X-Men : Evolution

Cette série présente la formation et les débuts des X-men dans le monde fort charmant de la tolérance et de l'amour du prochain d'une Amérique pas si fictive que cela. Pendant deux saisons, les mutants se cachent aux yeux du grand public, de peur de sa réaction négative potentielle, qui se vérifie grandement dans les deux dernières saisons : peur de l'autre, absence de confiance et de respect, instrumentalisation à des fins électorales, passage à tabac de mutants, etc. La première saison est très bien construite, ne dévoilant son grand méchant (Magneto) que dans les tous derniers épisodes, alors que toute l'intrigue de la saison se construit autour de lui. Le mécanisme est huilé et fonctionne à merveille : presque à chaque fin d'épisode, Magneto, ou plutôt son ombre en contre-plongée, apparaît, lançant une, deux phrases au plus, pour montrer sa maîtrise des événements. On ne sait rien de lui et on ne découvre son nom qu'à l'avant-dernier épisode, donnant lieu à une des montées en puissance les plus marquantes dans une série animée.

Et si la saison 3 est en-deçà des deux précédentes, ce n'est que pour offrir un final d'une force inattendue qui voit émerger un nouveau grand, grand méchant : Apocalypse. Le hasard du calendrier fait que j'ai visionné les deux dernières saisons au moment de la sortie du film X-men : Apocalypse, je reviendrais donc par ici une fois ce film vu, pour une éventuelle comparaison. Pour l'heure, la dimension biblique du personnage est évidente, mais plus subtilement elle est aussi la manifestation concrète de toutes les peurs des intolérants et du gouvernement américain : un mutant si puissant qu'il est impossible à arrêter, même par d'autres mutants. On sent également l'influence de cette série sur Singer et sa façon de traiter la licence X-men (c'est étrange, le but d'Apocalypse ici est de transformer les non-mutants en mutants, ça ne vous rappelle rien ?), montrant sa connaissance de l'univers et sa volonté de respect de celui-ci. J'espère donc qu'il n'a pas massacré le personnage d'Apocalypse et l'intrigue qui l'entoure, même si j'éprouve quelques doutes.

La thématique de l'intolérance et de la vie au sein d'une société policée par les différences est bien sûr centrale, mais c'est surtout la façon dont elle est traitée, donnant lieu à des scènes et des discours d'une profondeur étonnante pour une série aussi modeste (par exemple, dans un des épisodes, le principal du lycée des X-men se présente aux municipales en construisant un discours anti-mutant, pointant la nécessité de leur fichage ; l'opinion est favorable aux mutants, il lance alors "The only thing we have to change is the public's thinking"). Car modeste, cette série l'est : les épisodes sont parfois mal construits, les animations de la saison 3 sont très, très en-dessous d'un niveau normal et acceptable, rompant parfois complètement l'immersion au cœur de l'intrigue. Mais c'est là tout le charme de la série, qui sous des atours parfois un peu grossiers, manifeste une passion et une profondeur recherchée qui la place au-dessus de la moyenne des séries animées pour enfants. Les rebondissements sont nombreux, le divertissement est bien présent, même pour un adulte, qui trouvera notamment son compte dans le traitement de l'intolérance et du regard d'autrui.

Et puis c'est toujours drôle d'entendre les doubleurs américains galérer à prononcer "Charles-Xavier", sincèrement, rien que ça, ça vaut le détour !