Déni ou folie ?
[Hyper-Spoiler : critique s'adressant aux personnes qui ont vu le film. Mon but n'est pas de vous le vendre] Belle affiche pour un thriller passionnant. En 2010, Scorsese nous a livré deux...
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le 15 oct. 2019
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Il y a des artistes qui vous guérissent. Il y a des artistes dont la première note de clavecin - fut-il émulé - vous remontent l'estomac sans entrave à la gorge vers vos lacrymales une bile inaltérable, un torrent de larmes qu'il vous plaît de déverser sans aucune retenue.
Emilie Autumn est cette artiste. La bio d'E.A. sur wikipedia est suffisamment étoffée pour que je puisse me passer de revenir sur sa douloureuse, mais optimiste histoire. Je me focaliserai sur les sensations merveilleuses d' Opheliac, le premier album qu'elle a composé après son passage à "l'Asylum For Wayward Victorian Girls", l’Hôpital Psychiatrique qui lui a inspiré tout le Background de son oeuvre. J'ai découpé l'album selon chaque piste. Si le résultat risque de vous faire penser à un assemblage de pistes sans rapport interdépendant, ne vous y trompez surtout pas : il s'agit d'une oeuvre totale, à prendre dans son intégralité et non par petits bouts... Comme la totalité de l'oeuvre complexe d'E.A.
Opheliac : Dès la pression de la deuxième touche de clavecin émulé Cubase (un synthétiseur, quoi), on comprend à quelle virtuose on a à faire. La main est à la fois sûre, élégante et raffinée. La toile préraphaélite de Millais (Ophélie) sera à n'en pas douter restituée sous forme sonore à la perfection. En effet cette intro à la technique imparable vous plonge en début d'album à une époque - toujours d'actualité - où les femmes sont maltraitées, jusqu'au suicide ou féminicide). Pourtant, dans cette intro, on VOIT a quel point E.A. est puissante, et gagnera son combat.
Une minute à fouler convenablement cet univers, et c'est l'entrée de la voix (et du violon, son instrument fétiche) qui nous déstabilise : Emilie, à 29 ans, a connu des expériences tragiques. Son timbre parfait ne nous permet aucun doute.
Le texte, pour moi, est sacré, d'autant qu'il est craché avec une fureur montante et une rage qu'il peine à trouver d'égal. Emilie est terriblement seule, elle sait que personne ne peut l'aider. Seule sa force intérieure est capable de la sauver. Elle nous le hurle haut et fort, dans un torrent rythmique et industriel (l'utilisation de La Musique Assistée par Ordinateur atteint un niveau que je n'ai que très peu entendu) à effrayer des Reznor.
L'arrivée du cri sur "Never Doubt I Love" en fin de pont est tout simplement majestueuse. Il ne reste plus qu'à achever l'entrée addictive dans son univers par deux refrains.
Swallow : N'ayant pas encore bien compris ni l'instrumentale ni le texte de cette piste, je préfère ne pas la chroniquer. Disons qu'elle nous fait penser à sa période "Enchant" : L'ambiance est celtique et je la trouve - aujourd'hui - moins intéressante que les autres pistes de l'album. En bref, je n'ai pas encore toutes les clés.
Liar : L'intro au Violon détruit rappelle beaucoup son instrumentale "Manic Depression". Puis la synthbass acompagne sa voix. Nous le savons depuis la piste Opheliac, Emilie est capable d'aller sans problème chercher des émotions comme le dégoût (qu'inspire le mensonge). Elle a du faire face à un (ou plusieurs) menteurs, et elle veut les châtier. Je lui donne raison : sa voix remplie d'émotions et de colère nous rappellent qu'elle est victime, et qu'elle tente d'être bourreau à travers la musique.
