Originaires de la région de Bahia, ce groupe de joyeux lurons se rencontre à la fin des années 60 et décide d'aller vivre tous ensemble dans un appartement de Rio de Janeiro pour perfectionner leur musique, alors très influencée par le rock psychédélique qui sévit en Occident.
Là-bas, pris de grâce divine et surtout pris sous l'aile du maître absolu de la bossa-nova, les Novos Baianos renouent avec leur "brésiliannité". João Gilberto s'éprend en effet de ces marginaux délurés, lui qui leur rend visite toujours impeccablement vêtu de son costume-cravate. L'influence de Gilberto sera déterminante partout: dans les thèmes choisis dans les paroles, qui reviennent à l'essence de l'identité brésilienne, et dans la façon de jouer, avec toute la décontraction et le raffinement caractéristique de la bossa-nova. Brasil Pandeiro, un classique éternel de samba, sera repris en ouverture de l'album sur une idée de João Gilberto, comme un manifeste assumé de la nouvelle direction que prendra désormais le groupe.
Une fois les idées en place, le groupe enregistrera son album à la vitesse de la lumière, tant le groupe est entrainé.
Installé en communauté au fin fond de la campagne bahianaise, les Baianos passent le plus clair de leur temps à jouer leur bien étrange musique et à organiser des matchs de foot, sport dont ils sont évidemment passionnés.
Ces gentils hippies n'en sont pas moins des musiciens absolument hallucinants: Pepeu Gomes est considéré à très juste titre comme l'un des tout meilleurs guitaristes de l'époque, Moraes Moreira, certainement le leader de la bande, compose alors chef-d'œuvre sur chef-d'œuvre en reprenant la douce poésie de son compère Galvão, et chante merveilleusement bien, férocemment concurrencé dans ce domaine par les sublimes Baby Consuelo et Paulinho Boca de Cantor. Quelle dream team!
Mêlant comme aux plus belles heures du tropicalisme la guitare électrique et les instruments brésiliens traditionnels (cavaquinho, chocalho, pandeiro, etc...), la musique des Novos Baianos est remplies de voix limpides et de mélodies sublimes jouées par un orchestre virtuose qui réunissait le meilleur des influences rock et samba.
Vouant un culte aux styles musicaux typiquement brésiliens, de la samba à la bossa-nova en passant par toutes les musiques du Nordeste (choro, frevo, baião,...) et en même temps profondément marqués par la pop et le rock psychédélique à la mode aux États-Unis et en Angleterre, les Novos Baianos sont donc, à l'instar de Caetano Veloso et de quelques autres (Gilberto Gil, Tom Zé, Os Mutantes), une synthèse assez parfaite de ces deux influences majeures. Le tout est joué avec un bonheur contagieux et une virtuosité impressionnante, ce qui évidemment ne gâche rien.
Acabou Chorare sort en 1972 et est aujourd'hui considéré par beaucoup comme le plus grand album brésilien de tout les temps, ce qui est d'autant plus remarquable quand on connait la richesse de la musique brésilienne... Voici par exemple la (très bonne) liste de Rolling Stone Brésil des plus grands albums "nationaux":
- Os Novos Baianos - Acabou Chourare
- Divers - Tropicalia ou Panis et Circensis
- Chico Buarque - Construção
- João Gilberto - Chegua De Saudade
- Secos e Molhados - Secos e Molhados
- Jorge Ben - A Tabua Da Esmeralda
- Milton Nascimento & Lô Borges - Clube Da Esquina
- Cartola - Cartola
- Os Mutantes - Os Mutantes
- Caetano Veloso - Transa
Avec les Novos Baianos les mélodies sont sublimes, les paroles sont tendres et les sourires sont larges: rarement on aura entendu un groupe si bon charmer l'oreille avec tant de facilité et de décontraction...
"Il est venu le temps pour ces gens bronzés de montrer leur valeur" disaient-ils dans Brasil Pandeiro avec un patriotisme tout naturel, en parlant du peuple brésilien.
Les Novos Baianos, tout au long de ces chansons fabuleuses, ne cessent de prouver cette valeur.