On attend beaucoup de Top of the Lake en découvrant les premiers épisodes. L'image est superbe, les décors majestueux et l'interprétation convaincante. Mais très vite, les doutes qui pointaient tout de même se confirment et bien au-delà de ce qu'on pouvait imaginer. Car il y a un air de déjà vu ici. On a pu évoquer Twin Peaks mais on est vraiment loin du compte car Top of the Lake, s'il distille au commencement une atmosphère fantastique, sombre rapidement dans la peinture lourdingue d'une société violente et machiste. Quand Twin Peaks, tout en restant mystérieux et effrayant, parvenait à en dire beaucoup plus avec humour et style, Top of the Lake se la joue sérieux. Attention ! Vous allez voir ce que vous allez voir ! Et on ne voit pas grand chose de nouveau. (SPOILER) En réalité on a droit à tout l'arsenal éculé des intrigues policières du genre sulfureux - on peut penser à Mystic River mais on en reste très loin - et dont on devine bien à l'avance les ressorts, mais ils sont tellement énormes et usés que lorsque ce qu'on avait vu venir se confirme sous nos yeux on est atterré par une telle indigence. En vrac : la policière qui revient enquêter sur les lieux où elle avait été violée, sa mère qui souffre d'un cancer, son petit ami qui pourrait bien être son frère, l'homme qu'elle déteste le plus qui pourrait bien être son père, qui pourrait bien être aussi un père incestueux. Et cerise sur le gâteau, le flic local, ambigu, qui pourrait bien être un dangereux pédophile. Et tout ce beau monde dans le même petit bled de Nouvelle-Zélande. Au fond, tout cela passerait si la mise en scène n'était pas aussi pompeuse. L'expression n'a jamais été aussi vraie qu'ici : la montagne accouche d'une souris...
Mais ce n'est pas tout. Ce qui sous-tend la série, ce qui est sa véritable vocation c'est d'être en quelque sorte un manifeste féministe, ou peut-être plus spécifiquement une peinture de la société dans ce point particulier du globe. À priori, très belle idée et d'autres films l'ont fait assez brillamment comme l'Âme des Guerriers par exemple. Or là encore, on sombre dans la caricature. Le sens des nuances ne semble pas être le fort de Jane Campion. Il ne fait pas bon être un homme devant sa camera : aucun personnage masculin ne trouve grâce à ses yeux. Ils sont tous brutaux, alcooliques ou toxicos (et ici c'est visiblement ce qui complète le portrait d'un sale type), stupides ou dégénérés, grégaires, qu'ils soient de la ville ou de la campagne, flics ou voyous. Le petit ami de l'héroïne lui-même est un personnage veule et sans éclat, et peut-être lâche. Restent les femmes et les enfants, tous victimes et seuls récupérables. À noter aussi, la ridicule composition d'Holly Hunter en gourou déjantée, vraisemblablement maquillée par un stagiaire.
On est forcément agacé par le gâchis que représente la mise en œuvre de tant d'énergie et de talents pour aboutir à tant de banalité, se voir confirmer que les méchants sont bien des méchants, sans aucune nuances psychologiques, que l'inceste c'est mal, le viol aussi et la pédophilie n'en parlons pas, enfin si, juste cinq minutes à la fin.
Ce qui étonne le plus en fin de compte, c'est l'incroyable estime dont jouit cette série qui n'apporte vraiment rien de neuf. Restent les paysages.