Il est difficile de conseiller le documentaire Squeezie : Merci Internet à une personne ignorant qui est Lucas Hauchard tant la relation du vidéaste à sa communauté est intime et précieuse.

En France, là où les baby-boomers avaient Johnny et la Gen X avait Dorothé, les millennials et la Gen Z ont Squeezie.

Emblème par excellence de l'internet francophone et de toute l'étendue de l'impact du monde virtuel sur le monde réel, Squeezie a su s'imposer dans le premier quart du XXIe siècle comme le créateur de contenu le plus régulier, divertissant, innovant, influent et attachant du pays.

Et il n'est pas aisé de mettre à l'écran en seulement 5 épisodes de 45 minutes l'entièreté de la vie de celui qui, à seulement 27 ans, en a déjà vécu mille.

La série de Théodore Bonnet (réalisateur presque attitré de Squeezie, devenu un ami proche) tente donc de retracer la genèse du plus gros youtubeur français en passant de ses débuts solitaires et précaires à son premier million, de sa collaboration enrichissante avec Cyprien à sa première signature de contrat avec une grande société, de l'amateurisme vidéo-ludique au sérieux professionnel, des vidéos seul dans sa chambre aux énormes productions. On entre dans l'intime du protagoniste où nous découvrons son quotidien beaucoup trop surchargé et dynamique qui pèse lourd sur ses épaules au point de n'avoir jamais connu ni soirées, ni boîtes de nuit, ni (réelles) vacances, ni amitiés durables si ce n'est celle de son grand frère .

Le divertissement à échelle nationale a un prix.

Mais Squeezie : Merci Internet ne se limite pas seulement à une biographie, c'est une véritable analyse du conflit intergénérationel qui oppose des jeunes nés au millieu d'un monde qui se digitalise de manière exponentielle à des parents sur-passés, dans l'incompréhension et la peur la plus totale pour l'avenir de leurs enfants.

C'est un marqueur temporel qui grave à l'écran les caractéristiques de la génération actuelle : un idiome qui change (les serrages de mains deviennent des "tape-m'en cinq", l'utilisation des "Tu vois" et "Quoi" en guise de ponctuation verbale, la diminution numérique du vocabulaire,...), des mœurs qui progressent (l'externalisation des problèmes sociétaux et la transparence sur la véracité des accusations d'agressions sexuelles) et des us et coutumes qui tendent à la sédentarité (principalement cette tendance casanière des jeunes préférant rester chez eux à jouer aux jeux vidéos plutôt que sortir dehors au grand air).

Le seul vrai point négatif que je reproche à la série est de se répéter trop souvent sur l'idée de la complexité du métier de youtubeur afin de créer un lien logique avec chaque nouvel épisode. Le nombre de documents recueillis est conséquent certes mais pour ne pas donner l'impression de juste les balancer chacun leur tour de façon anecdotique il aurait peut être fallu employer une narration plus construite en parties distinguables.

Pour ceux qui ne comprendraient pas le phénomène Squeezie, il faut s'ouvrir suffisamment l'esprit au point d'être capable de le comparer à un Elvis Presley, un John Ford, une Céline Dion ou un Jean Gabin. En bref, une icône (multi)générationnelle adulée et prise en exemple par des millions des jeunes plongés dans une douce idolâtrie à qui l'on permet, par le divertissement et l'impressionant, de rêver encore plus grand.

PabloEscrobar
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le 21 janv. 2024

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PabloEscrobar

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