Après une première adaptation en série (polonaise et méconnue) en 2001 puis le succès retentissant des jeux vidéos, la saga littéraire "Le Sorceleur" d'Andrzej Sapkowski se voit offrir en 2019 une nouvelle jeunesse grâce à Netflix qui met la main à la poche pour proposer une première saison narrant les exploits du mutant aux cheveux blancs. Selon plusieurs avis, la série serait très fidèle aux nouvelles de Sapkowski et reflèterai habilement l'univers fantastique imaginé par l'auteur polonais. Adaptant ainsi plusieurs histoires pour composer ces 8 premiers épisodes, la série créée par Lauren Schmidt Hissrich (quelques scénarios pour la TV, première fois showrunner) s'avère un produit de qualité prêt à rivaliser avec feu "Game of Thrones".
Premier point positif : la DA est ahurissante. Photo impeccable, décors époustouflants, costumes réalistes, effets spéciaux d'une rare qualité (dépassant même parfois ceux de blockbusters récents, c'est dire), bestiaire varié et original... On en a pour notre argent. Ce bon vieux Henry Cavill, décrié sur les premières photos promo, s'en sort agréablement en héros-titre, campant un Geralt of Rivia aussi taciturne que torturé, maniant l'épée comme personne tout en charmant les donzelles et baffant son énervant barde de compagnon (Joey Batey, le comic relief raté). Le reste du casting, peu ou pas connu du grand public, s'en sort aussi avec les honneurs sans qu'aucun personne ne vienne concrètement nous imprimer la rétine, hormis peut-être la plantureuse Anya Chalotra, dont le personnage de Yennefer n'est hélas pas le mieux écrit.
Les épisodes sont grosso modo des péripéties sans réel lien avec la précédente, comme des missions pour le tueur de monstres qui va soit retrouver des têtes connues soit en découvrir de nouvelles. Mais là où la série se plante royalement, c'est dans l'écriture et le rythme de sa première saison : débarrassés de toute annotation à l'écran (lieux, époque, etc), on ne sait jamais quand se déroule les différentes intrigues qui se chevauchent de manière incompréhensible, nous faisant délibérément perdre le récit. Même en ayant lu les livres, la mise en scène s'avère brouillonne et aucune temporalité n'est présentée pour que le récit soit agréable à suivre. Manquant cruellement de scènes supplémentaires ou de dialogues suffisant pour lier correctement les trous béants du scénario, la série n'arrive jamais à demeurer constante et ce en dépit d'une action maîtrisée et d'une beauté d'image renversante.
On peut facilement décrocher au bout de quelques épisodes tant les noms de personnages se mêlent sans explications à ceux des villes, tant les personnages passent d'une époque à une autre sans ellipse, tant les dizaines de sauts dans le temps (amenant naturellement à un final dit "surprenant") sont tout bonnement ratés. Décousue, parfois bavarde mais le plus souvent incompréhensible pour les non-initiés, The Witcher manque d'une écriture solide et d'une réalisation du même acabit pour vouloir rivaliser avec l'adaptation des récits de George R. R. Martin qui, malgré sa foule de lieux et personnages, parvenait à demeurer crédible et peu à peu limpide. Une première saison esthétiquement irréprochable mais pas vraiment plaisante à suivre. En espérant une saison 2 moins bordélique.