Septembre 2012. Un bruit se répand un peu partout sur le net: "Converge arrive". Forcément quelques semaines plus tard Converge était là. A l'heure, comme toujours. Etant donné la notoriété - par ailleurs amplement méritée - du groupe, cela fait longtemps que l'effet de surprise est une expression qui a disparu du langage des kits promos comme des fans. Mais venons en aux faits. Le premier constat est sans appel: propulser "Aimless arrow", pourtant véritable petite bombe en puissance, en avant de ce neuvième (!) album quelques semaines avant la sortie c'était mesquin. Le caler, en prime, en ouverture d'All We LOve We Leave Bind, relève tout autant de la filouterie de bas étage. Ne restait plus qu'à offrir à tous un aller simple pour Imaginationland en cadeau bonus avec chaque disque acheté à la suite de cette unique écoute et la boucle était bouclée.


Pas d'inquiétude cependant, puisque les vétarans sont toujours là, droits dans leurs bottes et aisément identifiables, immédiatement reconnaissables au milieu de leurs mille clones en déficit chronique d'inspiration. Le truc, c'est qu'une fois remplie la clause du riff nerdy et cochées les cases émotion et déconstruction du contrat qui semble accompagner chaque sortie (réussie) d'un nouveau Converge depuis quelques temps, c'est tout simplement le boxon. Le vrai. Et que, bordel de merde à clous, ça fait un bien fou.
Du pur Converge en ligne droite, usant "Trespasses" comme agent de destruction pour jouer les Monsieur Propre dans son petit univers qui à force - et c'est un comble - commençait presque à nous devenir un peu trop familier. A ceci près que le quatuor annihile plus qu'il ne dégraisse. Le traitement est radical, effectué avec assurance et précision, sans regrets visibles. Le ton donné d'emblée. All We Love We Leave Behind pue le Metalcore (le vrai, hein, celui d'avant The End Of Heartache) à 15 bornes et ne déviera pas 38 minutes durant.


Avancer que le quatuor remet tout à plat pour prendre un nouveau départ serait exagéré. Considérer qu'il reprend (enfin?) un virage franc dans une direction clairement définie à l'occasion de ce All We Love We Leave Behind est certainement beaucoup plus approprié. Ce même genre de choix net et tranché que l'on n'attendait plus vraiment de la part d'un groupe qui campait à la perfection le rôle de l'éternel défricheur de zones d'ombre sur les frontières floues des musiques extrêmes contemporaines et à qui sa fanbase pouvait probablement pardonner absolument tout et n'importe quoi.


Cet énième opus entièrement pensé et enregistré en comité réduit emprunte donc la voie logique de la simplicité (relative) et de l'efficacité. Converge fait dans le brutal et le condensé, y compacte un Hardcore vorace vaguement dégingandé sous une puissance Metal écrasante ("Trespasses", "Shame in the way", la fessée thrash "Sadness comes home"). Les éclaircies sont aussi rares et rabougries ("Precipice", tout simplement) que le disque est court et le groupe, pour ne rien arranger, persiste - une fois n'est pas coutume - dans son choix de se priver de compos franchissant la barre des cinq minutes. Tout morceau s'en approchant trop dangereusement étant de toute façon consacré à une punition tempo-bas et en règle oscillant entre Metal Hardcore blindé de groove destructeur ("A glacial place"), Post-Hardcore viril, torturé et fédérateur ("Coral blue") et Sludgecore incendiaire façon Cursed plays "Jane Doe" ("Predator glow"). Seul le morceau-titre, vibrant, renoue véritablement avec la fibre du Converge des trois dernières sorties pour offrir un semblant de répit au milieu du carnage. Inutile de le cacher: la densité du machin fait un peu peur à voir, même pour les aficionados des gaziers.


En définitive les gars de Salem semblent en avoir pour l'instant fini avec leurs explorations tous azimuts et les faux-semblants pour pondre une grosse mine en bonne et due forme. Une sale bête de disque avec ce petit supplément qui n'appartient qu'aux très grands. Car quand Converge cogne ce n'est jamais tout à fait pareil. Je vous laisse imaginer un peu le rendu lorsque le combo décide de s'acharner...

Craipo
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le 4 juin 2015

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