The Art of Suicide : Je vais essayer d'arrêter de parler de musique à partir de maintenant, car E.A. nous a prouvé son talent, pour traiter des textes. Sachez que ce style Opéra chantant et insouciant, surement inspiré du Lac des Cygnes, n'est pas choisi n'importe comment. Il est hautement ironique. Elle danse de façon insouciante en nous disant tout au long de la piste que la vie ne vaut pas la peine. Elle laisse passer un break harmonieux pour répondre à la question du refrain "Why live a life ?", alors que nous étions accroché à sa pensée décadente, elle nous offre enfin sa réponse :
Life is not like Gloomy Sunday
La vie n'est pas comme un Sombre Dimanche
With a second ending
Avec une seconde fin
When the people are disturbed
Quand les gens sont dérangés
Well they should be disturbed
Bien qu'ils devraient être dérangés
Because there's a lesson
Parce qu'il y a une leçon
That really ought to be learned
Qui mérite vraiment d'être apprise
The world is full of poets
Le monde est plein de poétesses
We don't need any more
Nous n'en avons pas besoin de plus
The world is full of singers
Le monde est plein de chanteuses
We don't need any more
Nous n'en avons pas besoin de plus
The world is full of lovers
Le monde est plein de gens qui s'aiment
We don't need any more...
Nous n'en avons pas besoin de plus...
Car oui E.A doit tenir avec ses idées noires. Et elle n'apporte aucun dénouement à ses intentions. La réalité de son oeuvre, c'est qu'elle ne sait pas à quel moment elle peut craquer.
I Want My Innocence Back : Mec Cishet, je ne m'accorde pas vraiment le droit de commenter ces lyrics. Je tiens juste à dire que dans le malsain qu'elle maîtrise, E.A. nous livre un chef d'oeuvre instrumental.
Misery loves Company : E.A. nous montre sa défiance auprès des personnes qui "cherchent plus qu'une compagnie". Nous verrons cela avec la piste "Thak God, I'm pretty" : La malédiction d'E.A. est d'avoir tout pour plaire, mais elle déteste cela. Cette damnation lui a déjà faire perdre sa santé mentale, je suppose qu'elle est en droit de réclamer de l'empathie, et non de l'amour.
God Help Me : Cette piste nous rappelle qu'étant seule, elle ne peut se tourner que vers un Dieu qu'elle supplie, qu'elle implore de "briller vers elle", elle essaie de se vendre du mieux qu'elle peut. La fin demande beaucoup d'attention. En écoutant les "God Help Me", vous entendez à chaque fois une respiration de douleur. On peut s'imaginer le pire. Comme je n'ai pas envie de tourner autour du pot, et selon mon interprétation, je la balance comme ça : c'est le moment où elle se fait violer. C'est juste atroce, mais cela sert peut-être à exorciser ses douleurs
8.Shalott : Cette toile sonore et vivante est une expérience synesthésique (tous nos sens mélangés dans l'oeuvre). Elle illustre la peinture "The Lady of Shalott". On pourrait avoir l'impression, en observant la barque du tableau, qu'elle avance et que la passagère n'est autre qu'E.A. Si l'on tient cette hypothèse (confirmée par le texte) Emilie compte se jeter dans l'eau glacé à la fin du texte, et en particulier, sur le deuxième "And it's here" du dernier refrain, qui opère une fugue musicale (qui devient une réelle fugue)
9 Gothic Lolita : Comme l’antépénultième, je ne peux juger le texte. Juste mentionner qu'elle encore plus cruelle.
Dead is the new Alive
I know where you sleep
Let the Record Show
Thank God I'm Pretty
Dominant
Pour conclure, cet album fait partie des œuvres qui sont capable de me changer. E.A., en plus d'être virtuose, a une plume qui casse la baraque. A noter que ce n'est que le point de départ d'une oeuvre qui continue depuis cette date, Emilie maîtrisant toutes formes d'art : de la couture, à la chorégraphie, en passant par la déco des scènes... Et la préparation de thés.
Créée
le 15 oct. 2019
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