Considéré à l'époque de sa sortie par certains critiques comme un suicide artistique volontaire, le double Self Portrait, bâti sur des fondations tremblotantes de sessions médiocres, d'inédits et titres live, n'avait pas grand chose pour se défendre, mal coincé entre les beaux Nashville Skyline et New Morning.
Puis vint la réhabilitation quarante ans plus tard, avec ce gros dossier Another Self Portrait qui définit Dylan, s'il fallait encore le dire, comme l'un des songwriters majeurs de sa génération voire du siècle précédent.
Les quatres disques, dont un Live avec The Band en août 69 donné sur l'île de Wight face à un public etonnament ravi du niveau style vocal de Dylan, identique à celui de Nashville Skyline, recèlent de perles. Car les répétitions et versions non retenues s'avèrent mieux produites, dépouillées de tout superflu. Car Dylan n'a jamais sonné aussi vrai que lorsqu'il laisse de côté une quelconque posture, celle de l'Élu folk ou de la rock star. Gargantuesque, Another Self Portrait nous convie à la grande messe de la musique américaine, à écouter un soir d'été à la belle étoile, les buches encore crépitantes.