Voilà une série développée par le pôle de création fiction de France Télévisions qui interpelle.Speakerine a l’audace de reconstituer les coulisses de l’ORTF tout en développant une intrigue autour de parties fines au plus sommet de l’Etat.Cette matière dense permet de revisiter la société française de 1962 ,encore sous de Gaulle,mais aussi de désacraliser un appareil d’état en apparence vertueux,irréprochable.Marie Gillain et Guillaume de Tonquédec sont à la tête d’une distribution faite de vieux briscards et de jeunes pousses.Le jeu est bon,le rythme plaisant et cette division en six épisodes idéale pour livrer une exposition documentée et multiple par ses points de vue( l’univers de la télévision,les coulisses du pouvoir mais aussi la vie de famille des personnages principaux).Les deux premiers épisodes sont plutôt convaincants pour que le spectateur ait envie de voir la suite et jusqu’où l’action va aller.Speakerine,en proposant une enquête prometteuse dans un background riche (car on a le recul suffisant sur l’époque pour l’appréhender) s’avère être la première bonne surprise de ce printemps 2018.L’action s’accélère dès le troisième épisode et il est intéressant de voir évoluer les proches de Christine.La speakerine ne voulant plus faire de figuration dans son travail et sa vie commence à se heurter aux mœurs et à l’intelligentsia.Le final promet car on est curieux de voir qui finira par perdre des plumes dans cette sarabande désenchantée.Les deux derniers épisodes en multipliant toujours les points de vue finissent par ne pas aller au bout des choses.La showrunner de Speakerine a préféré le destin de Christine Beauval et de sa famille alors que la série partait sur ce scandale des parties fines organisées par Darney pour les hommes de pouvoir.C’est là que le propos dévie et que la volonté de Christine Beauval de se réaliser sur son talk show pour femmes prend une place trop importante.En faire aussi une passionaria prenant tout le malheur du monde sur ses épaules, de jongler avec sa vie de famille chaotique,est un peu too much.L’épilogue « trois mois plus tard » synthétise sur le devenir de la fille enceinte,du mari et de Christine Beauval donc.Pourquoi éluder l’amant qui a encouragé la speakerine à se réaliser et ce fils victime des manœuvres de l’OAS,parti du jour au lendemain pour la légion? Des choix qui interrogent à défaut de convaincre.La vraie surprise,c’est Barbara Probst,dans le rôle de la speakerine arriviste qui ira aux pires extrémités pour réaliser son fantasme de remplacer Christine Beauval sur la scène médiatique.C’est le seul personnage qui surprend car sa folie prend le pouvoir dans les derniers mouvements de Speakerine.Au final,bien filmée et jouée,la série a du mal à choisir le bon angle car ses personnages deviennent plus importants que l’intrigue. Et ce défaut manifeste a gâché tout le bien qu’on pouvait penser de Speakerine.Quel dommage!