Cette critique fait suite à un visionnage tout frais de la saison 3, sur laquelle j'ai choisi de me concentrer. Ne cherchez donc pas de corrélation entre la note, qui concerne davantage la série dans son ensemble, et cette critique visant uniquement cette dernière saison.
J'avais passé un bon moment devant les premières saisons, que je n'ai vues pour la première fois que récemment. J'ai trouvé l'intrigue particulièrement intéressante jusqu'à la moitié de saison 2, ce qui correspond à la résolution du meurtre de Laura Palmer. L'histoire s'enlise ensuite dans un ensemble de sous-intrigues sans intérêt. Mention spéciale à la relation James Hurley, qui est déjà sans doute le personnage le plus plus plat de tout Twin Peaks, et sa cougar Evelyn Marsh. Mon dieu que cette partie était nulle. Heureusement la fin de la saison 2 reprend un coup de boost pour finir en beauté, tout en laissant plein de questions en suspend.
L'essence de Twin Peaks, c'est tous ces personnages qui rendent la série vivante. Le bon héros Dale Cooper et sa bonhommie, avec qui on voudrait s'asseoir et discuter pendant des heures, Leland Palmer, le type super gênant qu'on voudrait faire mine de ne pas connaître, Leo ce pourri qu'on aimerait pouvoir baffer, Ben Horne et Catherine Martel les plus gros magouilleurs-conspirateurs de la série, Windom Earle l'antagoniste terrifiant...
Outre ces personnages, il y a aussi l'atmosphère de Twin Peaks, portée par une bonne bande son, quoiqu'un peu répétitive à partir de cette deuxième partie de saison 2, décidemment bien trop longue.
Twin Peaks, enfin, c'est cette mythologie, à laquelle on ne comprend pas toujours tout mais qu'on aime bien quand même.
Qu'en est-il de cette saison 3 ? Le moins que l'on puisse dire c'est que Lynch a repris entièrement en main l'écriture et la réalisation, ce qui n'est vraiment pas pour le meilleur de la série.
Commençons par les protagonistes, d'abord, Laura Dern, alias la botaniste de Jurassic Park, incarne une très charismatique Diane, ancien agent du FBI et ancien contact de Cooper, jamais présentée à l'écran jusque lors. Et si Laura Dern a tous les atouts pour crever l'écran, elle n'est pas vraiment aidée par les dialogues, ni par le script, qui lui impose un personnage ne faisant preuve d'aucune initiative, et ce malgré le tempérament parfois assez irritable de Diane. Pour quelqu'un d'omniprésent dans cette saison, ça représente un sacré gâchis.
Toujours parmi les protagonistes, le trio d'agents du FBI. Le retour de Gordon Cole (incarné par David Lynch himself), et Albert Rosenberg, puis l'arrivée d'une nouvelle Tammy Preston. Tammy qui avait tout pour plaire s'avère beaucoup trop effacée et est reléguée au rang de potiche de service. Albert, auteur de saillies à mourir de rire dans les précédentes saisons semble avoir perdu son humour. Les scènes sur l'appareil auditif de Gordon ne sont pas drôles.
Enfin, Kyle MacLachlan est l'acteur qui brille. Le doppelganger maléfique de Cooper qu'il incarne est impitoyable. Son bon Cooper, quasi muet, est de son côté très touchant (Cooper depuis son retour de la loge perd temporairement la raison). Le problème, c'est qu'on parle quand même du personnage principal et que les errances d'un Cooper en mode légume ça va cinq minutes. Malheureusement, le retour tant attendu du vrai Cooper ne s'opère pas avant l'épisode 16, autrement dit juste avant le final. Cette absence frustrante ne se justifie pas.
Tous ces personnages principaux ont tous l'air plus largués les uns que les autres. En dépit des enquêtes croisées du trio d'agents du FBI, et des policiers de Twin Peaks, l'intrigue n'avance pas.
Parmi les personnages secondaires, on notera la présence (ou caméo) d'acteurs et actrices vraiments convaincants: Tim Roth (Pulp Fiction, Hateful Eight, Reservoir Dogs), Jennifer Jason Leigh (Hateful Eight, The Machinist), le retour de David Duchovny (Fox Mulder dans X-Files), Monica Bellucci, la délicieuse Bérénice Marlohe... Beaucoup d'anciens personnages font également leur retour, pour des apparitions plus ou moins brèves.
Mais cette quantité ne rattrape pas le désastre. Si les protaganistes ont déjà l'air de figurants de l'histoire, alors ces personnages secondaires sont traités dans le jmenfoutisme le plus total. Exemple typique: Steven, un jeune homme au chômage, en manque d'argent, que l'on voit apparaitre deux fois durant quelques minutes... Ce personnage est totalement oublié...et réaparrait en toute fin de saison, manifestement en fuite en pleine forêt, et paniqué (sauf qu'on ignore pourquoi). Il finit par se tirer une balle dans la tête. Tout ça en dix minutes d'apparition sur toute la série. Pourquoi ce personnage ? Pourquoi cette scène ? Mystère.
Le maître mot de cette saison est l'ennui. Les dialogues sont mous, les scènes sont ralenties à un point qu'on lutte pour ne pas s'endormir. Qui plus est, l'intrigue est déportée à Las Vegas et dans le Dakota du sud. Twin Peaks qui ne se déroule plus trop à Twin Peaks, ça n'est plus Twin Peaks.
Je n'ai pas grand chose à dire de la bande son à part qu'elle est généralement inexistante, en dehors des concerts de fin d'épisode, et des quelques thèmes originaux repris une ou deux fois, qui m'ont rappelé que je regardais bien un épisode de Twin Peaks.
Lynch a laissé ses personnages sur la touche, sacrifié son intrigue et l'atmosphère si unique de Twin Peaks pour laisser place à son cinéma expérimental.
Le fameux épisode 8 mélange certaines idées visuelles intéressantes (l'explosion atomique et les instants qui suivent) à des scènes beaucoup moins pertinentes (le barbu dans la radio).
L'esthétique des effets spéciaux est douteuse et dépassée, merci les incrustations dégueu.
Bref, une saison 3 décevante, qui n'a rien du génie tant loué.