Un voyage musical d'une richesse rare.
Album éponyme d'un groupe qui est véritablement sous estimé, trop peu connu. Cet album est le commencement de la ligne musicale tracée par AKA, qui nous font découvrir de nouveaux horizons, des choses inédites, certes particulières mais à travers lesquelles on parvient à comprendre le sens de cet album, et tout son potentiel.
L'album commence par un "Soupir articulé", titre évocateur qui résume bien l'ambiance de cette track : une sorte de faiblesse, un étau qui reste serré et qui, tout en donnant l'impression d'une certaine retenue, exprime la puissance d'une lassitude en terminant par une "découverte", l'apparition d'un évènement qui vient changer la donne, changer cette monotonie agréable et à la fois insupportable.
La seconde track est intitulée "Octagone Vierge", elle est dans la continuité de la 1ère et commence sur la note de fin de "Soupir Articulé", mais elle est totalement différente et exprime la sensation d'inconnu, la découverte faite précédemment. Il y règne également une ambiance fantomatique, quelque chose d'aérien, sans pour autant donner l'impression d'être rassuré, loin de là. Le beat tape fort, jusqu'à 1:20, ou le rire refait son apparition, et ou la track change d'orientation avec un sample voix supplémentaire et une basse en accord avec le début de la track. La sensation d'inconnu s'amplifie, puis arrive le scratch vers 2:15 avec le rire, qui semble dire que cet inconnu n'est pas commode. La track termine comme elle a commencé, avec un rire et un simple sample.
L'"Interlude 1" arrive déjà, et les racines hip hop apparaissent clairement dans cette track, avec toujours un sample expérimental et aérien en fond, pour coller avec les track précédentes, et les scratchs/samples vocaux s'enchainent, pour confirmer que le hip hop et bien présent. La track termine sur un son peu rassurant, et on enchaine avec la track suivante.
"Fankie" est étrange aux abords, un rythme peu commun, un sample vocal allemand, et toujours cette ambiance aérienne avec un sample peu rassurant. Jusque là la track parait "habituel" quand on connait AKA, puis la basse rentre, et l'effet est amplifié, l'insécurité et le malaise s'installent véritablement à partir de cette track dans l'album, comme dans Cluster Ville (même si chronologiquement on ne peut évidement pas comparer). Cette track est l'illustration parfaite de l'effet recherché par AKA : le malaise, l'incertitude, avec toujours des racines hip hop bien présentes avec des scratchs sur un bon sample vocal. Le corps de cette track est maintenu par la présence de la basse qui apporte véritablement cette chose supplémentaire.
"Von Agram" entre en lecture, et commence étrangement. Un côté enfantin énormement présent, mais toujours avec cette insécurité. Jusque là la track évolue de façon basique : la batterie apparait. Puis la musique prend du volume à 0:34, les samples vocaux choisit surprennent et le piano donne des ailes à cette track. Le sample refait son apparition, comme pour confirmer que le choix était bien voulu, puis le piano empèche la lassitude, malgré l'alternance de la mélodie au début de la track et de la phase "aérienne" au piano. La track se termine sur la mélodie sombre, et annonce la suivante.
"Volume AKA" commence là encore habituellement avec des racines hip hop et une guitare saturée. Mais à 0:31 la track change totalement de direction, avec une mélodie contraire, aussi avec le côté enfantin déjà présent sur "Von Agram". La track évolue... prend en cohérence, puis la guitare saturée refait son apparition, l'alternance de 2 phases contraires, un peu comme sur "Von Agram", un track assez similaire au final. Mais comme l'annonce la track suivante, il vaut mieux ne pas s'habituer.
"Pas d'Accoutumance" est le noyau de l'album, elle arrive à un moment ou on croyait avoir cerné ce groupe si mystérieux, et casse totalement avec les track précédentes. L'espèce d'écho et la présence de la guitare créent une nouvelle atmosphère, l'incompréhension. La présence de cette track est essentielle à l'album, plus précisement à sa non-cohérence. Tout en étant efficace, elle sait finir clairement et sans nuance, comme pour terminer la première partie de l'album.
