Ca fait rire, mais ça fait mal aussi
The trip est une mini série britannique atypique: deux anglais dans un road trip afin de critiquer des restaurants réputés. On retrouve pour l'occasion le duo Coogan - Brydon toujours en forme ; en effet, l'alchimie entre les deux acteurs passe toujours aussi adéquatement bien.
Le projet est un peu une sorte de suite de l'adaptation du livre de Laurence Sterne par le même Winterbottom : on reprend les thèmes, on reprend les personnages, le contexte est un peu différent, la mise en abîme moins évidente. Mais c'est bien toujours de la crise de vie dont on parle. Pas juste de la crise du quarantenaire ou de celle du cinquantenaire... juste une crise de vie, un doute qui peut nous assiéger à tout moment, simplement parce que, dans la vie, rien n'est acquis. Ainsi, Steve Coogan se joue au bord de la dépression, en plein désarroi face à une carrière qui n'aura jamais décolé comme il l'aurait souhaité. En face de lui, un Brydon qui s'est résigné à son sort et est probablement heureux de ce qu'il possède à ce jour mais dont certains vestiges de son ambition passée refont surface à quelques funestes occasions.
Le format est idéal. J'ai du mal à m'imaginer cette même histoire en film. Il y a trop de redondance pour que ça fonctionne autrement. Ici cette répétition de dégustations ou de conversations (toujorus ces imitations) fonctionne et structure l'épisode comme une étape. La coupure est donc nécessaire. Ce qui est étonnant dans l'écriture, c'est à quel point la tristesse est rarement abordée frontalement. Au contraire, au premier degré il en ressort une comédie, c'est vraiment dans le creux des mots qu'il est permis d'entrevoir le désespoir humain. La musique piano (un peu facile je l'accorde) aide aussi à cet effet.
Le ton est très spontané et tréaliste, certainement grâce à une grande liberté de dialogues pour les comédiens qui ont certainement pu s'adonner à l'improvisation à plusieurs reprises. Tous les dialogues semblent couler de source; il faut saluer le travail de montage à cet effet, tant il parvient à clarifier tout en dynamisant l'histoire. Les digressions, comme dans Tristram Shandy, sont constantes et pourtant semblent apporter un petit plus à l'histoire, à la thématique. La mise en scène est très sur le vif, captant le moindre tic, le moindre souffle. Le réalisateur nous invite carrément à prendre part au repas.
Autre point intéressant, Winterbottom ajoute un aspect documentaire apportant de la respiration au propos qui aurait pu s'avérer lourdingue. Ainsi, dès qu'il le peut, il nous montre les cuisines, la préparation d'un repas, mais aussi les différents paysages de cette vieille Angleterre. Une totale digression? Je ne l'ai pas ressenti de la sorte; en effet tout semble faire écho à ce qu'il se passe dans la tête de Steve Coogan. Rester jeune et ambitieux ou bien accepter de vieillir et surtout accepter de n'avoir aps pu accomplir tous ses rêves.
The trip est une série parfaitement menée. le seul reproche serait cette utilisation facile de la musique. Ce qui me fait peur, outre le fait qu'il y ait un film remonté à partir des épisodes, c'est que le réalisateur veuille réaliser une nouvelle saison de ce périple. J'ai un peu peur que ça en fasse que répéter ce qui a été dit au travers de la première saison et du film "Tournage dans un jardin anglais". Nous verrons.