L'Été est la période idéal d'expérimentation pour les programmateurs des différentes chaines jeunesses de la TNT. C'est une saison où les enfants sont le plus susceptible de regarder la télévision, et tous les moyens sont bons pour pousser les enfants à ne pas aller à la plage ou à la console. L'une des techniques fréquemment employé reste les nouvelles séries et les avants-premières qui permettent de prendre la température vis-à-vis d'une nouvelle création qui, à la rentré prochaine, serait susceptible de rejoindre la programmation de rentré. L'été est alors une forme de bac à sable où le programmateur expérimente généreusement, et où le spectateur peut se perdre face aux nouveaux grand cru majoritairement française. Durant ce mois de Juillet 2024, plusieurs séries ont fait leurs débuts et du côté de la chaine Gulli, la communication ne jurait que sur la série Shaker Monster, un catch them all sous fond de scénario feuilletonnant qui pouvait corriger la débâcle public et critique du retour très médiatisé des Totally Spies, 10 ans après la fin de la saison 6. La communication était d'attaque dès le début du mois de Juillet: "tous sur Gulli à 16h45 pour voir Shaker Monster". Tout ça pour ça... Ce n'est pas faute d'avoir essayer des choses, mais Shaker Monster fait l'effet d'un pétard mouillé.
La série sait être attrayante et dynamique. Que ce soit dans ses couleurs, ou même son tracé particulier qui se veut plein mais qui tend à être fragmenté (presque à la japonaise), une surface à la fois lice et rugueux par endroit, l'animation est très efficace et la réalisation nous accroche très rapidement. On est sur les aventures quotidiennes d'enfants de 9 ans pas encore au collège, et qui peuvent voir la vie de manière énergique et fantastique. Il est donc logique et bienvenue que la réalisation cherche à retranscrire le trop plein d'énergie que peuvent avoir les personnages principaux. Le soucis étant que, même si la réalisation est très belle, elle ne convient pas toujours au rythme que veut installer la série. Les épisodes sont souvent assez calmes avant les débordements causés par les monstres, et s'il y a bien le personnage principal qui tente d'instaurer ce surplus d'énergie (on y reviendra plus tard) qui collerait au dynamisme de la réalisation, la série vient souvent à subir sa propre démarche artistique. L'écart entre le calme des épisodes et l'énergie ambiant fait qu'on a l'impression d'une œuvre qui se croit plus énergique qu'elle ne l'est, et souligne les moments "trop" calmes en les montrant comme des ventres mou, alors que la série est en réalisé plutôt bien écrite... du moins sur son rythme.
Le plus gros point noir de cette série reste l'écriture qui manque de rigueur, surtout autour de la diégèse et de l'univers. On suit un gamin de 9 ans capricieux amené à apprendre à maitriser ses caprices grâce à la capacité de répondre à tous ces désirs par magie. On retrouve une logique à la Mes parrains sont magiques avec, pour être honnête, beaucoup plus de maitrise que Butch Hartman quant aux répercutions de l'utilisation de la magie (ça a tout de même ses limites, on y reviendra plus tard). Cette magie provient d'un shaker magique qui permet de faire apparaitre des monstres aux pouvoirs bien précis et qui, s'ils sont mal maitrisés, peuvent créer les dégâts qui sauront l'occasion pour le personnage principal de comprendre les besoins de ne pas utiliser le shaker à mauvais escient. Dans le lore, le shaker a été offert par le grand père du héros qui lui a fait promettre de ne pas révéler le secret du shaker à qui que ce soit, à l'exception de sa sœur Gwen (qui a le même âge). La tâche sera d'autant plus complexe que la voisine fouineuse se doute de quelque chose. De ce postulat, beaucoup trop de problèmes sont à relever. D'une part, le fait de cacher aux parents les aventures des enfants est une tradition vieille comme le monde qu'on a pu voir un peu partout, de Fineas et Ferb à Objectif Blake, et qui semblait être un acquis assez simple: l'aventure est une magie imaginaire qui se doit d'être protégé d'un regard adulte et trop ancré dans le réel, c'est un secret qui se garde entre personne croyant en l'imaginaire et amené à disparaitre quand il faudra grandir. Avec l'intervention du grand père qui est au courant du pouvoir du shaker et qui offre le shaker au personnage principal, Shaker Monster fait l'exploit d'être un des rares exemple de mauvaise utilisation de ce concept. Si c'est le grand père qui a transmis à son petit fils, pourquoi ne l'a-t-il pas déjà transmis à son fils (père du personnage principal) ? Il y a une embrouille familiale ? Cela peut paraitre bête, mais comment croire en une histoire d'élu et de transmission de pouvoir si la chaine de transmission est aussi faussé ? D'autre part, la série manque de barrières quant à la dangerosité des créatures qui sortent du