Il est impossible de deviner vers quoi la nouvelle série d'animation de Pendleton Ward compte se diriger en ne visionnant que sa bande-annonce ne laissant présager qu'un vague trip hallucinatoire vraisemblablement alimenté par une consommation excessive de substances à usage récréatif.
Un titre cryptique semblant être choisi au hasard donnant son nom à l'émission du protagoniste, "spacecaster" de métier, aux voyages psychédéliques de ce dernier dans des univers aux formes abstraites pétaradantes de couleur, The Midnight Gospel parait n'avoir aucun sens logique dans sa démarche.
Pourtant, la série n'attend pas pour nous faire savoir à quel point sa forme est non-seulement très structurée et que l'âme qui l'alimente n'en es pas moins très spéciale.
La série nous met à la place de témoin dans les excursions de notre héros, Clancy Gilroy, irresponsable heureux voyageant dans des univers alternatifs simulés par ordinateur pour interviewer des invités trouvés au hasard. Le tout se faisant sur l'exploration étrangement sereine de ces mondes avant leur implosion apocalyptique.
Par ces interviews surprenamment profondes au vu du caractère immature de notre héros, Pendelton Ward et Duncan Trussell (s'incarnant lui-même en Clancy) font explorer et questionner aux spectateurs des thèmes très variés tels que la drogue, le sens de la vie, la connexion entre êtres illuminés et la mort.
Je fus surpris après les 8 épisodes. Je me demandais pourquoi les très longues entrevues entre Clancy et ses invités étaient aussi aussi détachées des situations qui les entourait tout en étant pourtant si authentiques dans leur franc parlé à la fois instructif et émotif. Je me suis rendu compte que, ignare que je suis, je ne m'étais pas renseigné sur l'origine de production de The Midnight Gospel. Ce qui fut néanmoins une bonne chose quand je vis le dernier épisode qui eu l'effet d'une baffe bien sentie tant le virage inattendu donne un tout nouveau point de vue sur l'état d'esprit qui a mené à sa création.
Car The Midnight Gospel est en réalité une adaptation - voire une transposition - des véritables interviews de Duncan Trussell dans son podcast "Duncan Trussell Family Hour" directement utilisées dans la totalité des épisodes. Ce qui enduit la série d'une vérité impossible à reproduire, les échanges entre Clancy et ses intervenants ne sont pas joués, elles sont véritables.
Le travail sur l'animation de Pendleton Ward devient ainsi une nouvelle ligne narrative pour mettre en scène les longues heures de dialogues d'un épisode, soulignant sa thématique, se comparant et parfois même en le contrastant, donnant de multiples formes visibles à ce que nous entendons. Une simple conversation sur le deuil devient un parallèle avec un cycle éternel de destruction et création dans la mécanique cosmique de l'univers.
Le dernier épisode est une recontextualisation optimale de tout ce qui avait été exploré.
Entre continuité amère et virage de propos, nous montrant un Clancy ayant toujours détourné le regard de ses problèmes être cette fois obligé de faire face à l'événement traumatisant responsable de son immaturité. Mettant en scène son interview avec sa défunte mère alors aux portes de la mort dans une répétition poétique de décès et de naissance, de création et de destruction à une échelle à la fois intime et universelle.
Un épisode dont la morbidité fait briller toute la beauté de cet échange qui fait passer The Midnight Gospel de série d'étalages philosophiques à récit de rédemption profondément meurtri tant pour Trussell que pour son alter-ego.
Une série en apparence irrévérencieuse où le non-sens embrasse la perte de valeur et le nihilisme tant l'existence paraît vaine avant la fin du monde. Mais le contact de notre héros avec l'expérience de ses invités élève son âme. Lui rappelant de vivre l'instant présent et au spectateur que la sérénité est toujours ce qui suit après le fond du trou, après le quart d'heure sympa de l'Apocalypse.