bain elle a constaté qu'Emilico avait recousu la poupée et les rapports se sont apaisés. Or, il est tout de même question de bonshommes en suie, Emilico a créé sa propre poupée et ces poupées bougent toutes seules par moments, plutôt sous l'influence de Kate il est vrai. Il y a un gros suspense mis en place pour l'avenir de la série, en sachant que ça ne s'arrête pas là. Dans le premier épisode, de la suie s'est déplacée, et c'est Kate qui l'a écrasée, mais presque comme si elle avait voulu la cacher, et à un autre moment une tache ne partait pas, et quand Emilico l'a dénoncée à Kate cette tache s'est défaite d'un coup, comme si elle avait une volonté et un rapport à Kate.
Or, si le nettoyage importe tant, c'est qu'une autre intrigue s'additionne à cet ensemble déjà fourni, c'est qu'il y a de la suie qui crée des agrégats qui ont une vie autonome et deviennent dangereux.
Bref, il y a largement de quoi aller bien au-delà de treize épisodes, et pour l'instant après six épisodes l'intrigue dominante est celle de l'épreuve de conformité des couples maîtres et poupées. Il y a toutefois un aspect qui m'interpelle. Les épreuves ont l'air de juger si les poupées jouent bien ou mal leurs rôles près de leurs maîtres, mais on peut parfois se demander si subrepticement ce n'est pas une parole du maître qui est jugée. C'est sensible dans les conflits entre les maîtres Louise et Patrick notamment. J'ignore où tout cela va, mais c'est passionnant, et il est évident qu'il y a un complot dont Kate est la cible.
Maintenant, reste à savoir si la série va prendre le parti de protéger systématiquement ceux qui ont la sympathie des auteurs. C'est une tendance que je vois se dessiner qui m'inquiète un peu. Reste à savoir si l'aïeul qui dirige tout dans l'ombre va faire peser lui-même une morale ou si Kate et Emilico vont devoir triompher d'une hostilité radicalisée. Il y a beaucoup d'injustices criantes. Par exemple, Emilico n'est pas félicitée pour ce qu'elle a fait de bien, alors que dans le même temps elle a été victime d'un traitement inique qui l'a empêchée de s'entraîner pour l'épreuve, alors même qu'elle était une petite nouvelle. On lui a donné une corvée qu'on aurait dû donner à des poupées plus anciennes non concernées par le concours.
Mais, Kate et Emilico s'aiment de plus en plus et Kate déclare se moquer des règles de ce manoir. Il s'agit visiblement de repenser les rapports humains dans cet univers. Voilà en tout cas ce qui se profile clairement.
Pour la réalisation, l'animé offre des images superbes. Nous avons des vêtements et objets finement ciselés, avec des dorures, ce qui tantôt rehausse les silhouettes en suite, tantôt crée de belles images avec malgré tout un halo de suie. On a aussi de la suie qui tournoie parfois agréablement comme des plumes légères, surtout dans les génériques, et puis surtout dans les génériques des contours blancs lumineux, comme une poussière d'étoile qui serait l'inverse de la suie, mais un peu l'équivalent en lumineux de la saleté des greniers. Le soleil tombe souvent assez volontiers sur le visage d'Emilico. Celle-ci dort dans un caisson avec des trous pour respirer. Ou bien, lors d'une attaque de suie, l'agrégat prend la forme d'une araignée et le corps de la victime, une poupée, donne l'impression d'un pendu désarticulé. Bref, il y a plein de bonnes idées, tandis que les génériques sont nettement occidentalisés avec une influence maximale des images de génériques de séries américaines, et la musique est maximalement occidentalisée également. Le générique d'intro joue avec les violons et une atmosphère de polar des années 70, avec un motif de basses à petits craquements en fond. Le générique de fin a un côté hypnotisant pour sa part.
Difficile de trouver des défauts à cet animé que certains comparent complètement à tort à The Promised neverland. Non, ça n'a rien à voir (à moins qu'on ne finisse par apprendre que le duo d'auteurs est le même, mais ce serait franchement étonnant), Shadows House est cent mille fois mieux, cent mille fois plus esthétique, cent mille fois plus cohérent, cent mille fois plus imprévisible, cent mille fois plus intéressant et original, et les histoires ne sont pas sur le même plan.
Surpris que le manga lui-même ne fasse pas vraiment parler de lui, du coup.
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Créée
le 16 mai 2021
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