Wayne est un ébouriffant récit initiatique punk sur le passage à l'âge adulte qui réussit le pari de jouer une carte singulière, à savoir celle de n'appartenir à aucun genre en particulier tout en les pillant tous allègrement. Dans ce récit blindé de personnages forts en gueule se débattent des âmes en peine qui mettent un point d'honneur à toujours faire les pires choix possibles.
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S’attendre à trouver dans Wayne une quelconque pertinence des comportements serait une erreur tant tout y est exagéré jusqu’à l’extrême. A commencer par les différentes figures sociétales qui y sont représentées : des parents paumés qui se battent pour s’occuper d’une progéniture qui tente vainement de comprendre le schéma de vie de ses aînés, tout le monde peine à savoir comment mettre un pied devant l'autre de la bonne manière. Sans doute parce qu'il n'y a pas de recette miracle, même si tout le monde clame haut et fort qu’ils ont la solution et que les autres sont dans l'erreur.
Au milieu de tous ces personnages en quête de sens, il y en a un qui se laisse porter par le courant, confiant : un flic irlandais qui emprunte la chemise colorée de Magnum quand il n'hésite pas à l'ôter pour se la jouer Scott Adkins le temps d'une séquence hilarante tout droit sortie de GTA V. Apparemment, la sérénité passe par un voyage mouvementé en Thaïlande, allez savoir.
Wayne c'est avant tout cela, l’alliance nerveux d’un humour caustique constant et d’une violence très premier degré, une farce rock & troll qui prendre bien garde à ne jamais s'arrêter à temps : du burlesque au ridicule, il n'y a qu'un fossé que Shawn Simon ne manque pas de franchir. Tout est bon pour mettre ses personnages dans la lumière avant de faire sonner les guitares. Le bon sens peut, lui, aller se rhabiller.
Et c'est tant mieux, parce que tous ces personnages complètement tarés font du bien. Ces deux frangins en mode Dupont et Dupond, ce fils simplet à la mâchoire d'acier complètement siphonné, ce père au nez ravagé perdu dans une spirale de désespoir depuis que sa femme s'est évaporée, ce proviseur largué qui fait la causette à une stripteaseuse en mangeant ses pilons de poulet, cette mère faussement enjouée qui fabrique des bougies érotiques, j’en passe et des meilleurs, tous ont un petit quelque chose à dire.
Et puis bien sûr, il y a ces deux âmes à part, Del et Wayne, le bonhomme du titre et sa dulcinée.
Elle, pile électrique à l’énergie inépuisable qui ne veut pas des chichis romantiques habituels parce que c'est chiant à mourir, sans toutefois refuser de glisser vers le sentiment amoureux, sous un corps en décomposition, entre deux jurons.
Lui, surdoué du martelage, faussement désintéressé de tout, mais le premier à fuir de la soupape quand il faut scalper du crâne alors qu'on le donne perdant à 20 contre 1 au premier coup de gong. Un véritable sleeper martial le type.
Des échos antonymiques l’un de l'autre, de vrais alter egos en somme. Deux personnages qui doivent beaucoup à leurs interprètes respectifs, chacun trouvant la partition juste, aux frontières du cabotinage.
Une recette détonante dont la mécanique répétitive étonne : dans les premiers instants on se demande si ça fonctionne, puis au bout d'un moment on finit par arrêter de se poser la question pour jubiler sans retenue quand l’apathique au visage d’ange se transforme en Super Saiyan.
On me dira qu’on a déjà vu cette mécanique plus d’une fois à l’écran, et c’est vrai que récemment The End of the F***ing World exploitait à peu près la même formule. Mais il y a quelque chose d’assez indéfinissable qui fait de Wayne une proposition singulière, à commencer par la tenue de l’effort dans l’excès, là où TEOTHW finissait par retomber dans le schéma traditionnel de la complainte sociale.
Pour sûr, beaucoup trouveront le voyage trop peu nuancé, s'agaceront devant tous ces électrons énervés qui passent leur temps à se péter la tronche. Personnellement, c'est cette insolence constante à défier la norme que j'ai trouvée revigorante. Une farouche obsession à pousser les curseurs au-delà de toute raison fait à mon sens de Wayne une série nourrie à la Strychnine décidément pas comme les autres.
Et pour une fois, je me demande si son annulation après une saison ne lui est pas bénéfique. J'ai beau avoir rigolé comme un bêta tout au long du voyage, je ne sais pas si j'aurais voulu du rab. Cette saison se suffit à elle-même, j'ai eu ma dose, j'en sors repu et on ne peut plus satisfait.