Je tiens à préciser que la note de 10 porte exclusivement sur "l'Art de la Fugue" écrit par Johann Sebastian Bach.
Œuvre testamentaire de J.S Bach, elle révèle ses dernières pensées, qui s'expriment sous la forme musicale la plus pure à ses yeux.
Ceci est l'ultime expression de sa quête spirituelle, l'aboutissement d'une existence dédiée corps et âme à son art comme en témoigne, son héritage d'une ampleur colossale tant sur le foisonnement de ses écrits que dans l'avancée musicale, elle y trouvera son apogée dans la polyphonie et l'art du contrepoint.
L'Art de la Fugue est une œuvre inachevée dont la composition s'est étendue sur plusieurs années elle rassemble quinze compositions. La première version imprimée en comprend vingt-une, soit dix-sept fugues et quatre canons.
Le Cantor commence à les écrire en 1742, Il s'inscrit dans une longue tradition d’œuvres contrapuntiques complexes dans la lignée de grands maîtres comme Buxtehude .( Organiste Allemand de grande renommée, premier Master de J.S Bach).
Les fugues et les contrepoints rassemblés ici, sont tous basés sur le même thème principal en ré mineur, soit D-la Ré en tierce mineure.
Ces variations sont soumises à l'inversion, l'augmentation, la diminution et autre méthode de permutation, offrant une étendue polyphonique d'une grande richesse.
Chacune des variations étant pleinement authentique,toutes les voix y résonnent ensemble, avec autant de puissance. Parmi ces fugues, certaines sont animées d'une fougue immodérée, tandis que d'autres, s'avèrent plus intime, empreintes de spiritualité. De nombreuses écoutes seront indispensables pour en assimiler toute la complexité.
Cependant chaque fugue a son propre thème, bien qu'un sujet central forme la base d’un impressionnant choix de fugues et de canons soutenue par une profusion de techniques contrapuntiques.
Lorsqu’on étudie la structure de ces fugues et canons, on est étonné de leur complexité croissante et de l’inventivité avec laquelle d’une fugue à l’autre, Bach parvient à chaque fois à éclairer d’un jour nouveau le même thème, en ouvrant de nouvelles perspectives au niveau de la polyphonie, de la manière dont les différentes variantes sur le thème initial s’imitent l’une l’autre ou au contraire se donnent la réplique, pour doucement se combiner entre elles dans des structures de plus en plus complexes. Et tout ceci sans qu’à aucun moment la pensée musicale, la force mélodique, rythmique et surtout harmonique ne tombent dans de vaines formules théoriques.
La pureté irréductible de la structure, sa progression mathématique et sa précision se détachent de toute règle stylistique formelle et donnent plus de fond à l'hypothèse très vraisemblable que l'Art de la Fugue fut également un hommage à la dernière introduction de Bach. En effet, la notion même de contrapunctus, la manière dont il nomme les mouvements fugaces, en dehors d'être unique, est une évocation directe du dialogue des contraires.
La dernière fugue, inachevée est construite autour de trois sujets
elle nous conte, dans l'intimité de ces pages émouvantes la fin de l'œuvre.
Au contrepoint 14, soudainement, les notes s'arrêtent, la portée s'estompe, tandis que l'instrument vibre encore, comme suspendu, exhalant son dernier soupir..
Ansi se clôture sa derniere fugue sur les notes B-A-C-H, serait-ce là ses derniers mots, la signature du vieux Cantor grâce à laquelle il nous transmet son leg.
Ces quatre notes demeureront à jamais figées dans le temps, cette fugue n'est peut être pas "inachevée", au contraire elle est infinie, on entre dans l'éternité.
Quelles que soient les théories musicologiques, l'œuvre qu'il a laissé, même sous sa forme incomplète, est sûrement l'une des plus grande réussite musicale de l'humanité.
S'agissant de l'interprétation de Glenn Gould :
Sur cet enregistrement, Glenn Gould interprète à l'orgue une sélection de 9 fugues qu'il complète par 4 (de ces mêmes fugues) interprétées au piano
Il est important de rappeler que ce n'est pas un enregistrement complet, mais seulement des extraits.
Glenn Gould pianiste de talent à qui l'on reconnaît aisément sa virtuosité ( notamment sur les variations Goldberg œuvre incontournable que j'adore personnellement )
L'orgue cependant demeure un instrument qui n'est pas fait pour lui. Ses exaltations et son toucher très "staccato" ne sont pas propices à ce dernier.
Je recommande la version de référence de Leonhardt, ainsi que celle d'Isoir
Johann Sebastian Bach n'a pas prédestiné l'Art de la fugue à un instrument, il a donc transcendé le timbre et les instruments. J.S Bach règne en maître incontestable de la fugue, et a porté cet art au-delà de toute mesure. "Die kunst der Fugue" complexe, solennelle, insaisissable, représente l'acmé du Contrapunctus mettant en relief la parenté entre les thèmes, ainsi que le phrasé musical sur une austérité assumée, pour y insuffler un élan enflammé.
Une œuvre du passé, à la fois lointaine et tellement vivante.