Déception
Je comprends pas. On sent le souhait de faire une série esthétique, réflexive et voulant installer une narration propre, parallèle du roman. On sent le souhait. Mais c'est comme beaucoup de choses,...
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le 5 juil. 2021
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Cora, une esclave dans les USA d'avant la guerre de sécession (ou bien elle n'a pas eu lieu?), s'enfuit par une littérale voie ferrée souterraine pour tomber de Charybde en Scylla, coincée dans des variations cauchemardesques de communautés racistes dystopiques - heu, "un arc-en-ciel de rêves américains".
On comprend que le mélange des genres vient du roman, conte horrifique s'inscrivant dans la tradition des calamiteuses aventures des héros de récits picaresques (Quichotte, Simplicissimus) convertis en contes philosophiques (Candide, Gulliver - qui est lu par Caesar, le compagnon de Cora, dans le premier épisode...), passant de la violence réaliste initiale à une ambiance tantôt triviale, tantôt onirique (le souterrain, les limbes de la forêt calcinée).
On se doute que cette forme déprimante suit une logique : nous aider à ressentir l'enfermement dans cette société où chaque issue n'est qu'un mirage, nous donner une idée des ressources infinies de survivants sans espoir de fuite , sur un vaste continent transformé d'une rive à l'autre en prison.
Cette litanie de souffrance et de désespoir monotone (les faux espoirs ne sont jamais rendus crédibles), m'a conduit à l'ennui et à l'indifférence, sous la lourdeur insistante d'une fiction qui enfonce toujours le même clou en enquillant les personnages de racistes calotins donneurs de leçons, et qui après l'atroce violence d'un épisode initial (sorte de "torture porn" qui culmine dans une complaisance rédhibitoire envers la mise en scène macabre d'un esclavagiste), épuise la patience (du spectateur masochiste ou persévérant contre toute raison) à longueur d'épisodes dénués de tension dramatique, ou statiques comme une pièce de théâtre contemporain, et où s'intercalent de temps en temps des plans où des acteurs prennent la pose en portant un regard accusateur sur le public.
Peut-être la société U.S. était-elle axée sur l'esclavage ; U.R. explore les psychologies et les croyances des maîtres de ce monde-là - mais sans l'ironie mordante du cinéma de Tarantino, à vrai dire sans aucun ton ni vision personnels, en filmant platement ces sadiques moralisateurs récitant leur vision du monde dégueulasse (avec les accents et les idiomes de bouseux de l'Amérique profonde venus de Tarantino via le ciné d'exploitation, mais qui ont perdu ici tout leur sel satirique). Les rednecks endimanchés tirant un plaisir pervers à écouter "leurs N." réciter la constitution... Comme le dit un personnage, "Les gens commettent les pires actes lorsqu'ils sont persuadés d'avoir raison" ( et aussi "ils veulent qu'on prospère dans la vision qu'ils ont de nous", etc. ) ... On a compris la leçon, prof.
Je ne demandais pas à U.R. d'être la Petite maison dans la prairie, ni The Good lord bird, ni Zorro. Ces fanatiques ont sévi longtemps sans personne pour leur régler leur compte. Mais je n'ai pas l'endurance de m'asséner ce genre d'histoire à la Rémi sans famille, Poil de carotte, Malheurs en série de Sophie ou d'Eugénie...
On reprochait autrefois aux films cette gageure impossible d'adapter un roman en une heure trente.
U.R. appartient à un courant de feuilletons pour plateformes (netflixx, amaZZZon...) souvent visuellement soignés (quand la caméra ne fixe pas l'obscurité ou le soleil), mais désespérément chiants.
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le 29 août 2024
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