Ce jour là (fin 79-début 80) la radio locale distribuait des invitations pour la sortie en France du film « The Rose » qui à l’origine devait être un biopic sur Janis Joplin. Bette Midler refusa, elle ne désirait pas incarner Janis à l’écran. Comme Rydell la voulait absolument comme actrice il céda et toutes références à Janis Joplin disparurent du scénario. C’est Paul A. Rothchild, producteur des Doors et du dernier album de Janis Joplin justement (« Pearl » album posthume sorti en 1971) qui a produit la bande originale du film.
Une trentaine de places pour les premiers arrivants. Nous étions toute une bande a bondir sur l’occase, une nuée de corbeaux se jetant sur un champ de maïs. Les filles se chargèrent d’organiser la razzia dans les locaux de Sud-Radio. Tout ça pour dire que j’ai vu le film gratos et pour sa première :)
J’essaierai d’écrire une critique du film lui-même une autre fois, aujourd’hui c’est l’Original Sound Track qui m’occupe.
Pour situer le contexte de cet album live, un résumé rapide du film. Mary Rose Foster « The Rose » est une artiste, chanteuse rock à succès dans le style alcool, sexe, drogues et rock’n’roll. Lors d’une soirée elle rencontre un gus joué par Alan Bates, Houston Dyer, et tombe amoureuse de lui. Houston est un routard, il aime bouger, voyager et se fiche pas mal du star-system et de toute la faune qui tourne autour de Rose. Elle est tiraillée entre son gout pour sa vie de rock star, son désir d’un dernier concert dans sa ville natale et son envie de faire un break, de mettre les voiles avec lui. Follement amoureuse elle ne peut néanmoins se résoudre à quitter son monde de strass et de paillettes. Son manager fait tout pour la retenir, money that’s all that he wants. Elle promet à Houston que ce sera bien le dernier, elle le supplie de l’attendre. Peine perdue le beau cow-boy repart sur la route, on the road again, tel un clochard céleste de Kerouac. Rose se fait un bon gros shoot et après maintes rasades de whisky monte sur scène. Elle s’écroulera à la fin du concert sur la note finale de « The Rose ».(Morceau qui fut classé 3ème dans les charts US et qui lui valut un disque d’or en 1980)
L’album commence avec « Who side are you on ? » Intro batterie, riff ravageur, saxo ça swingue d’entrée Et la voix très rock’n’roll, blues, forte et pleine de Bette Midler “The Rose”. Tout l’album est sur le même tempo entrecoupé de deux monologues. Le premier est le moment le plus faible de l’album, le second est poignant, « Do you forgive me ? » demande-t-elle à son public, elle supplie ses fans « tain j’ai fait des conneries mais je vous aime ». « do you forgive me ? »
Quatre morceaux vraiment très forts, un « Keep on rockin » endiablé, une performance remarquable, « Drug, sex and rock’n’roll » la Sainte trilogie rock’n’rollienne, celle des dépravés, la voix de Bette atteint des sommets et toujours ce foutu sax sacrément percutant. Imaginez, les riffs acérés, la batterie qui martèle en accord avec une ligne de basse bien comme il faut, le public est déchainé. « Rose ! Rose ! Rose ! » S’ensuit « love me with a feeling » ou « baise-moi avec romantisme » (traduction perso) un blues/rock au groove incisif, ça suinte bon Memphis, Tennessee. Les claviers ne sont pas en reste. Faites tourner le Jacks et le joint. Mon troisième coup de cœur pour « Stay with me » et bien sûr l’ultime, le sublime « The Rose » ah c’est quelque chose ce morceau. Intro piano, doucement, doucement, voix étrangement apaisée, la paix du désespoir, il ne faut pas avoir peur d’aimer, mais elle même n’a-t-elle pas préféré son public à l’amour ? « Lies the seed, that with the sun’s love in the spring becomes the rose » (Se trouve la graine, qui avec l'amour du soleil au printemps devient la rose) Dernière note elle s’écroule sur scène terrassée par une overdose, la fatigue et le chagrin. Superbe chanson, superbes paroles d’Amanda McBroom. Fin émouvante.
Rien de vraiment nouveau bien sûr mais de superbes envolées, des morceaux qui balancent bien, du bon son avec Bette Midler au top de sa forme. Voilà une chanteuse qui a du coffre.
Un rock efficace avec la précision explosive d’un uppercut qui vous envoie au tapis.
Le reste de l’album oscille entre du très bon et des morceaux plus que corrects.
Dans la première catégorie celui qui ouvre l’album « Whose side are you on ? » ainsi que « When a man loves a woman » « sold my soul to rock’n’roll » et « Let me call you sweetheart » quant à « Camelia » c’est une balade instrumentale histoire de montrer que Bette est bien entourée, bien accompagnée par des musiciens qui assurent. Un peu moins éblouissant « midnight in Memphis » qui mérite cependant un bon 8. Chez d’autres le top mais chez The Rose du classique. Quant aux deux monologues en début et fin d’album j’en ai parlés plus haut.
Tous ces morceaux ont été interprétés lors d’un concert unique qui s’est tenu le 23 juin 1978 au Wiltern Theater de Los Angeles. Neuf caméras ont été nécessaires pour balayer le plus d’angles possibles permettant des prises de vue de qualité. Certains titres joués ce jour là n’ont pas été retenus, ni pour le film ni pour la bande originale. Bienheureux le public qui a pu y assister, sûrement une expérience unique.