Partout sur le web, on s’excite : le Shonda nouveau est arrivé ! Les ménagères piaillent et les publicitaires trépignent : va-t-on assister à la naissance d’un nouveau phénomène ? The Catch, c’est son nom, a en effet pris la suite de How to get away with murder dans la grille des programmes d’ABC pour pérenniser le triptyque des jeudi soirs américains (avec Grey’s Anatomy et Scandal).
Le pitch est simple et efficace : Alice, investigatrice de choc pour une boite classieuse de détectives privés, se fait elle-même entuber par son fiancé, un arnaqueur hors-pair qui lui subtilise ses économies et les données confidentielles de ses clients. Dès lors, elle n’a plus qu’une ambition : le retrouver et lui faire payer. Commence alors un jeu du chat et de la souris, mais c’était sans compter - surprise ! - les sentiments des anciens tourtereaux …
Au premier abord, on retrouve tous les ingrédients d’une classique production Shondaland :
✓ un personnage principal féminin fort et charismatique (Mireille Enos est la star incontestée de la série avec pas mal de prestance),
✓ un gimmick visuel (ici des effets de reflets sur les paysages urbains qui se fondent), comme l’effet photo de Scandal ou les flashbacks d’How to get away with murder,
✓ la thématique de l’infidèle (comme le furent Derek Shepherd, le président Fitz ou Sam Keating),
✓ le côté glamour du lieu de travail,
✓ les seconds couteaux aux personnalités facilement reconnaissables (la gentille ingénue, la meilleure pote grande gueule, le séducteur, tout ça tout ça …).
… Mais comme pour HTGAWM, la créatrice star du petit écran outre-Atlantique se contente de produire - et c’est une différence de taille. Car si on prend plaisir à regarder la série, plutôt bien ficelée au demeurant, il manque une trame narrative qui nous fasse revenir chaque semaine avec envie et - surtout ! - un vrai sens de la surprise. On a facilement une petite idée de comment tout cela va se terminer, et de qui va finir avec qui. Inattendu, où es-tu ?
La gentille Alice, en dépit de ses qualités, n’a pas encore l’intensité dramatique d’une Olivia Pope, d’une Annalise Keating ou d’une Cristina Yang. Les seconds rôles peinent à arracher cinq minutes à l’écran et à développer une once de personnalité. C’est encore trop doux et prudent : il n’y a pas de danger imminent, de mystère trop épais pour nous empêcher de dormir ou d’enjeu à nous en faire tomber la mâchoire. The Catch ne prend pas assez de risque et se contente trop de ses acquis.
Ce qui fonctionne, en revanche, c’est la dynamique des amants séparés : on croit sans peine à ces Roméo et Juliette 2016, déchirés par des ambitions et des appartenances diamétralement opposées. Merci à Peter Krause (qui avait fait ses preuves dans Six Feet Under notamment) et Mireille Enos, qui semblent avoir une vraie alchimie. On prend plaisir à les voir se détester et se chercher, et être irrésistiblement attirés l'un vers l'autre en dépit des forces contraires auxquelles ils répondent.
Ce n’est cependant que le début, et en grand optimiste, j’ai bon espoir que la série trouve son rythme de croisière et gagne en ampleur. Les enquêtes hebdomadaires, qui se déroulent en parallèle de l’intrigue principale, devront cependant passer la seconde pour glaner davantage mon intérêt, et il faudra me faire apprécier les collègues d’Alice, pour l’instant encore trop dans l’ombre. Avec un peu de chance, d’ici quelques épisodes, je reviendrai lire cette critique, la queue entre les jambes, les bras ballants, en argumentant que la série m’a retourné le cerveau et que The Catch mérite son nom catch-y.