Le mythe, revu et... massacré!
Certes, seulement 4 épisodes ont été diffusés aux États-Unis à l'heure de la rédaction de la présente critique, mais il est rare (pas impossible, mais rare) qu'une série ayant raté son introduction se relève. Et ce ne sont sûrement pas les quelques critiques amateurs (ou professionnels) formatés à la mauvaise soupe industrielle américaine ou la promesse si précoce d'une saison 2 qui vont infléchir mon jugement...
On pourra néanmoins commencer par les quelques points positifs...
La prestation de Tom Mison est séduisante sans être non plus exceptionnelle, les autres comédiens parvenant à suivre plus ou moins mais étant qualitativement dépendant de l'écriture de leurs personnages respectifs... Visuellement, un certain effort a été accordé pour avoir un résultat de qualité mais qui n'est pas transcendant pour autant: la photo est propre (sans plus), les effets visuels tiennent la route, le tout étant teinté d'une volonté esthétisante. Toutefois, la prise de risque reste minime, ce qui est bien dommage avec un sujet qui se prête bien à l'originalité visuelle (cadrages, ambiances, rendu).
Ceci étant acté, passons aux aspects qui fâchent...
Le pilot, qui se doit normalement d'être un moment fort de séduction pour accrocher le spectateur est raté au possible et préfigure également des ratés à venir.
Tout d'abord, la mise en place des personnages et de leur psychologie est particulièrement expéditive ; l'aspect le plus révélateur de ce raté concerne Ichabod Crane. En effet, ce personnage, pourtant central, propulsé de la fin des années 1770 à notre époque, ne semble guère déstabilisé par notre monde moderne: hormis quelques "pitites" confrontations anachroniques très survolées entre Crane et son nouvel environnement, il semble parfaitement s'y adapter. On lui parle avec un anglais actuel et il n'a aucune difficulté à comprendre les expressions d'aujourd'hui (les autres personnages ne font d'ailleurs pas le moindre effort pour se forcer de façon visible pour le spectateur (et Crane) à employer des tournures plus "simplifiées" face à un personnage qui de toute évidence ne peut comprendre un vocabulaire courant moderne souvent teinté de références contemporaines et techniques).
Autre exemple, il ne fait preuve d'aucune curiosité pour son nouvel environnement, en particulier technologique, et se contente basiquement d'appeler les choses par des expressions à lui sans jamais s'étonner ou demander des explications développées qui seraient l'occasion d'avoir des petites scènes de dialogues cocasses et humoristiques... De plus, pour l'évolution même du personnage, se passer d'une adaptation progressive et bien écrite, est un impair lourd compte tenu de la trame: au final, on se dit presque qu'il n'y a aucun intérêt à avoir fait voyager ce personnage dans le temps.
Dernier aspect sur la négligence des auteurs envers une judicieuse gestion des anachronismes est la capacité de surenchérissement typiquement "à l'américaine" qui tend vers le grotesque le plus insipide et pathétique qui soit: en outre, le cavalier sans tête, lui aussi propulsé à notre époque, ne perd pas une seconde pour lui aussi s'adapter à son nouvel environnement et qui, au bout de seulement 30 minutes de pilote a troqué sa hache pour la panoplie du parfait John Rambo... Le cavalier sans tête ne décapite plus ses victimes, il les plombe lourdement... Chercher l'erreur... Des personnages donc mal écrits et sans véritable originalité, tombant vite dans les clichés de personnages peu/mal développés. Et les errances d'écritures ne s'arrêtent pas là.
Venons-en aux tenants et aux aboutissants développés dans ces quatre premiers épisodes. Si la légende du cavalier sans tête pouvait se révéler un peu limitée pour baser toute une série dessus, les choix scénaristiques qui ont été faits poussent à sortir largement du simple cadre de cette légende qui s'en trouve totalement dénaturée. Ainsi, les auteurs sont des abonnés du "pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué" ; on passe donc d'un cavalier maudit décapitant à tout va à un complot planétaire humano-démoniaque mélangeant toutes sortes de mythes chrétiens et païens et conduisant -suspeeeeeeennnnnnnsssss- à l'Apocalypse sur Terre... Triste, pathétique, navrant?!
Définitivement, les Américains sont capables du meilleur comme du pire ; il faudrait que les scénaristes et les producteurs comprennent une bonne fois pour toutes que la surenchère de n'importe quoi et le manque (qui a dit paresse?!) de nuance et de profondeur dans l'écriture ne sont pas synonymes de qualité et/ou de succès...