Wild Wild Country, le documentaire de 2018 signé Netflix, c’est un peu comme un buffet où le plat principal est la spiritualité et l’accompagnement, un cocktail explosif de scandales, d’amour libre et de conspirations. L’histoire de cette série documentaire est si folle qu’elle semble sortie tout droit de l’imagination d’un scénariste en manque de rebondissements. Pourtant, tout est réel : l’arrivée de Bhagwan Shree Rajneesh et de ses milliers de disciples dans une paisible bourgade de l’Oregon a été l’équivalent de voir un festival de musique psychédélique s’installer au cœur d’un monastère bénédictin.
La série nous immerge dans le monde fascinant et controversé des Rajneeshees, menés par Bhagwan, le gourou au regard hypnotique et aux Rolls Royce plus nombreuses que les entrées de votre agenda. Mais le véritable joyau de cette histoire, c’est Ma Anand Sheela, la bras droit (et poing armé) du maître spirituel. Si l’ego surdimensionné avait un visage, ce serait le sien, prêt à mordre tout opposant comme un chihuahua dopé aux amphétamines.
L’intrigue se déploie avec la lenteur méthodique d’un thriller politique. On voit les tensions monter entre les habitants de la commune religieuse et les locaux de l’Oregon, qui passent rapidement du mode "Qu’est-ce qu’il se passe ?" à "Attrapez vos fourches et vos torches !" La transformation de cette histoire, qui va de la construction d’un paradis spirituel à une guerre d’influence où chaque camp s’accuse de complots hallucinants, est captivante et rend la série difficile à lâcher.
Les épisodes, narrés avec un montage qui mêle témoignages actuels et images d’archives, plongent le spectateur dans un dilemme moral : faut-il applaudir l’audace d’une communauté qui prône la libération de l’esprit, ou frissonner devant les manigances de Sheela qui semble prête à tout pour défendre son royaume, même si cela implique des plans machiavéliques et des conversations téléphoniques où chaque "Bonjour" est une menace voilée ?
Visuellement, Wild Wild Country est un voyage dans les années 70-80, avec des costumes orange qui pourraient rendre jaloux un moine bouddhiste et des fêtes qui semblent tout droit sorties d’une soirée disco en pleine montée de LSD. Le contraste entre la paix proclamée et les dérapages dignes d’un polar est accentué par une bande-son hypnotique et des plans qui capturent la beauté aride de l’Oregon, transformée en théâtre d’une bataille épique.
Mais la série n’est pas sans ses moments où l’on se perd un peu. Parfois, le rythme ralentit et on se retrouve à regarder l’écran en se demandant si tout cela va mener quelque part ou si l’on est juste témoin d’une répétition de drames rocambolesques. Et pour ceux qui n’aiment pas trop s’engager dans des débats éthiques et des témoignages de "J’étais là et laissez-moi vous dire que c’était pire que le pire des soap operas", l’expérience peut sembler un peu longue.
Pourtant, l’attrait principal de Wild Wild Country reste la complexité des personnages. Bhagwan, qui navigue entre l’aura de leader spirituel et l’air indifférent de quelqu’un qui vient de réaliser qu’il n’a plus de batterie sur son téléphone, et Sheela, toujours prête à dégainer une réplique mordante et à jouer des coudes (et des stratégies juridiques) pour rester au sommet. Les anciens disciples, qui témoignent des décennies plus tard, oscillent entre nostalgie douce-amère et regard critique sur leur passé collectif.
En résumé, Wild Wild Country est une plongée dans une histoire aussi bizarre qu’hypnotique, où l’on apprend que l’utopie peut virer au cauchemar à la vitesse d’une secte qui découvre le droit de vote et l’art de la toxine botulique. C’est un rappel que même derrière les discours de paix et de méditation, il y a toujours une histoire de pouvoir, de manipulation, et de sourires trop larges pour être honnêtes. Pour ceux qui aiment les récits où l’absurde tutoie la réalité et où chaque épisode vous laisse penser "Mais... vraiment ?", ce documentaire est une pépite.