Rehab. Que donne cet album à part ce tube planétaire ? Le surexposé Rehab ? J’avais peur du coup d’épée dans l’eau, deux ou trois bons morceaux, et le reste du remplissage. Et bien les amoureux de la soul vont en avoir pour leur argent, parce que c’est du bon. Ça va du tube You Know I’m No Good, avec un riff de cuivres surpuissant qui se permet d’interrompre la chanteuse, à un Tears Dry On Their Own qui ressemble assez à Ain’t No Mountain High, vieux classique soul, que les amateurs reconnaîtront. Me & Mr Jones, morceau qui pourrait illustrer le prochain film de Tarentino, avec son côté suave très sixties. La chaleur des voix, des cuivres, le chœur de filles, les mielleuses qui roucoulent derrière, et la lead-vocal qui raconte son histoire, c’est…dépaysant. Back To Black bénéficie d’une superbe valeur ajoutée, des arrangements d’une qualité inhabituelle dans la variété aujourd’hui. Sur chaque morceau c’est dosé, c’est équilibré. Ne serait-ce que quand sur You Know I’m No Good, quand la chanteuse se tait, interrompu par le couple batterie-cuivres, qui repart tout seul, avec un groove d’enfer, décuplé par l’effet de surprise. Les violons on en a, pas trop, juste ce qu’il faut, et ils sont bienvenus sur Love Is A Losing Game, rien à dire. Par moments on se limite au classique acoustique basse-batterie, chœurs. Elle est accompagnée par une section rythmique du tonnerre ! On ne le souligne pas assez, ils sont bons, connaissent et aiment cette musique, et la jouent comme si elle avait été créé dans les années 2000. Et ce grain de voix, un timbre tellement reconnaissable, accrocheur, qui peut mettre tout le monde d’accord, si les morceaux sont biens écrits, tel est le cas. Les morceaux ne sont pas tous extraordinaires, mais ils mettent tous sa voix en valeur, et avec des arrangements pareils, qu’est-ce que c’est bon ! On ne peut qu’apprécier le talent.
L’album aurait du sentir la naphtaline, en pleine vague Hip Hop, il aurait dû sentir le kitsch, l’hommage aux années 60, et bien, non, ça sonne très actuel. La personnalité d’Amy y fait pour beaucoup. Une émotion à fleur de peau, son look décalé, sa choucroute sur la tête, ses tatouages, son spleen insondable, on dirait une punk qui est tombée dans la marmite soul par erreur, et qui y est restée. Il est d’ailleurs assez curieux de constater que le meilleur ( ?) album de 2007 est un album de soul, fait par une anglaise qui une voix sortie du ghetto de la mort qui tue. C’est crû, c’est sans concession, cette touche street crédibilty, qui sent le vécu, pas la nostalgie, une tranche de vie, la galère, la mise à nue. Elle donne tout, d’où le fameux Rehab. Alors peut-on rentrer dans la légende avec deux albums seulement à son actif ? Pas sûr. En tout cas on peut remporter un succès inattendu et regarder les étoiles, puis sortir de la lumière. Back To Black. Emportée par son mal de vivre, son blues, la nouvelle princesse de la soul n’a pas eut le temps de confirmer. Une chose est sûre, elle restera une interprète hors norme, (laissons de côté ses frasques de diva décomplexée). Je n’étais pas super fan, j’aimais bien, mais je lui reconnaissais au moins ça, être moins formaté que tout ce que j’entendais à l’époque, et même maintenant, une de celles qui va au charbon quitte à se brûler les ailes, les yeux, le cœur. Il suffit de lire les textes pour comprendre.