Bon, comme à peu près 80% des critiques déjà présentes ici et celles qui ne sont pas encore écrites mais qui tomberont tout autant dans cet écueil, je vais écouter mon instinct le plus grégaire et résumer la chose ainsi "C'est comme Lost Girl mais en beaucoup moins sérieux et par conséquent en beaucoup plus fun". En même temps, la showrunner de la série n'a jamais renié la similarité entre les deux, allant même jusqu'à inviter quelques acteurs en guest star et préciser qu'elle accepterait tous les anciens membres du cast s'ils souhaitent passer faire un coucou. Donc clairement, on ne peut pas passer à côté de la comparaison et comme l'une de mes premières critiques fut à propos de cette brave succube prépubère, je ne peux guère résister à l'envie d'en rajouter une couche.
Alors Wynonna Earp, c'est un série qui parle du personnage éponyme qui, après la mort d'un membre de sa famille découvre qu'elle est en fait l'héritière d'un pétoire datant de la conquête de l'Ouest et qui en plus d'avoir des propriétés magiques, s'accompagne de la nécessité de briser une malédiction qui fait revenir toutes ses victimes sous la forme de démons. Sauf que Wynonna est une irresponsable de première qui préférerait largement boire son propre poids au bar du coin plutôt que d'accomplir la destinée familiale. Cependant comprenant relativement vite que les Revenants ne sont que les sbires de forces et d'entités bien plus destructrices, elle va se mettre en branle non sans avoir toujours sur elle son six coups légendaire, ses grammes d'alcool dans le sang et ses punchlines aussi risibles que stupides.
Globalement, on ne peut pas dire que la série relui par un propos savamment étudié et pertinent car franchement, donnez moi deux pintes et j'aurais pu l'écrire en deux heures. Quand on est habitué depuis bientôt dix ans à regarder des séries d'une ambition inégalée et aux moyens financiers gargantuesques, tomber sur Wynonna Earp donne des envies de fuites méprisantes aux relents d'élitisme. Cela doit être terriblement ennuyant de toujours regarder des séries qui étalent des réflexions politico-sociales à propension anthropologiquement universalistes, non ?
Alors oui pour ceux qui cherchent à se triturer le cerveau en permanence (Ne vous inquiétez pas j'en fait parti dans une certaine mesure), c'est naze, ce n'est absolument pas réfléchi et recherché mais c'est comme ça et ça n'a pas l'ambition d'être plus ou de faire croire que cela le sera, comme le démontre le titre de cette critique qui est la ligne de dialogue de la mise en abîme la plus consciente d'elle même qu'on puisse faire.
"C'est pas parce que c'est de la merde assumée que ça devient bien" s'époumone le lecteur sceptique à qui je ne pourrais décemment donner tort. Effectivement mais reprenons notre comparaison qu'on avait laissé dans le placard deux minutes.
Certes, assumer que ce l'on produit n'est pas incroyablement révolutionnaire et plutôt "débilisant" n'est pas un gage de qualité mais le contraire en revanche est très souvent un gage de médiocrité. Le mot est lâché et j'invoque à nouveau Lost Girl. Si les deux séries sont si allégrement comparées, c'est surtout car la structure scénaristique est similaire: Les deux héroïnes découvrent qu'elles font parties d'un "bigger plan" qui impliquent toutes sortes de créatures fantastiques, de sociétés secrètes et autres malédictions centenaires, sont accompagnées par une sidekick "rigolol" et des types de personnages plutôt communs pour défourailler du méchants à la pelle tout en ponctuant chaque action de punchlines bien senties.
Sauf que pour moi, la grande différence majeure entre les deux c'est que Lost Girl fait tout pour être sérieuse et originale dans sa démarche tout en proposant des épisodes qui deviennent du coup plus malaisants que drôles, ce qui me laisse penser que la série n'a pas été réfléchie pour être un joyeux bordel mais l'est devenu par la sainte force du capilotractage.
Wynonna Earp, c'est le Bagdad du joyeux bordel. Au risque de me répéter pour toi, seul lecteur hypothétiquement assidu de mes critiques, la comédie repose essentiellement sur la manière de la jouer plus que sur la qualité d'écriture, autrement dit bien plus sur l'acteur et son alchimie avec ses collègues que sur les scénaristes. Cependant, j'ajouterai que c'est aussi une question d'intégrité artistique ou d'honnêteté si vous préférez. Je ferais une analogie avec la Web-série française Noob qui a ses débuts était cinématographiquement mauvaise mais que je trouvais formidable parce que tout transpirait la passion et l'envie presque enfantine de s'inventer des histoires et des univers dans lesquels jouer. Bien sûr que visuellement tout était à la ramasse mais cela se voit comme le nez en plein milieu de la tronche qu'ils faisaient ce que bon leur semblait et avec enthousiasme. Rien que pour ça, j'accepte de me faire entraîner dans tous ce qui est fait de blagues parfois lourdes et forcées alors qu'en temps normal l'humour des comédies françaises dites "mainstream" me hérisse le poil.
C'est exactement pareil dans la série qui me fait écrire ce pavé insipide et hautement répétitif, on dirait un délire entre potes qui a mal tourné mais qui emmerdent les standards si cela devait leur faire abandonner leur univers bien à eux. Je comprends donc qu'on n'aime pas cette série tant il faut apprécier que sa qualité réside dans son imperfection comique et scénaristique assumée mais qui n'est en définitive qu'un prétexte pour glisser un humour aussi cinglant qu'absurde.
Rangez donc ce mépris culturel de classe que je ne saurais voir dans le holster de tolérance prévu à cet effet et appréciez le spectacle.