livre. Souvent, ce sont des créatures qui sont associés à une fonction/possibilité magique, et faute de mettre assez de barrière, le personnage principal a beaucoup trop d'occasion de contourné toutes problématiques liés à ces pouvoirs. Si certains monstres ont des contre-parties, beaucoup n'ont pas de représente pas de réel danger, et c'est souvent une situation arrangeant le scénario qui va pousser le personnage principal à renoncer au pouvoir du monstre qu'il a inventé. Un monstre a une contre-parti ? Celles-ci n'est pas inscrite dans le livre du grand père parce que "facilité scénaristique". Un monstre ne présente aucun risque ? Un Deus ex machina provoquera un coup de vent inattendu qui ferra que la page du livre se tournera pour que le personnage principal lise la mauvaise recette. Un monstre a bien été invoqué et ne provoque pas de catastrophe ? La voisine vient mettre son grain de sel, emmener le monstre sans se justifier en pensant que c'est un objet quelconque et va mal l'utiliser. La voisine n'est pas là et tout va bien ? C'est le monstre accompagnant le héros qui sera jaloux et aura envi de foutre lui même la merde pour faire disparaitre le monstre invoqué par le héros... L'utilisation même du monstre n'est jamais condamné et n'est jamais un danger en lui même. On peut dire que cela vient justifier le fait que le personnage principal ait envi d'utiliser le shaker, car sans risque justifié, mais de l'autre, le personnage principal est montré comme toujours en tord et dépassé par le pouvoir du shaker, ce qui amène deux questions: Pourquoi le grand père lui a confié le shaker, et pourquoi continue-t-il a l'utiliser si tous ces essaies sont amenés à échouer par manque de maitrise ? Tout cela amène des réflexions mal placés sur ce qui se veut comme une série familiale sans prétentions, à vouloir rester dans un statu quo que l'on ne veut même pas prendre le soin de cacher, et conduit à mon plus gros problème avec cette série: Le propos de fond de la série est plus que limites.
Les catch them all ont longtemps eu une période de vide après l'avènement de Pokémon, et si des séries et gammes de jouets ont tentés de proposer autre chose (comme Yu Gi Oh, Digimon, Dinosaure King, Linus et Boom ou Monster Buster Club dans une certaine marge), Pokémon a su viser juste d'entré en rendant évident des codes et des règles à respecter si l'on veut proposer un bestiaire de créature fantastiques côtoyant des humains. La raison étant que la confrontation de différents univers appelle un propos de fond sur le rapport de force qui peut rythmer la rencontre entre populations différentes, et qu'il faut éviter de sous entendre des idées de supériorité ou de domination d'une population. Ce n'est pas un hasard si Sacha parle de l'amour des Pokémon, ou que l'on évoque "l'âme des cartes". Malheureusement Shaker Monster tombe les deux pieds dans tous les travers d'une série Catch them all mal pensé. L'égoïsme du personnage principal (devant caractériser le personnage comme un gentil) devient très vite un défaut car utilisé pour justifier l'exploitation de monstres qui n'existent que pour servir les envies d'un personnage paraissant plus détestable qu'il ne l'est. La principale beauté de la série, qui fait son côté fantastique, perd toute possibilité de personnalité, et ne sont exploité que pour leurs fonctions plus que leurs possibilités de fantaisie. Concrètement, chaque épisode peut se résumer en une série de tranche de vie où le héros veut quelque chose, exploite un monstre qui ne sera pas développer autrement que par son pouvoir et sa praticité pour le personnage principal, et les retournements de situation feront que la série ira là où la série voudra aller sans une seule once de prise de risque, ni même de compte à rendre car ne développant ni l'univers, ne faisant pas évoluer les personnages qui sont condamné à rester les mêmes. Les seuls moments de fantaisies et de divertissements sont conditionnés par une volonté de suivre une route beaucoup trop prévisible et lice, et on s'emmerde à attendre un peu de fantaisie qui ferrait dynamiser l'ensemble, alors que la réalisation prête à penser que l'on aura un semblant de dynamisme. Je sauverais tout de même le personnage de Gwen qui, de par sa posture rationnelle et réfractaire à tout utilisation de monstre, vient pour être une forme de raison et d'intelligence face à un univers rythmé par les choix artistiques réalisés par nécessités plus que pour une réelle volonté créative.
Faute d'être détestable ou même foncièrement mauvais, Shaker Monster se révèle surtout beaucoup trop cantonné à la nécessité de remplir un cahier des charges télévisuel et marketing plutôt qu'à la nécessité d'offrir quelque chose d'innovant et divertissant pour le jeune public... chose qui semble pourtant être l'objectif recherché.
9,5/20
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