Il faisait froid à Times Square cet hiver, alors que nous faisions la queue pour acheter des tickets pour une comédie musicale. Tout autour de nous, des écrans géants, des taxis jaunes, des publicités pour des films ou des boissons. Du bruit. Du monde. Le tournis. Et puis sur une affiche juste en face de nous, Angelica Huston et Debra Messing. Assez pour susciter ma curiosité et me demander ce que peut bien être Smash. "Stars are not born, they're made" proclame l'affiche. Ma moitié, familier de ma connaissance encyclopédique de la télévision me demande si je connais et s'étonne de mon ignorance. Profitant d'un instant Starbucks, je procède à une recherche rapide sur Internet.
Smash repose sur une idée tellement simple que c'est à se demander pourquoi il a fallu attendre 2012 pour voir une série pareille. Smash raconte comment sont faites les comédies musicales. Ici, c'est une comédie musicale sur Marilyn Monroe. Les personnages sont les auteur, parolier, compositeur, chorégraphe, producteur et acteurs / danceurs et leurs conjoints respectifs. En ce sens, Smash ressemble à ces séries d'ensemble avec des médecins / policiers ou autres. Sauf que pour une fois, c'est un sujet assez neuf et donc intéressant. Smash n'est pas focalisé uniquement autour de la comédie musicale - même si c'est un pan important - on aura donc droit aux poncifs habituels de la série américaine avec divorce, adultère, histoires d'amours et tout le toutim.
Bien sûr, la série est une réponse à Glee puisque c'est musical et que ça chante à tour de bras. Maintenant, les chansons sont à priori mieux amenées puisqu'elles sont intégrées à l'histoire. On est confrontés à un mix entre chansons originales et reprises. Les chansons originales sont particulièrement intéressantes puisqu'elles sont celles qui font partie de la comédie musicale. En plus de ça, elles ne sont pas mal du tout et ont un petit goût de Broadway. En somme, elles sont très au niveau et il ne serait pas étonnant que si le succès de la série soit au rendez-vous, on finisse par voir débarquer une vraie comédie musicale. Ce n'est pas si idiot, Glee a bien débouché sur une tournée et un film en 3D. Pour le moment, Smash a le bon goût de ne pas s'abandonner aux sirènes du mercantilisme. Ce n'est sans doute qu'une question de temps. Les albums de séries télé se vendent souvent bien - je peux confesser en avoir acheté (oui, oui, acheté) des tas - et la musique est ici subtilement répétée. L'expression de "Glee pour adultes" ne rend pas justice à Smash qui est une série bien écrite avec de la musique dedans, laquelle est au service de l'histoire et non le contraire.
La comédie musicale n'en est encore qu'au stade de l'atelier - elle est toujours en cours d'écriture. Les numéros changent de place, sont encore en transition. Voir les auteurs hésiter, se demander s'ils ont vraiment besoin d'acteurs mâles dans le spectacle est sans doute la partie la plus amusante et intéressante de la série. La question cruciale de qui jouera Marilyn est réglée à la fin du pilote en deux parties, mais rien n'est encore joué pour autant. Qui de l'actrice blonde et qui a de la bouteille mais en fait un peu trop (doux euphémisme) et de la gentille serveuse brune, débutante, un peu péquenaude, talentueuse et avec un copain aimant (et anglais) décrochera le rôle ? La productrice (jouée par Angelica Huston) parviendra-t-elle à lever les fonds pour financer le spectacle alors qu'elle est au milieu d'un divorce qui s'annonce tempétueux ? Le chorégraphe (anglais lui aussi) couchera-t-il avec toutes les actrices ? Les histoires sentimentales du duo d'auteurs rejailliront-elles sur l'écriture du livret ? Toutes ces questions trouveront sûrement une réponse et les inévitables rebondissements qui émailleront la première saison se chargeront de porter l'intrigue.
La série a un potentiel assez considérable et le simple fait de l'avoir nommée Smash et pas Marilyn (ou Norma Jean) en est la preuve. La seconde saison (si il y en a une) pourra raconter tout autre chose, peut être une autre comédie musicale, peut être autre chose. Avec des producteurs prestigieux derrière la bête (Steven Spielberg tout de même), on se dit que la série peut aller loin. Pour le moment c'est bien fait mais sans surprise. Le sujet est original, le traitement ne l'est pas.
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