Cette série documentaire de 4 épisodes m’ai laissé sur ma faim. Elle retrace minutieusement les crimes atroces commis à Leeds et dans sa région de 1975 à 1981 par un tueur que la presse va surnommer « L’éventreur du Yorkshire », traçant un lien un peu trop facile entre ce tueur sanguinaire (13 victimes recensées officiellement) et le tueur de l’East End londonien en 1888, surnommé « Jack the Ripper ». Pour la police, le lien devient évident et ils ne suivent plus que cette piste : cet éventreur ne tue que des prostituées du quartier chaud de Leeds, à l’arme blanche après les avoir assommées ; il est motivé par la haine de ces péripatéticiennes et donc, ce constat fait, les femmes qui ne vendent pas leur corps ne risquent rien…Et quand une jeune femme qui n’est qu’une employée parfaitement classique se fait tuer, eh bien, c’est que le tueur l’a prise pour une prostituée ! Les indices matériels s’accumulent pourtant (traces de semelles, de sang, d’empreinte, traces de pneus…) mais la police n’en fait rien. Elle s’obstine à suivre par contre la piste de lettres anonymes copiant le style de celles de Jack l’éventreur et d’un enregistrement audio qui se sont révélé de gros canulars. Les moyens déployés en homme comme en matériel ont pourtant été colossaux. C’est le terrible constat final de cette série : le tueur, Peter Sutcliffe, se fait arrêter par hasard par 2 policiers, en compagnie d’une prostituée qui aurait pu être sa 14e victime. Tout au long des 5 ans et demi d’enquête, cet homme menant une vie en apparence normale a été entendu pas de moins de 9 fois par la police ! C’est un gros coup de chance de la police et un terrible ratage vu le nombre de femmes assassinées, les chefs de la police du Yorshire ayant persisté dans leurs erreurs…
Sutcliffe, reconnu responsable de ses actes lors de son procès, affirme cependant avoir entendu la voix de Dieu lui disant de tuer ces prostituées et il a été condamné à 30 ans de réclusion. Mais il a réussi à se faire interner dans un hôpital psychiatrique de haute sécurité. Le point positif de cette série est indéniablement le contexte socio-économique de la Grande Bretagne et ses centres industriels dans les années 1970 qui est très bien rendu : la désindustrialisation, le chômage et une misère qui se généralise. Leeds et ses environs apparaissent bien comme des villes sinistrées, rongées par les terrains vagues, usines abandonnées et une pauvreté massive. 2 défauts malheureusement dans ce documentaire. Il est d’abord trop long avec des témoignages plus ou moins intéressants de policiers, journalistes et survivantes de Sutcliffe. Ensuite, et ça c’est plus gênant, en se focalisant uniquement sur les victimes, on ne sait à la fin presque rien de Sutcliffe, juste qu’il est chauffeur routier et marié ! Quel est son parcours pour en arriver à de telles abominations ? On n’en saura rien. Seul son père témoigne en 1981 et ça n’apporte rien, se contentant d’affirmer que son fils reste son fils…
Sa femme est à peine évoquée et pourtant, elle l’a soutenu jusqu’au bout, on peut alors se poser des questions légitimes : était-elle au courant ou au moins avait-elle des doutes sur celui qui partageait sa vie ? Là aussi, c’est le grand vide. On le sait, les tueurs en série sont de grands manipulateurs, capables de passer tout à fait inaperçus dans la vie courante mais il me semble tout de même que toutes ces questions (et même d’autres) auraient dû être posées. Sutcliffe a fini dans une unité psychiatrique de haute sécurité, sans possibilité de remise en liberté. Il y est mort en 2020 à 74 ans. Il est évident qu’il a fait d’autres victimes avant 1975 ; en détention, il n’a voulu reconnaître que 2 agressions supplémentaires et pour les enquêteurs, il y en a sans doute eu bien plus. Mais ils n’ont pas voulu pousser plus loin puisqu’il était déjà condamné à la peine maximale. Ma note juste moyenne s’explique par ces points faibles.