Urgences
6.2
Urgences

Série NBC (1994)

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C'est étrange à quel point cette série m'a marqué. J'ai regardé et je regarde un sacré paquet de séries et "Urgences" occupe une place toute particulière dans mon esprit. Tout un tas de souvenirs, le collège, le lycée, toute la famille scotchée dans le salon chaque semaine, tous ces termes médicaux que l'on ne comprend toujours pas aujourd'hui, mais qui nous ont rendus tous un peu plus casse-couilles quand on va a l'hôpital. Longtemps, je n'ai plus osé revoir cette série par peur de m'être fait avoir par la nostalgie.

J'ai eu une immense surprise: j'ai replongé sans aucune difficulté dans la frénésie des "NFS, chimie, iono" et des engueulades entre internes et titulaires (encore une fois, je suis pas sûr de bien comprendre de quoi je parle, mais j'aime bien).

Les débuts de la série datent de 1994, et à part l'absence des téléphones portables, les gros ordinateurs pré-historiques et certains états des progrès de la médecine de l'époque, la série n'a pas vieilli du tout. Tout fonctionne a fond. Il est évident que "Urgences" a connu ce succès sidérant grâce sa réalisation innovante car très dynamique et immersive, ses acteurs pour la plupart très doués et cette adrénaline permanente.

J'avais déjà vu une bonne partie de la série, mais c'est avec un plaisir incroyable qu'on revit l'excitation du Cook County. J'avais oublié l'ambiance des plans tournés en extérieur, et certains épisodes particulièrement marquants comme ce road movie de Greene et Ross à la recherche des vestiges de la vie du père décédé du pédiatre aujourd'hui célèbre pour ses expressos. On notera aussi la formidable performance effectuée pour le season premiere de la saison 4, un épisode tourné et diffusé en direct. (deux fois de suite, pour permettre la diffusion a l'heure exacte sur la côte est et la côte ouest)

Mais ce grand cri d'amour pour LA série médicale a un bémol de taille: il y a eu deux "Urgences". A la louche, les 10 premières saisons se tiennent (un prodige, dans le domaine), mais les 5 dernières n'ont plus grand chose a voir avec les débuts...

D'abord, il y a le casting. Tous ces personnages que l'on a adoré suivre, parce que parfaitement écrits et interprétés, quittent un à un l'hôpital pour laisser la place à des pions lisses et clichés, vides de cette vigueur qui tenait la série. Il ne s'agit pas de refuser l'arrivée de nouvelles têtes, puisque certains nouveaux arrivants ce sont révélés être de vraies réussites. Mais après le départ du Dr Carter, dernier du noyau dur des débuts, les auteurs n'essayent même plus de donner un peu d'épaisseur aux marionnettes en blouse blanche qui défilent devant la camera.
Les ressorts scenaristiques n'y sont plus vraiment, aussi. Chaque cas pouvait être une petite tranche de vie d'une profondeur incroyable, la politique interne de l'hôpital mettait en valeur certaines injustices du système américain et le chemin de vie des membres de l'équipe médicale était bien évidemment passionnant (je ne spoilerai pas pour ceux qui ne sont pas au courant, mais les initiés savent de quoi je parle si j'évoque le destin du Dr Greene). Les anecdotes insolites des urgences de nuit, et les élans plus légers des auteurs deviennent saison après saison des gags tartes et sans saveur.
Pus étrangement, l'hôpital en lui-même change peu à peu, ce qui n'a pas rendu service a l'image et à l'ambiance de la série en général. L'hôpital défraichi et bordélique des débuts laisse petit a petit place à un service des urgences plus aseptisé, moins habité. Le décor des origines servait cette réalisation camera à l'épaule et faisait du Cook County un personnage a part entière. La série a ensuite perdu ce cachet au profit de plus d'espace pour moins de vie.

En fin de compte, la différence fondamentale entre les deux "périodes", c'est que pendant ces débuts mythiques de la série, on voit évoluer à l'écran une équipe de médecins tel qu'on aime les imaginer dans le monde réel. Une équipe de gens engagés dans leur vocation, droits dans leurs bottes et exprimant une profonde sincérité dans leur contact avec le patient. Cette intensité et cette authenticité se retrouve dans l'ensemble des textes. Certains thèmes graves sont traités avec franchise, et paradoxalement, c'est assez réconfortant. C'est pour cela que l'on vit aussi intensément les événements de la vie médicale et de la vie personnelle de l'équipe.
Tout ceci s'efface pour laisser la place a des individus qui se noient dans le verre d'eau de leur vie personnelle tordue (le médecin qui hésite entre la médecine et sa carrière de rockeur, c'est pas possible), a des soignants sans grandes espérances qui confondent affecte et passion. Le spectateur n'est plus concerné, et rejette ces personnages qui n'ont plus de liens avec certains questionnements et angoisses intimes, la santé et la mort.
D'une certaine manière, nous avions établi une sorte de relation de confiance avec ces personnages, la même qu'avec un médecin de famille, et comme des petits vieux à la campagne, les nouveaux docteurs n'ont pas su nous mettre en confiance et nous avons préféré la verveine et le cataplasme moutarde plutôt que de subir des professionnels bancales.

J'avoue franchement, à partir de la saison 11, j'ai regardé jusqu'à la fin pour me dire que j'avais tout vu jusqu'à l'épisode final, qui a connu une audience record lors de sa diffusion aux US grâce à la participation exceptionnelle de tous les "anciens". Un investissement temps considérable, pour 5 saisons de remplissage. (genre, pour des besoins journalistiques, genre) Les téléspectateurs américains ne s'y sont d'ailleurs pas trompés, un passage rapide par la page wikipedia sur la série montre clairement la chute vertigineuse des audiences au fil des années.

Mais n'hésitez pas à revenir dans cet invraisemblable hôpital de Chicago où l'on passe entre la salle d'attente et l'accueil avec un brancard roulant ensanglanté, tout en hurlant que la tête pend sur la colonne vertébrale et qu'il "bradycardise" (toujours pas, hein, pas la moindre idée).

Ross, Carter, Weaver, Greene, Corday, Benton, Attaway, Hanspow... Des heures et des heures de frisson à base "d'ampoule d'adré".

Oui, depuis, il y a eu du renouveau dans le domaine de la série médicale et ce qu'elle avait de révolutionnaire ne nous surprend plus, mais malgré les morts, les drames et les "culots de O neg'" qui giclent, on se sent plutôt bien dans ce service des Urgences...

PBS
8
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le 22 déc. 2010

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PBS

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