Dans la sombre clarté lumineuse du crépuscule naissant dès les premières heures du matin, se découvre au loin, tout proche, un simple et majestueux bâtiment dressé là en plein milieu d'une forêt sans arbres. Sur l'enseigne, qui devant la porte pend solidement dans un grincement agaçant, on peut parfaitement lire le mot à moitié effacé : "Taverne".
Et en effet, après avoir doucement ouvert la porte avec fracas, vous constatez que c'est la fête là-dedans. Des poivrots assis sur le bar, avec une bouteille dans chaque main et une pinte posée à l'envers sur la tête, au sol au milieu des éclats de verres et de paillettes, de nombreuses tables et chaises renversées de partout, pareil pour les nombreux cadres à l’effigie de, sans doute, les plus grands piliers du bar, tous au sol; d'ailleurs les seuls trucs debout ici, ce sont les clients, nombreux, tous en train de danser là où ils le peuvent, en buvant en même-temps au goulot des tonneaux entiers, le tout dans un mélange d'odeur d'alcool et de vomi. Tous semblent faire la fête en suivant le rythme de la musique du bar, mais quelle est donc cette musique, d'ailleurs ?
Et bien c'est cet album ! Quelle coïncidence ! Mago de Oz c'est, en effet, la musique d’excellence parfaite pour mettre l'ambiance dans n'importe quel bar existent du monde humain, voir vivant, dans toute l'histoire du temps. Si Nostradamus ou Agathe de Minority Report avaient eus comme vision un album de Mago de Oz, ils se seraient reconvertis comme clown de cirque ambulant, à coup sûr.
Si vous en doutez, essayez de jouer les titres de cet album " Que El Viento Sople A Tu Favor, Ayahuasca, Vodka 'n' roll " au milieu d'un enterrement, et je vous garantie que l'ambiance va changer ! (en revanche, je décline toute responsabilité en cas de vengeance sanguinaire sur votre personne ).
Et pourtant cet album est encore plus "sombre" que les précédents. Bon, je sait bien que je dit cela à chaque nouvel album de Mago de Oz, n’empêche que c'est pas faux. Plus sombres, plus inquiétants, mais surtout géniaux. Comment ne pas adorer "El Principe De La Dulce Pena (Parte IV)" en duo avec la chanteuse Patricia Tapia, les diaboliques "Mis demonios, El Violin Del Diablo", " et surtout "Für immer" et son inquiétante ambiance de l'Allemagne nazie... l'intro de l'album elle-même à de quoi faire frissonner même un esquimau au meilleur de sa forme. Un mélange de parasites et grésillements de radio comme si vous cherchiez un truc à capter, pour au final tomber sur un bulletin d'info en Espagnol, qui vous parle de catastrophes naturelles... même quand on ne pige rien à la langue de Ricki Martin, on sait quand-même que le présentateur ne vous parle pas d'un fait divers ou de la dernière beuverie du coin, d'ailleurs ça ce confirme, après, quand les guitares et les bruits/effets de voix bizarres arrivent...
Pour ceux qui raffolent du côté Rock-folklorique habituel de ce groupe, vous allez rester ici un peu plus sur votre faim, car malgré les quelques titres mentionnés au début, le côté festif à bel et bien perdu de l'ampleur. Plus sombre certes, mais aussi très doux, comme le titre "Aun Amanece Gratis", qui vous plonge au milieu d'un bar cette fois-ci calme et posé, et deux magnifiques balades, "Suenos Dormidos et Duerme". N'est-ce pas magnifique, franchement, qu'un groupe aussi festif et enjoué tel que Mago de Oz soit également capable de nous pondre encore une fois, de splendides balades, et en fessant ressortir quand ils le veulent un côté obscur tout en jouant aussi gaiement qu'à l’accoutumé de la flûte et du violoncelle ?
Et que dire pour le côté power-metal, toujours aussi jouissif. "La ira de gaia, Atlantia, Mis demonios, Fuerza Y Honor , .." mais le meilleur représentant dans le genre reste le second titre "Dies Irae" qui après quelques notes calmes de piano, viens nous exploser d'un coup un rythme purement power-metal dans la tronche, avec un magnifique solo de guitare par dessus ! Ce début de chanson, c'est tout simplement comme un mur de brique qui vous tombe sur le coin de la tête, suivis d'un mammouth énorme qui aurait mangé des enclumes, le tout déclenchant dans la chute une explosion nucléaire dont l'onde de choc déclenchera des vibrations de Parkinson à des aliens à des années lumières de là ! Et la suite est tout aussi speed et jouissive, vous ne pourrez pas décemment dire après que ce groupe fait du Rock folklorique ni même du Heavy-metal, en entendant cela ...
Un symphonique toujours aussi présent donc, même si joué de façon plus "dark" pour contraster avec le côté enjoué et folklorique habituel, mais aussi des passages originaux, comme la partie musicale de " La Ira De Gaia", l’hallucinante " Ayahuesca", des styles légèrement Jazzy/prog qui se tapent l'incruste pour notre plus grand bonheur !
La meilleure étant la dernière, "Atlantia", sans doute le meilleur "titre" de cet album, la pièce maitresse de 16 min qui va conclure cet album qui lui-même viens conclure une saga de trois albums. Un début des plus original, un mélange d'orchestre classique et de balade douce et triste, sur lequel viens ce succéder une longue partie de Jazz-swing délirant, comme si vous étiez d'un coup en plein dans l'église d'Harlem, avec l'ambiance qui va avec... avant de plonger, après une interlude classique, dans le metal, bien lourd, avec des chants magnifiques hurlant la détresse et la peur... les refrains (et pré-refrains, surtout) sont chantés magnifiquement, on en oublie direct le timbre de voix doutable des chanteurs, tellement ils y mettent toutes leurs tripes, tout leur talent. Du folklorique et du sympho, toujours, de la cornemuse aussi, pourquoi pas tiens, les solos du guitares/clavier par contre ne sont pas aussi speed/prog que sur le titre clone de l'album précédent "La cantata del diablo" , en revanche ils sont magnifiques et éblouissants, écoutez celui à 08:20, et osez me dire que ce n'est pas un des solos les plus jolis que vous n'avez jamais entendu ?!??!! Cette chanson, c'est un groupe de metal, des virtuoses de flute/violoncelle/cornemuse/guitare, les choristes d'Harlem et un orchestre symphonique qui s'allient pour nous sortir un chef-d’œuvre incroyable, qui faudrait, de toute urgence, utiliser comme carte de visite audio pour tout éventuel extra-terrestre qui découvre l'espèce-humaine... et s'ils comprennent l'Espagnol, vu tout ce qui est dit dans les textes, peut-être viendront-t'ils à notre secours, après avoir entendu une si belle-chose venant d'une espèce aussi horrible qu'est l'humain...
Et pour ajouter encore à l'émotion, les fans du groupe reconnaitront les dernières notes et phrases de la chanson, comme étant les mêmes que la première chanson du début de la saga "Gaia" de l'album du même nom... donc si comme moi vous avez découvert le groupe avec ce "Gaia" et ses premières notes, je vous dit pas le frisson, rien de tel pour finir en beauté avec excellence...
Bref ce groupe de génie ose tout, et réussi tout ; il est impossible, malgré les petits défauts de chant habituel, de ne pas noter cet album 15 étoiles (d'ailleurs pour la raison de ne pas faire planter le site, seules 10 étoiles sont actuellement visibles) et de ne pas recommander cet album à votre entourage.