"Ocre Infrarouge" marque le début de la seconde partie de l'album, que je qualifie comme "spatiale", et cette track joue le rôle de transition à mon sens, avec 2 mélodies marquées, la 1ère dans la lignée des tracks précédentes, c'est à dire toujours avec ce malaise et cette insécurité, et la seconde annonçant l'arrivée de la track suivante et de la 2ème partie de l'album, la meilleure à mon sens, beaucoup plus aérienne.
"U38" commence exactement comme elle était annoncée dans la précédente track, d'une façon spatiale et plus dégagée. La track évolue ensuite pour apporter une vraie mélodie puissante à la chose, le sample vocal utilisé est efficace, et les sonorités sont différentes, plus claires, et d'ailleurs lors de la transition entre cette mélodie et la suivante, on entend clairement le décollage d'une fusée, puis arrive le rythme frénétique avec la mélodie du début de la track, comme pour exprimer la sensation de courir dans une immense plaine, à la fois libre mais traqué par quelque chose qui se rapproche, jusqu'à nous toucher (scratch), mais lorsque la mélodie spatiale revient, l'impression de fusionner avec cette entité qui nous rattrape est clairement évoquée. Puis la fin de la track annonce le départ, vers un autre horizon ?
"Interlude 2" confirme bien toute l'histoire racontée par "U38", elle exprime comme une sorte de regret, de nostalgie de cette plaine immense que l'on vient de quitter. Cette track est très courte et peu fournie, mais elle est nécessaire au bonne enchainement et à la cohérence de la track suivante.
"L'élément fédérateur" exprime l'arrivée sur une autre planète, un inconnu, pas effrayant, juste une interrogation, et c'est là que cette track est différente de celle au début de l'album. Elle est fournie de peu de sons, si ce n'est quelques sonorités asiatique, la découverte d'un peuple, d'une culture peut être.
"Diskoboy" commence avec l'ambiance de la track précédente, avec une voix, comme pour dire que nous sommes arrivés sur cette planète et que l'on essaye de communiquer avec les races s'y trouvant. Puis à 0:53, on y parvient enfin, c'est une délivrance, un sentiment de plénitude s'installe, la réussite et la sensation d'être enfin chez soi. Et la trame est répétée, l'effet est reproduit à nouveau et toujours très efficace, c'est la confirmation, il n'y a plus d'inquiétudes à avoir.
"Sallad" semble décrire la situation sur la nouvelle planète quelques années après, lorsque aucun problème particulier n'est survenu, mais la sensation de ne plus être parmi les siens est ultra présente ; peut être par manque de racines, mais l'ambiance spatiale est toujours là. Cette track semble nous raconter comment on se fait convaincre par les habitants de cette planète de rester, mais la même sensation revient sans arrêt, et il est clairement impossible de rester ici, une sorte de déchirement entre l'attachement aux siens mais à la fois le manques de racines, une frustration qui ne peut conduire qu'à un départ, un nouveau départ, vers un nouvel horizon. La fin de la track semble décrire l'éloignement du vaisseau de la planète, la nostalgie et à la fois le questionnement sur la nouvelle destination.
"John Reich" est la conclusion de cet album, et conclut d'une façon assez inattendue. Le vaisseau n'a trouvé aucune destination nouvelle, et nous sommes contraint à errer dans l'espace. Cette track exprime une souffrance, une impuissance, la sensation de ne rien pouvoir faire. La longueur de la track est à l'image de la souffrance que le groupe veut véhiculer, puis la track se termine sur une autre atmosphère... à nouveau une incompréhension, une nouvelle destination ? Ou une autre forme de vie ? Ou bien simplement la mort ? Cette fin est en quelque sorte une ouverture sur le prochain album à venir, Cluster Ville.
AKA nous conte un voyage musical, une totale cohérence entre les tracks, une émotion inimaginable, il vaut vraiment l'écouter pour le croire, la puissance de la musique est là aussi mise en avant.
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