Avec sa carrière solo sous le nom d’Indigo, Liam Blackburn n’avait jusqu’à présent jamais réussi à retrouver ce qui avait fait le succès de son duo Akkord : cette basse prenante, ces structures rythmiques typiquement anglaises qui transcendaient quand même les genres et cette volonté de sortir d’une musique simplement dansante. Heureusement, cette nouvelle plaque sortie sous le nom d’Ancestral Voices le voit reprendre tous les éléments qui ont fait le succès d’Akkord pour en tirer quelque chose de bien plus profond.


Ancestral Voices tire avant tout son inspiration d'un documentaire sur les cultures africaines et plus particulièrement sur la place qu'y occupe la cosmologie. Ce nom bien choisi permet à Liam Blackburn de démontrer à la fois son amour des percussions et des rythmiques tribales, mais aussi (et surtout) son attirance pour la transe et l’occulte.


Ainsi, tout le long du disque, les nappes sont plus denses, les beats plus lents et plus organiques que dans ses précédentes sorties et on y retrouve globalement un peu l’ambiance des deux premiers morceaux d'Akkord qui, comme elle donnait à l'époque le ton de l’album, fait de même avec cet LP. On évolue ainsi dans de longs drones, régulièrement hachés de percussions live et de mélopées extrêmement prenantes, la plupart des morceaux tenant plus du rituel que de la composition classique.


Ce Night of Visions arrive cependant à esquiver un écueil : confondre liberté structurelle et morceaux sans forme, tout miser sur l’ambiance plutôt que sur la composition et créer des morceaux sans aucun objet. Le producteur anglais n’a pas oublié ses racines et donne naissance à des morceaux très cohérents, à défaut de proposer un album d’une seule traite.


Le seul problème reste donc la question de l’identité, qui ne cesse de se poser dès que l’on écoute un album oscillant entre (dark) ambient et musique rythmée. En quoi Ancestral Voices se démarque-t-il de la myriade de producteurs qui fourmillent sur le net pour rejoindre les Raime, The Haxan Cloak et autres Demdike Stare ? Peut-être est-on ici dans le même cas de figure qu'Indigo, dans une moindre mesure pour Akkord : à trop vouloir brouiller les lignes, on risque de proposer une œuvre peu marquante. Les récentes productions du duo n'avaient ainsi pris toute leur dimension qu’une fois passées entre les mains de remixeurs assez prestigieux, notamment Regis.


Night of Visions reste bien entendu un disque très acceptable et montre que le label Samurai Horo n’est pas forcément là où on l’attend. Toutefois, au vu du potentiel du jeune producteur, il y a encore une belle marge de progression. Et après tout, c'est tant mieux.


Critique originellement publiée sur Goûte Mes Disques

Gweilo
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le 22 févr. 2016

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