Je dois admettre que j’étais à la fois intrigué et sceptique lorsque j’ai entendu parler de ce projet pour la première fois. Faire une nouvelle adaptation de l’univers culte de Dave Gibbons et Alan Moore, œuvre de référence dans le monde des comicbooks dont l’adaptation de Zack Snyder était déjà plus que correcte. L’annonce que l’intrigue se déroulerait dans le futur, comme une suite à l’œuvre originale, n’a fait qu’augmenter cette curiosité jusqu’à l’arrivée de la première bande-annonce qui laissait présager quelque chose de fantastique. Le verdict ? C’est fantastique !
Alors peut-être pas autant que ce que je l’espérais, dans le sens où certains épisodes sont un peu en-dessous des autres et que le début met un peu de temps à se mettre en place. On retrouve assez vite le ton et l’atmosphère de cet univers, mais on reste encore dans le flou quant à savoir où tout cela nous amène et s’intègre dans une continuité globale. D’autant plus que la part de mystère est bien présente, avec beaucoup de questions sans réponse dès le départ, beaucoup de fausses pistes. Puis peu à peu, la série prend son rythme de croisière et monte en puissance jusqu’à son grand final, dans la pure lignée de l’œuvre originelle.
Et comme toute intrigue bien conçue, comme tout bon film à énigme, comme tout bon polar, ce quant toutes les pièces s’emboîtent enfin que le tableau global prend tout son sens et renforçant ainsi tous les épisodes, y compris les premiers, ne donnant qu’une seule envie ; s’y replonger et redécouvrir l’histoire avec cet œil averti.
Si bien sûr la Guerre Froide est terminée, l’intrigue ne délaissera son message sur notre société en affrontant les combats qui gangrènes l’Amérique de l’intérieur depuis des décennies. Des thèmes comme l’héritage, le pouvoir, l’amour, les remords sont au cœur de cette saison qui se révèlera à la hauteur des attentes. L’autre point fort est aussi de ne pas se reposer uniquement sur les personnages de Gibbons et Moore mais de créer une nouvelle génération de personnages, avec leurs forces, leurs faiblesses, leurs valeurs, leurs convictions. Tout autant de nouvelles figures qui prennent le temps de se mettre en place avant de révéler peu à peu leur véritable nature, quand il ne s’agit pas de réinventer certains personnages.
Le casting est excellent. J’ai beaucoup aimé Yahya Abdul-Mateen, dans un rôle qui reste longtemps au second plan mais dont il arrive à en tirer toute la subtilité et la douceur. James Wolk, Tom Mison et Sara Vickers sont tout aussi bons. J’ai beaucoup aimé Tim Blake Nelson et Louis Gosset Jr, ainsi que Hong Chau : chacun parvient à faire quelque chose de son personnage, à le rendre vivant et passionnant. Toutefois, c’est bien le trio Regina King, Jean Smart et Jeremy Irons qui domine cet ensemble : j’ai trouvé chacun au meilleur de sa forme. Smart dans son rôle du Spectre Soyeux cynique et totalement désabusé, Regina King en tant qu’héroïne attachante et forte, et puis Irons qui porte plusieurs scènes à lui tout seul et qui se régalement en tant qu’Ozymandias.
Techniquement, je n’ai rien à reprocher. Oui, il est vrai que les effets spéciaux sont parfois un peu en-dessous compte tenu de ce qu’ils tentent d’illustrer (surtout si on compare au film de Snyder), mais dans l’ensemble, ils fonctionnent plutôt bien. La mise en scène est superbe, avec une photographie excellente à laquelle je n’ai rien à reprocher (les épisodes 6 et 8 sont sublimes). J’ai beaucoup aimé la musique, qui reprend un peu ce que Snyder avait fait, avec l’utilisation d’une bande son efficace entre chansons et morceaux classiques, jouant parfois totalement dans le stéréotype et l’assumant totalement, c’est jouissif. Les décors sont aussi très sympa, notamment l’utilisation qui en est fait et la géographie de la série reste très cohérente avec ce qu’elle établit.
Bref, une première (et unique ?) saison qui se montre à la hauteur des attentes et parvient à exploiter le plein potentiel de son idée. Absolument pas déçu, je me suis régalé de bout en bout, et malgré un départ un peu mou, la seconde partie m’a emballé comme rarement. À voir !